Avec 200 collectivités adhérentes, soit 30 millions d’habitants, à une période où se décide la planification écologique de la gestion de l’eau, Amorce veut s'imposer comme un agitateur d’idées et défend le projet d’une nouvelle loi sur l’eau.
Pour la 2ème édition de son colloque Eau, Amorce franchit une nouvelle étape, l’inscrivant comme l’un des rendez-vous fondamentaux des territoires pour mieux identifier la nature des mesures à prendre pour atteindre la réduction de 10% des prélèvements en eau d'ici 2030, avec comme maître-mots une nouvelle loi sur l'eau.
En effet, l’eau est devenue depuis l’été dernier un enjeu majeur et les problèmes liés aux tensions sur la ressource en eau se sont multipliés et diversifiés. Il est donc devenu fondamental de mieux identifier et mieux comprendre la nature des difficultés rencontrées par ces collectivités car « la pression citoyenne s’accentue à tous les échelons », avance Frédéric Pronchery, vice-président délégué à l'eau, l'économie circulaire et la lutte contre les pollutions aquatiques d’Amorce. « Notre réseau est en très forte progression. Avec plus de 200 collectivités adhérentes soit 30 millions d’habitants, il a acquis une véritable légitimité et constitue une plate-forme originale et sans véritable équivalent de rencontres et d'échanges professionnels entre décideurs politiques, professionnels et scientifiques, spécialistes de l'eau et collectivités ».
Si la thématique de l’eau a été très largement oubliée mais que le gouvernement semble être volontariste, « comment atteindre moins 10%, comment allez plus vite ? interroge Nicolas Garnier, délégué général. On voit des nappes qui sont très faibles, des cours d’eau à moins 40 %, mais on fixe des objectifs de réduction de 10% des prélèvements à horizon 2030. Il y a donc quelque chose à inventer sur la déclinaison » assure-t-il.
Besoin d’un projet politique à la hauteur des enjeux
Pour l’association, la planification écologique de la gestion de l’eau avec des objectifs de réduction de prélèvement de 10% entraîne la nécessité de répartir les efforts entre tous les utilisateurs, de les adapter selon chaque territoire et de les évaluer par des moyens de suivi.
De nouvelles techniques d’exploitation et de traitement des eaux ainsi que la modification des comportements en relation avec l’eau doivent promouvoir la protection et l’usage en conscience de la ressource. Ainsi, favoriser la réutilisation des Eaux Non Conventionnelles (ENC) en sortant rapidement du dispositif d’autorisation à durée limitée du décret du 10 mars pour rassurer les porteurs de projets sur les investissements à réaliser à long terme, se fixer un objectif d’équipement en REUT de 80% des STEU rejetant en mer d’ici 2030, équiper de télérelève tous les dispositifs de prélèvement pour pallier le manque de comptage individualisés et mettre en place une tarification incitative pour réduire la consommation d’eau des ménages, sont identifiées comme des leviers d’actions efficaces pour agir quantitativement sur la ressource.
Pour garantir qualitativement le contrôle de la ressource, non seulement une bonne gouvernance de l’eau s’impose désormais pour l’adapter aux besoins croissants des usagers mais également un financement équitable pour couvrir les besoins de prévention et de traitement des micropolluants dans le cycle de l’eau. « Personne ne voit que la redevance qui donne accès au m3 est 50 fois moins chère pour une centrale nucléaire et de 10 à 20 fois moins chère pour un agriculteur que pour un particulier, fustige Nicolas Garnier. Il y a quelque chose qui cloche. L’accès à la ressource devrait être identique. Si l’on aligne les niveaux de redevance de la filière nucléaire sur les niveaux domestiques, on génère 1 milliard d’euros, ce qui n’est pas de trop vus les enjeux d’accompagnement du monde agricole ». Sans compter la menace que présenterait la priorité du parc nucléaire sur les autres usages de l’eau et les demandes d’assouplissement des règles de rejets d'eau réitérées par EDF pour ses centrales nucléaires.
Parmi les orientations proposées par Amorce, figurent la sanctuarisation du principe pollueur payeur, et donc la fin des ponctions de l’Etat sur le budget des agences de l’eau, assortie d’une redevance micropolluants responsabilisant les metteurs sur le marché. « On a mis 15 ans à arracher 15 milliards d’euros pour les points de collecte de déchets. On peut dire que nos propositions ont joué un rôle crucial dans l’avancée des dispositifs de soutien aux collectivités et le lancement de la filière REP des déchets du bâtiment puisque 4000 déchetteries professionnelles vont s’installer sur le territoire », résume Nicolas Garnier.
Le domaine de l’eau ayant besoin d’un soutien massif, « on est des agitateurs d’idées capables de provoquer des mutations assez fortes. Parce qu’on ne voit pas le début d’un vecteur législatif sur un sujet aussi grave, l’exemple de ce que l’on a fait dans l’énergie est un très bon exemple de ce qu’il reste à faire dans l’eau ». S’il n’y a pas encore d’accord global sur un projet de loi eau, de nombreuses collectivités y sont sensibles, affirme son délégué général.
Pascale Meeschaert