Alors que la pression réglementaire s’accroît sur les détenteurs de déchets, l’éco-organisme Récylum propose aux entreprises une solution gratuite et complète pour collecter et recycler leurs matériels électriques et électroniques en fin de vie. Un service qui concerne aussi bien les petits matériels collectés dans des conteneurs que des équipements industriels de plusieurs tonnes. Déjà présent auprès des acteurs de la filière eau, Récylum souhaite aller plus loin en aidant les entreprises du secteur à mieux comprendre leurs droits et devoirs. Rencontre avec Hervé Grimaud, directeur général de Récylum, l’éco-organisme en charge de la collecte et du recyclage des déchets électriques et électroniques professionnels, aussi appelés DEEE Pro.
Revue E.I.N. : Quelles sont les obligations qui pèsent sur les détenteurs d’équipements électriques et électroniques ?
H.G. : Les entreprises qui veulent se défaire d’équipements électriques et électroniques dont elles n’ont plus l’usage sont considérées comme des producteurs de déchets. A ce titre, elles sont responsables du devenir de leurs déchets et notamment de leurs déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE). La responsabilité des particuliers s’arrête lorsque l’objet est mis à la poubelle : c’est alors la collectivité locale qui devient responsable de sa collecte et de son traitement. Lorsque vous êtes professionnel, cette responsabilité est sans limite, c’est-à-dire que même si vous contractez avec un gestionnaire de déchets, vous restez indéfiniment responsable du bon traitement de vos déchets. Cela signifie, très concrètement, que si le traitement de ce déchet n’est pas convenablement effectué, les pouvoirs publics peuvent vous contraindre à récupérer vos déchets pour les faire traiter conformément à la réglementation, à vos frais.H.G. : C’est quelque chose qui a longtemps relevé du risque théorique… mais c’est de moins en moins le cas. On observe en effet une nette augmentation du nombre de contrôles et de sanctions associées à l’inobservation de la réglementation. La seule manière pour le détenteur d’être relevé de cette responsabilité, c’est de faire appel à un éco-organisme agréé par les pouvoirs publics qui, parce qu’il répond à un cahier des charges très contraignant et qu’il est régulièrement audité, présente suffisamment de garanties pour relever le détenteur de toute responsabilité.
Revue
E.I.N. : Pouvez-vous nous présenter Récylum en quelques mots ?
H.G. : Récylum est un éco-organisme à but non lucratif en charge depuis 2006 de la collecte et du recyclage des lampes usagées et, depuis 2012, des équipements électriques et électroniques professionnels du bâtiment, de l’industrie, de la recherche et du médical : matériels d’éclairage, de régulation et de contrôle, instruments de mesure, de test, équipements médicaux, outillages électriques….
Récylum
est financé par des industriels qui mettent ces équipements sur le marché et
qui, conformément au principe de la responsabilité élargie du producteur(REP),
doivent prendre en charge la collecte et le recyclage des DEEE de leurs
clients, et peuvent le faire collégialement via un éco-organisme. Récylum fait
en sorte que les industriels, collectivités territoriales ou autres
professionnels de tous ordres détenant des équipements électriques usagés
puissent les faire collecter et recycler sans se poser la question du coût.
Nous
travaillons déjà avec de grandes entreprises dans les domaines du contrôle et
de l’analyse de l’eau, ou parmi les fabricants de compteurs et pompes… Je
citerais notamment Diehl Metering, Ecometering, Zenner Itron, Elster Water,
Agilent, Saur, Ista, Melag, Comap ou encore Axflow… Au total, près de 1.500
fabricants d’équipements ont décidé de nous faire confiance pour recycler les
équipements électriques de leurs clients.
Revue
E.I.N. : Que doit-on entendre par équipement électrique ?
H.G. :
Tout équipement électrique fonctionnant en basse tension, de la machine pesant
2 tonnes jusqu’à l’automate programmable en passant par les armoires
électriques, pompes, vérins, instruments de mesure, etc…
Dans
la filière eau, nous récupérons aussi bien les luminaires que les outils de
contrôle et de mesure ou encore les compteurs volumétriques, les pompes, les
analyseurs etc…
Notre
action repose sur l’obligation réglementaire qui a étendu en 2005 le principe
de la REP aux équipements électriques et électroniques, qu’ils soient destinés
aux particuliers ou aux professionnels, ce qui a donc contraint les fabricants
de ces équipements à en organiser et financer la fin de vie.
Revue
E.I.N. : En quoi consiste, pratiquement, votre action ?
H.G. : Sans être ni transporteur ni opérateur de traitement, nous orchestrons les opérations de collecte et de traitement des déchets qui nous sont confiés. Nous offrons aux détenteurs d’équipements électriques un service de collecte, de dépollution et de recyclage conforme à la réglementation sans surcoût puisqu’ils ont déjà payé pour ce service. Je m’explique : lorsqu’une entreprise achète des équipements électriques, elle s’acquitte, souvent sans le savoir, d’une éco-contribution qui finance la collecte et le recyclage de ces matériels. Cela signifie qu’une fois ses équipements électriques en fin de vie, l’entreprise a le droit de les faire enlever et recycler gratuitement par Récylum.
H.G. :
Récylum a développé plusieurs solutions de collecte adaptées à toutes les
besoins en fonction des volumes de déchets à évacuer et des contraintes
opérationnelles des détenteurs de ces déchets. Les enlèvements peuvent
être récurrents, avec mise à disposition permanente de conteneurs pour le petit
matériel directement dans les locaux des détenteurs, ou plus ponctuels
lors d’un déstockage de vieux matériel, d’un chantier de rénovation ou de
l’évacuation d’équipements volumineux (parfois
synchronisée avec la livraison du matériel neuf de remplacement). Et
tout cela en toute gratuité pour les entreprises qui font directement appel à
nous. Les détenteurs peuvent également bénéficier d’un réseau de déchèteries
professionnelles partenaires, ou encore faire appel à leur prestataire de
maintenance, leur gestionnaire de déchets ou leur fournisseur qui se chargeront
de remettre à Récylum les équipements usagés, parfois moyennant le paiement
d’un service complémentaire. Charge au détenteur de DEEE d’exiger que son
prestataire remette les DEEE à Récylum et lui transmette pour preuve des
documents de traçabilité.
Afin
de déterminer la meilleure solution de collecte, l’idéal est que les
entreprises nous contactent pour faire le point sur leur besoin ou visitent
notre site Internet.
Revue E.I.N : Que deviennent les équipements une fois collectés ?
H.G.: Ils sont envoyés vers les centres de traitement de la filière qui vont alors les démanteler et les dépolluer. Notre responsabilité s’étend jusqu’aux filières en aval, c’est-à-dire à toutes les étapes jusqu’aux étapes finales de recyclage, valorisation énergétique ou destruction définitive. Nous nous assurons que toutes les fractions (métaux, plastiques, verre…) ont été proprement dépolluées avant d’être mises en filières auprès d’acteurs capables de leur redonner une valeur. Nous suivons l’ensemble de ce processus, et disposons d’un droit de regard, voire de veto – de manière à s’assurer que ces filières offrent toutes les garanties nécessaires pour que le maximum de matières soit recyclé dans le cadre de la fabrication de produits neufs.
Revue
E.I.N. : Ou en sommes-nous aujourd’hui en matière de recyclage ?
H.G. :
En termes de captation, on estime aujourd’hui que moins de 20% des équipements
électriques des professionnels qui arrivent en fin de vie sont recyclés. C’est
peu par rapport à ce que l’on observe au sein de la filière des DEEE des
particuliers dont le taux de collecte sur l’électroménager avoisine aujourd’hui
les 45%, mais les filières professionnelles sont plus hétérogènes et les
obligations plus récentes. L’objectif
réglementaire vise à atteindre un taux de collecte de 65 % des équipements
électriques vendus, à l’horizon 2019.
En
termes de valorisation, nous devons recycler au moins 80% du poids des
équipements collectés. Les bilans matières que nous réalisons régulièrement
montrent que l’on se situe largement au dessus, autour de 85%.
H.G. :
La réglementation, en matière de recyclage, ne doit pas être le seul
déterminant. Il existe d’importants gisements de progrès qui nécessitent de
faire de la pédagogie, auprès des détenteurs comme auprès des fabricants, pour
systématiser la collecte, le recyclage et la valorisation.
Si
nous avons une importante mission d’information des détenteurs de DEEE, notre
rôle consiste aussi à accompagner les fabricants pour que leurs produits soient
de plus en plus facilement recyclables. C’est de l’écoconception appliquée à la
fin de vie des produits qui consiste à inciter les fabricants à faire des
efforts dès la conception des équipements pour qu’ils soient plus faciles à
recycler et pour qu’ils contiennent moins de polluants.
Les
acheteurs s’interrogent également de plus en plus fréquemment sur le taux de
recyclabilité des produits, qui devient un critère différenciant dans les
appels d’offres. Nous proposons donc aux industriels de les accompagner en
toute neutralité commerciale pour les aider à répondre à ces nouveaux enjeux.
Un
autre aspect de notre action concerne l’intégration des matières
recyclées : beaucoup d’industriels travaillent la recyclabilité de leurs
produits mais moins nombreux sont ceux qui sont enclins à intégrer des matières
recyclées dans leurs processus de fabrication.
Propos
recueillis par Vincent Johanet