Comme tous les trois ans, le Forum mondial de l'eau a réuni pour une semaine de débats la plupart des acteurs mondiaux de l'eau : agences onusiennes, bailleurs de fonds, États, organisations professionnelles et associatives, ONG, élus, collectivités, industriels, etc…
Quel bilan tirer de cette 9ème édition largement occultée par l’actualité ?
D’abord, une première remarque sur l’impact réel de ce rendez-vous, parfois mis en doute. A un moment où l'eau est une des principales sources de tensions à travers le monde et ou les effets du réchauffement climatique alourdissent les pressions qui pèsent sur la ressource, il est indispensable d’alerter sur "La sécurité de l’eau pour la paix et le développement durable", et, pour conjurer ce risque, de tenter de définir les bases d’une action concertée.
Seconde remarque à propos de l’idée, parfois exprimée, selon laquelle rien de concret ni de contraignant n’émergerait d’une grand-messe dont l’utilité ne serait finalement que toute relative. Ce grand rassemblement des différents acteurs du secteur de l’eau se tient pour la première fois en Afrique subsaharienne, à un an de la Conférence de l’ONU sur l’Eau de 2023 (la première depuis 1977), qui, selon le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat publié le 9 août, est – et sera – particulièrement touchée par les extrêmes climatiques, confrontée à une diminution des rendements agricoles et des ressources en eau douce (déjà faibles), une multiplication des maladies et des millions de déplacés.
Dans ce contexte très perturbé, alors que 65% de la population du continent africain sera affectée par le stress hydrique, pour la première fois, le 9ème Forum Mondial de l’Eau appelle à une réponse ferme, globale et coordonnée afin de « repenser la gestion de l’eau pour en garantir l’accès à tous », selon le président de la Banque mondiale et le chef d’État sénégalais – également président de l’Union africaine.
Si le rôle de cet événement n’est pas de se substituer aux politiques qui restent les seules habilités à prendre le relais en s’appropriant les expertises mis à leur disposition par les experts du monde entier, le rendez-vous de Dakar, baptisé « Forum des réponses », entend bien démontrer que des solutions économiquement et technologiquement rationnelles existent.
Quatre domaines doivent être investis en urgence : la sécurité de l’eau et de l’assainissement, l’eau pour le développement rural, la coopération, les « outils et moyens » incluant les questions du financement, de la gouvernance, de la gestion des connaissances et des innovations.
En Afrique plus qu’ailleurs, prévient Khaled Al Mezayen, CEO/Co-founder chez InovaYa dans l’interview croisée à lire dans ce numéro, « si l’on veut être vraiment efficace et rendre l’accès à l’eau potable dans ces zones-là, il faut travailler avec les acteurs qui sont au plus proche de la livraison de l’eau. Ce sont des acteurs privés, des ONG ou des entreprises à impact. On a donc décidé d’apporter notre savoir-faire sur ces sujets et de « plateformiser » nos compétences pour favoriser l’autonomie des porteurs de projets ».
Le low-tech doit jouer un rôle clé pour sécuriser l’accès à l’eau et l’assainissement, martèle de son côté Sébastien Cohin, directeur Cohin Environnement dans ce même entretien. « La vraie urgence étant de traiter l’eau, il y a un travail de fond à faire pour promouvoir les solutions qui sortent des schémas classiques ».
C’est vrai, l’essentiel reste à faire et tous les leviers doivent être actionnés : « Pour relever les défis de l'accès à l'eau et à l'assainissement, de l'impact environnemental et de la résilience, il y a des solutions qui marchent à condition que les personnes qui en bénéficient puissent les pérenniser. Elles sont hybrides : entre solutions traditionnelles et informelles, entre publiques et privées, entre low tech et high tech » affirme Antoine Frérot, PDG de Veolia à l’occasion du forum.
C’est dans la difficulté, souvent que l’on
progresse. Alors c’est le moment ou jamais !
Pascale Meeschaert