L'Assemblée Générale des Nations-Unies vient d'adopt
A un mois de la COP21, il y a tout lieu de
rester inquiet face aux impacts du changement climatique sur le devenir des
ressources en eau et la satisfaction des besoins humains en ce domaine. A Lima
en 2014, faute d'accord mondial de réduction des gaz à effet de serre (GES),
les Etats ont été engagés à fournir des contributions nationales volontaires :
nous disposons aujourd'hui de plus de 110 contributions représentant 150 pays
(l'UE compte pour une seule contribution) sur 195, et plus de 85% des émissions
: cela permet déjà d'avoir une idée du chemin dessiné pour l'avenir en termes
de réduction des GES.
Malheureusement, ce chemin n'est pas en phase
avec les enseignements du GIEC sur ce qu'il faudrait faire pour rester dans la
perspective des 2°C et, sauf sursaut prochain des Etats, nous nous dirigeons
plutôt vers 3 à 4 °C. Les conséquences sur le fonctionnement des cycles de
l'eau ont été décrites dans le 5eme rapport du GIEC: elles seront
considérablement aggravées pour chaque degré supplémentaire par rapport aux
hypothèses de travail de la Convention. Elles risquent de se révéler
catastrophiques pour certaines régions menacées par le relèvement du niveau des
mers, la multiplication de phénomènes exceptionnels (inondations, typhons) ou
l'aggravation des sécheresses.
Face à la récurrence de grandes catastrophes
climatiques et aux craintes que suscite une élévation du niveau des mers, de
nombreux PMA ont demandé que soit ouvert un nouveau chapitre "loss and
damages" de la Convention pour les pays pauvres les plus menacés. A
l'occasion des COP de Varsovie et de Lima en 2013 et 2014, les pays du sud ont
exigé de développer le volet adaptation de la Convention.
Cela s'est déjà traduit par des orientations
fortes comme celle de consacrer la moitié des dotations du Fonds Vert pour le
Climat à des actions d'adaptation. Un examen des pratiques actuelles des fonds
multilatéraux ou bilatéraux en matière d'adaptation montrent que la grande
majorité des actions financées concernent plus ou moins directement le domaine
de l'eau. Nous connaissons, aujourd'hui, une multiplication des grandes crises
migratoires dues aux guerres ; les crises climatiques ne feront qu'aggraver les
désordres constatés. En Syrie entre 2004 et 2006, durant les pires années de
sécheresse, plus d'un million de paysans ont rejoint le million de réfugiés
irakiens.
Demain, chacun sait que sur les zones
sub-sahéliennes, ce sont plus de 200 millions d'individus qui sont menacés de
devoir se déplacer faute de pouvoir se nourrir. Mme Monique Barbut, Présidente
de la Convention Désertification, à l'occasion des journées de Montpellier de
Juin 2015, a tiré la sonnette d'alarme en ce sens. Nos collègues de la
Convention Désertification appellent fort justement à une attention accrue au
devenir de nos sols agricoles, mais avant cela-même, c'est aux modifications
profondes du cycle de l'eau que nous devrons faire face.
Face à ces désordres annoncés, la France a
appelé à élaborer un agenda des solutions proposées par la société civile pour
lutter contre les effets du changement climatique. De ce point de vue, le monde
de l'eau est riche de solutions techniques, classiques ou innovantes. Mais
comme la géo-ingénierie ne saurait être la solution espérée par certains
pour" refroidir la planète", l'hydro-ingénierie ne saurait résoudre
tous les problèmes. De nombreux exemples venant d'autorités locales ou d'ONGs
montrent comment aller au-delà des seules réponses technologiques. Il faudra,
aussi, déployer de nouveaux mécanismes de solidarité ou de résilience. Là
encore, le monde de l'eau dispose d'une expérience ancienne alliant de
multiples outils allant de la connaissance, la planification, la gestion
intégrée de ressources en eau, la prise en compte des contraintes et potentiels
hydro-écologiques des milieux aquatiques.
Encore faut-il s'entendre sur les
complémentarités ou contradictions entre stratégies de développement,
d'atténuation et d'adaptation : il existe hélas, aussi, de multiples exemples
les projets de mal-adaptation. Le Partenariat Français pour l'Eau a élaboré un
premier agenda de bonnes pratiques et avec l'appui de l'AFD et fort de
l'expérience de tous les acteurs français, compte déposer des propositions à la
COP21 qui concourront à mieux qualifier des projets d'adaptation
"climato-sympathiques".
Faire face aux défis du changement climatique
comme des ODD implique, néanmoins, d'imaginer des nouveaux modes de vie plus
respectueux de notre planète : c'est l'exercice auquel nous invitent les
scénarii développés dans le programme "our life 21 " à l'instigation
de l'association 4D pour une quinzaine de pays de notre planète. La COP 2015 de
Paris va représenter un enjeu immense pour nos générations et celles qui vont
nous succéder.
La communauté internationale a déjà pris
beaucoup de retard pour espérer contrôler les conséquences de toute une série
de phénomènes bio-physiques dont l'évolution est déjà tracée pour plusieurs
années.
Espérons un sursaut à Paris.