C?est fait ou presque : le changement climatique est en train de s'imposer comme une thématique essentielle dans le domaine de la gestion de l'eau.
Les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (Sdage) pour la période 2016-2021, actuellement en cours d'approbation par les comités de bassin, comprennent tous un important volet consacré aux changements climatiques.
L?Agence de l'eau Seine-Normandie, avec la Préfecture d'Ile-de France, vient de lancer l'élaboration d'un plan d'adaptation aux changements climatiques dans le bassin, suivant en cela l'initiative des 5 présidents de régions du Sud-Est, du préfet de bassin et du président du comité de bassin Rhône-Méditerranée Corse qui, les premiers, ont adopté, dès le printemps 2014, un plan d'adaptation aux changements climatiques.
Alors que Paris doit accueillir en décembre prochain la 21ème conférence des Nations unies sur le changement climatique, de nombreuses collectivités s'engagent, même quand elles n?y sont pas contraintes, dans l'élaboration de plans climat-énergie territoriaux (PCET), institués par le Plan Climat et repris par les lois Grenelle.
L?objectif est double : il s'agit, dans un délai défini, d'atténuer, voire de réduire, les émissions de gaz à effet de serre pour limiter l'impact des changements climatiques et adapter les territoires de manière à réduire leur vulnérabilité.
Car cette vulnérabilité est réelle et pas aussi lointaine qu'on le pensait jusqu'à présent. A l'échelle de la France, les ressources en eaux souterraines devraient diminuer sensiblement à l'horizon 2070, de manière générale, de -10 à -30 % selon les scénarios optimistes, de -20 à -55 % d'après les scénarios pessimistes. D?ici à 2050, le débit du Rhône pourrait baisser de 30 %, celui de la Saône et de ses affluents de 20 à 50% d'eau en été et en automne, et jusqu'à 75% en été pour l'Isère et la Durance...
Toujours en 2050, le climat de Bordeaux sera celui de Séville aujourd'hui. Si nos besoins restent constants, il nous manquera 2 milliards de m3/an pour satisfaire les besoins de notre industrie, de notre agriculture et de notre alimentation en eau potable...
Les changements climatiques n?épargneront aucune de nos régions, ni aucun secteur de notre économie : augmentation du niveau des océans (plus d'un mètre en un siècle selon une étude de la Nasa !), des températures, de la fréquence des évènements hydrologiques extrêmes (inondations et sécheresses), baisse du niveau des ressources en eau...
Au delà de la gestion de l'eau, l'agriculture, les écosystèmes, les infrastructures, la pêche, le tourisme, l'activité économique, la production et la demande d'énergie, les transports... sont tous ajustés sur des paramètres climatiques historiques. Toutes ces activités, déjà sensibles à la variabilité naturelle du climat, seront nécessairement affectées lorsque les données climatiques ne coïncideront plus avec les statistiques climatiques historiques.
Pour les spécialistes, il faut donc s'adapter et vite.
Même les assureurs s'inquiètent. L'un des plus importants, Generali, vient de constituer une équipe pluridisciplinaire de chercheurs incluant géographes, climatologues, actuaires...etc, pour étudier, modéliser et tenter de limiter les risques liés au changements climatiques sur le territoire français et l'Outre-Mer.
Car, on le sait, l'ampleur des risques encourus est directement liée aux choix effectués en matière de développement et d'aménagement du territoire. Il est donc plus que temps de réexaminer ces choix et de les réévaluer à la lumière de ce que nous savons aujourd'hui en la matière.
L?heure n?est plus à disserter entre les mérites respectifs des stratégies d'atténuation ou d'adaptation. Agir n?est plus une option.
Gestion plus raisonnable des ressources et des usages, lutte contre le gaspillage de l'eau, réutilisation des eaux usées traitées, efficience énergétique, exploitation de l'énergie hydraulique et de la biomasse, préservation de la biodiversité... sont quelques unes des voies dans lesquelles il faut s'engager, maintenant.