Voies navigables de France (VNF) et les agences de l’eau renforcent leur partenariat visant à favoriser la gestion coordonnée de l'eau à l’échelle des bassins versants. Objectif : accélérer la stratégie de gestion de l’eau de VNF pour une gestion plus fine de la ressource en eau du réseau navigable, essaimer les expérimentations réussies mises en œuvre dans les bassins versants.
Avec la forte variabilité de l’hydrologie en lien avec le dérèglement climatique, les agences de l’eau ont une attente toute particulière à associer VNF à toutes les réflexions locales en matière de réduction des pressions quantitatives sur les milieux aquatiques et à obtenir des résultats tangibles en termes de gestion équilibrée des ressources en eau d’ici 2027 ont rappelé le 5 juillet dernier les six directeurs généraux des agences de l’eau.
Le partenariat signé entre les acteurs consiste à mieux prendre en compte les solutions fondées sur la nature pour amplifier les moyens dédiés aux actions d’adaptation au changement climatique. Retour sur les projets menés depuis trois ans dans les territoires traversés par le réseau navigable.
Les canaux de Bourgogne et du Centre sous surveillance
Les bassins de l’Ouche et de la Dheune alimentent les canaux de Bourgogne et du Centre gérés par Voies navigables de France. L’établissement public optimise leur gestion hydraulique, notamment en période estivale, grâce à l’installation d’une trentaine de capteurs interconnectés respectivement avec les rivières de la Dheune et de l’Ouche. Destiné à calculer les quantités d’eau prélevées, rejetées ou transportées dans le milieu naturel, ce dispositif permet de gérer les consommations en temps réel, une nécessité dans le contexte de raréfaction de la ressource en eau.
Une opération financée à hauteur de 80 % par l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse qui a également apporté son expertise en matière de métrologie et d’hydrologie.
Réduction des prises d’eau sur les Canal latéral à la Garonne et Canal du Midi
En 2022, Voies navigables de France a engagé un projet global de modernisation de la gestion hydraulique de ses infrastructures situées sur le bassin Adour-Garonne, avec pour objectif la réduction des prises d’eau en Garonne et l’optimisation des ressources de la montagne Noire. L’opération concerne la mise en place d’instrumentation, d’outils de télégestion et de supervision pour 115 ouvrages implantés sur le Canal latéral à la Garonne et le Canal du Midi côté Adour-Garonne. Les études et travaux se dérouleront jusqu’en 2024 pour un coût total de l’ordre de 5 M€ dont 50% financés par l’agence de l’eau Adour-Garonne. Les économies de prélèvement en eau sont estimées de 4 à 7 Mm3 en période d’étiage. Ce projet est identifié parmi les actions phares de la stratégie de retour à l’équilibre quantitatif du sous bassin Garonne.
Rééquilibrage du lit de la Loire
Ce programme vise à restaurer l’équilibre naturel du fleuve tout en conciliant les usages. L’année 2021 a été marquée par le démarrage de travaux de remodelage des « épis de navigation » (petits murets de pierre) sur le secteur entre Montjean-sur-Loire et Ingrandes-le-Fresne-sur-Loire.
Ces travaux, portés par Voies navigables de France, ont concerné 23 épis et ont été finalisés à l’étiage 2022. Ainsi, 7 épis ont été supprimés et 16 ont été raccourcis afin de redonner de l’espace de liberté à la Loire et de mieux connecter les annexes fluviales et bras secondaires au bras principal. Le montant de ces travaux est de 2,2 M€ et ont fait l’objet d’un financement de l’agence de l’eau Loire-Bretagne à hauteur de 45% soit 1,01 M€.
Restauration de la continuité écologique à la confluence Selle/Escaut
La Selle est un cours d’eau très fragmenté par les ouvrages hydrauliques qui peuvent perturber son fonctionnement hydromorphologique. À sa confluence avec l’Escaut, subsistait un seuil constitué de palplanches métalliques qui créait un blocage migratoire pour les populations d’anguilles au niveau de cet ouvrage mais aussi de l’écluse de navigation de Denain.
En 2020, Voies navigables de France a entrepris des travaux de restauration de la continuité écologique au droit de ces ouvrages avec comme cible prioritaire l’anguille, espèce classée en danger critique d’extinction. Les travaux ont consisté en l’effacement du seuil à la confluence de la Selle avec l’Escaut et en la renaturation écologique de la rivière sur ce tronçon. Par ailleurs, dans le cadre de la réfection de l’écluse de Denain, VNF a porté la maîtrise d’ouvrage de la création d’une rampe à anguilles pour libérer l’accès des anguillettes vers les sources du fleuve. L’Agence de l’eau Artois-Picardie a apporté au total près de 1,5 M€ de participation financière pour ces opérations, soit 80% du montant total des travaux, réalisés pour rappel en réponse à la pollution de l’Escaut en 2020.
Restauration et confortement du barrage réservoir de la Mouche.
Le barrage réservoir de La Mouche à Saint-Ciergues (Haute-Marne) fait actuellement l’objet d’un programme de travaux d’ampleur, qui s’échelonnera jusqu’en 2025. Il s’agit d’un ouvrage de gestion hydraulique important pour le territoire. Géré par Voies navigables de France (VNF), cette infrastructure construite à la fin du XIXe siècle, contribue à l’alimentation du canal entre Champagne et Bourgogne pour le trafic fluvial, ainsi que de la Marne et de la rivière de la Mouche à des fins de préservation des milieux naturels. Elle constitue également une source importante d’alimentation en eau potable des populations du secteur de Langres. Les travaux de confortement de l’ouvrage démarrés au premier trimestre 2023 permettront d’augmenter la capacité de stockage du réservoir de 2,15 millions de m3 et donc de passer d’un maximum de 5,64 millions de m3 à 7,79 millions de m3. Le financement de l'agence de l'eau Seine-Normandie s’élève à 213 000 euros.
Restauration de la continuité piscicole dans la boucle de la Grande Bosse en Seine-et-Marne
L’aménagement se trouve dans la boucle de la Grande Bosse, sur les communes de Bazoches-les-Bray, Vimpelles et Saint-Sauveur-les-Bray. Il crée un ouvrage hydraulique de dérivation des eaux de la Seine vers la boucle, ainsi qu'une passe à poissons pour rétablir la continuité piscicole interrompue par le barrage existant. La passe à poissons est une rampe naturelle avec des macro-rugosités, offrant aux poissons un cheminement adapté sur une longueur de près de 115 m et une hauteur de chute de 3,16 m. Le financement de l'agence de l'eau Seine-Normandie couvre 60% du coût de l’aménagement soit près de 2 M€.
Innovations à St Jean de Losne pour lutter contre le Myriophylle hétérophylle
Le réseau navigable à petit gabarit de VNF doit faire face depuis plusieurs années à la prolifération de plantes telles que les Myriophylles, les élodées ou encore les Jussies qui ont des conséquences néfastes pour les écosystèmes et la préservation de la biodiversité mais aussi pour le réseau fluvial, ses infrastructures et les activités économiques qui s’y déroulent.
Pour lutter contre la plante exotique envahissante (Myriophylle hétérophylle) qui a colonisé la gare d’eau sur la Saône au débouché du canal de Bourgogne, VNF et ses partenaires ont lancé une expérimentation combinant 4 techniques de lutte : un biotraitement, un dispositif de rideaux de bulles, des systèmes d’aération et de brassage d’eau et un inhibiteur de photosynthèse. D’un coût estimé à près de 200 000 €, cette initiative portée par VNF a reçu le soutien financier de l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse.
Restauration des continuités sur l’Ill
C’est en plein coeur historique de Strasbourg que se situe le barrage des Faux-Remparts datant de 1870. Ne disposant pas encore d’un dispositif de franchissement piscicole opérationnel, l’ouvrage a bénéficié de l’aménagement d’une passe à bassins à fentes verticales. Cet ouvrage permet le passage des migrateurs (poissons nageant en surface mais également de fond comme les anguilles) remontant l’Ill, axe migrateur prioritaire pour le saumon et l’anguille. Cet ouvrage était d’autant plus attendu qu’une grande partie des ouvrages sur l’Ill étaient déjà équipés sur les parties aval et moyennes, ouvrant enfin la voie en aval vers une très grande partie des affluents favorables aux grands migrateurs. Cette réalisation a bénéficié d’un soutien financier de l’agence de l’eau Rhin-Meuse à hauteur de 452 000 €.