Face au défi des pollutions de toutes origines, l’agence de l’eau Rhin-Meuse et ses homologues allemands et luxembourgeois ont mené une campagne transfrontalière de biosurveillance du 4 au 6 mai 2023. Le bateau laboratoire Max Prüss appartenant au Land de Rhénanie-du Nord-Westphalie, a effectué des prélèvements de dreissènes dans les eaux de la Moselle française, en amont de ceux réalisés sur son cours international la semaine suivante. Véritables bioindicateurs de l’état des eaux, ces moules zébrées d’eau douce permettront de révéler les éventuels polluants présents dans les cours d’eau, notamment la famille des HAP (Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques) classés comme cancérigènes. Les résultats de ces prélèvements feront l’objet d’une évaluation commune transfrontalière puis, à l’instar de l’ensemble des données issues du dispositif de surveillance, seront rendus publics dès qu’ils auront été validés.
Dans le cadre de la coopération transfrontalière menée entre l’agence de l’eau Rhin-Meuse et les Commissions Internationales pour la Protection de la Moselle et de la Sarre (CIPMS), le bateau laboratoire flottant de 27 m2 ,Max Prüss, a sillonné durant 9 jours la Sarre et la Moselle, de l’embouchure dans le Rhin à Coblence jusqu’à la confluence avec la Meurthe à Nancy, pour prélever des dreissènes, petites moules d’eau douce.
Equipé de moyens de prélèvements adaptés à tous types de supports d’analyse (grappin, centrifugeuse) et de nombreux appareils de mesure en continu permettant la préparation, l’analyse (température de l'eau, pH, conductivité électrique, teneur en oxygène et turbidité) et le stockage des échantillons, les analyses effectuées sur les moules zébrées permettront d’évaluer de manière fiable la présence dans les cours d’eau de certains polluants bioaccumulables (dont onze paramètres chimiques ciblés au niveau européen) et de tenter de déterminer les sources des pressions polluantes, notamment pour la famille des HAP (Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques) classés comme cancérigènes.
« Les organismes vivants, dont l’Homme, dépendent de la qualité de l’eau du territoire sur lequel ils vivent. Pour pouvoir prendre soin de cette eau si précieuse, qu’elle soit en surface ou souterraine, il est nécessaire de diagnostiquer au préalable son état. Aussi, le travail de surveillance active mené par l’agence de l’eau Rhin-Meuse et ses partenaires internationaux répond à un enjeu majeur dans la préservation de la ressource en eau, permettant d’engager la bonne action au bon endroit dans une logique d’efficience des financements publics. Les résultats collectés permettront d’évaluer l’impact des polluants sur la santé humaine, les organismes aquatiques et leurs écosystèmes pour mettre en place des actions concrètes visant à protéger la ressource. En effet, il n’existe pas de politique de l’eau pertinente sans une surveillance efficace des milieux aquatiques » souligne Marc Hoeltzel, directeur général de l’Agence de l’eau Rhin-Meuse.
L’eau n’a pas de frontières
La coopération transfrontalière sur la Moselle et la Sarre au sein des CIPMS est le fruit d’une longue tradition de près de 60 années. Grâce à des actions transfrontalières coordonnées, l’agence de l’eau Rhin-Meuse, le Grand-Duché du Luxembourg et les Länder de Rhénanie-Palatinat et de Sarre disposent d’une base de données partagée et d’une compréhension commune des actions et des défis à mener afin d’atteindre le bon état des eaux dans les bassins fluviaux internationaux. « Cet événement nous montre de manière exemplaire à quel point une coopération transfrontalière et partenariale est nécessaire. Tout comme l'eau ne s'arrête pas aux frontières nationales, les polluants de l'eau ne s'arrêtent pas non plus aux frontières. La directive cadre européenne sur l'eau a créé des conditions cadres interbassins pour des mesures de surveillance et de gestion transfrontalières » explique Andreas Christ, directeur de l’eau de Rhénanie-Palatinat. « En tant que riverain aval, le Land de Sarre dépend des mesures effectuées en amont. Nous sommes heureux de cette coopération internationale qui a déjà porté ses fruits : les pollutions ont diminué grâce aux multiples mesures mises en œuvre par nos partenaires au cours des dernières années. Nous devons désormais augmenter nos ambitions pour la Moselle afin d’aboutir à une eau saine et propre dans tous les pays riverains » ajoute Petra Berg, ministre en charge de l’environnement du Land de Sarre. « Nous faisons face à plusieurs problématiques majeures : celles de protéger les cours d’eau en réduisant les polluants existants et émergents et en facilitant leur adaptation au changement climatique afin de protéger la biodiversité. Nous remercions le Land de Rhénanie du Nord-Westphalie d’avoir permis la mise en œuvre de cette coopération transfrontalière via la mise à disposition du bateau laboratoire Max Prüss » poursuit André Weidenhaupt, premier conseiller du gouvernement du Luxembourg.
50 ans de surveillance des eaux du bassin
Véritable outil de pilotage de la politique de l’eau, la surveillance de la qualité des milieux aquatiques bénéficie de plus de 50 ans d’histoire, de données et de savoir-faire. Les premières opérations ont été engagées dans les années 1950-1960 sur le Rhin et la Moselle, via les toutes jeunes Commissions fluviales internationales, puis déployées à l’échelle du bassin en 1971. Au fil des années, elles ont été renforcées, consolidées et modernisées, permettant de bâtir une connaissance sur le long terme, essentielle aux politiques environnementales. Au total, ce sont quelque 800 points de surveillance en eau de surface et 500 en eau souterraine qui permettent à l’agence de l’eau Rhin-Meuse d’établir des bilans de santé des rivières, lacs et eaux souterraines.