Le vol d’eau est une pratique largement répandue à l’échelle de la planète, mais on n’en parle pratiquement jamais. Pourtant, si l’on en croit un rapport publié conjointement en 2016 par Interpol et le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) [1], entre 30 et 50% de l’approvisionnement mondial en eau seraient chaque année détournés de façon illégale des usages pour lesquels ils étaient prévus, en particulier dans le secteur de l’agriculture. Une équipe internationale de chercheurs emmenée par l’Université d’Adélaïde a mis au point une méthode qui permet de mieux comprendre ce phénomène et d’identifier les moyens de dissuasion qui permettraient de protéger cette ressource essentielle.
Pour
leur étude publiée par la revue Nature Sustainability [2], les
chercheurs se sont principalement intéressés aux usages de l’eau dans trois
types de cultures particulières : la marijuana en Californie, les fraises
en Espagne et le coton en Australie. Outre le fait que ces différentes cultures
nécessitent de grandes quantités d’eau, leurs producteurs ont en commun le
sentiment que les lois privilégient injustement la protection de
l’environnement au détriment des impératifs économiques.
Dans
ces conditions, il leur paraît assez normal de s’approvisionner en eau par tous
les moyens, fussent-ils illégaux, par pompage clandestin par exemple, plutôt
que de respecter les réglementations locales. Cette pratique est d’autant plus
courante que les risques d’être pris en faute et sanctionné sont faibles, et
que la population locale semble se désintéresser du problème. À quoi s’ajoutent
les incertitudes liées au changement climatique et à la baisse de la
pluviométrie.
Pour
l’expert, il apparait clairement que ce phénomène est dû à une défaillance
systématique des garde-fous politiques, juridiques, institutionnels ou
autres : « lorsque les autorités de contrôle ne comprennent
pas la valeur de l’eau, les lacunes en matière de sanctions augmentent les
risques de vol ». La première réponse serait donc de faire appel à des
moyens technologiques, comme des capteurs ou d’autres outils de surveillance
pour détecter les vols d’eau. Mais cela n’aura de sens que si les
réglementations locales sont appliquées de façon plus rigoureuse.
L’équipe de recherche s’est donc attelée à développer un modèle de calcul qui permet aux gestionnaires de l’eau de mesurer l’efficacité de leurs systèmes de surveillance, des procédures judiciaires et des sanctions imposées en cas d’infractions. En fonction des données recueillies et analysées et si besoin est, ils pourront alors décider d’améliorer leurs dispositifs afin de les rendre davantage dissuasifs et ainsi d’économiser substantiellement leurs ressources en eau.
Source : University of Adelaide
[1] Interpol – UNEP, Strategic report. Environment, peace and security : a convergence of threats (December2016). https://wedocs.unep.org/bitstream/handle/20.500.11822/17008/environment_peace_security.pdf?sequence=1&isAllowed=y
[2]
Adam Loch et al., “Grand theft water and the calculus of compliance”, Nature
Sustainability (2020). https://www.nature.com/articles/s41893-020-0589-3