Le rapport mondial sur la corruption 2008, publié par l'ONG Transparency International, analyse l'impact et l'ampleur de la corruption dans les différents secteurs de la gestion de l'eau. Il démontre que la crise de l'eau est d'abord une crise de la gouvernance dont la corruption est l'une des causes les plus profondes.
Les services d'eau et d'assainissement, quels que soient leurs modes de gestion, peuvent être affectés par la corruption à plusieurs niveaux.
Au niveau institutionnel, la corruption incite à privilégier des projets à grande échelle au détriment des services essentiels, comme l'accès à l'eau potable et l'assainissement. Cette forme de corruption peut aussi biaiser les choix d'investissements. A un niveau plus local, la corruption alourdit les coûts des investissements et des achats. Ces pratiques peuvent compromettre la qualité et la continuité du service, qu'il soit assuré par un opérateur public ou privé.
Au niveau des usagers du service, des pratiques telles que des bakchich pour accélérer l'accès aux services ou les passe-droits pour échapper au paiement de sa consommation, se traduisent par des surcoûts pour les autres usagers. Enfin, lorsqu'elle joue sur l'obtention d'autorisations administratives (permis de travaux, ouverture de fouilles'), la corruption provoque une inflation des coûts et ralentit les programmes d'extension des réseaux vers les populations défavorisées.
Au total et à tous les niveaux, la corruption ruine les efforts de bonne gouvernance, accroît les coûts, nuit à l'efficacité de l'action publique et privée et creuse les inégalités.
La Banque mondiale, qui s'était elle aussi penchée sur le sujet l'an dernier, avait estimé que la corruption réduisait de 20 à 40% l'efficience de l'action publique dans le secteur de l'eau. Le deuxième Rapport mondial des Nations Unies sur la mise en valeur des ressources en eau, publié lors du 4ème Forum mondial de l'eau, avait quant à lui estimé le cout de la corruption à plusieurs centaines de millions de dollars chaque année?
Ce nouveau rapport confirme ces évaluations. Il indique que dans les pays en voie de développement, la corruption accroît de 30% le coût de raccordement au réseau d'un foyer ce qui gonflerait de plus de 48 milliards de dollars US la facture pour parvenir aux objectifs du Millénaire pour le développement.
En pesant également sur les systèmes d'irrigation, la corruption exacerbe l'insécurité alimentaire et la pauvreté. En Inde, par exemple, le rapport indique que le poids total de la corruption portant sur les contrats d'irrigation représente plus de 25% du volume du contrat, que se partagent les fonctionnaires avant d'être détournés vers le haut par le biais du système politique, ce qui rend difficile les initiatives visant à briser le cycle de la collusion.
Le rapport de Transparency International présente bien quelques recommandations pour lutter contre ce fléau, mais rien de bien nouveau : renforcement du contrôle réglementaire de la gestion et de l'utilisation de l'eau, mise en place d'outils garantissant une concurrence loyale et une mise en ?uvre responsable des contrats, etc...
Pour l'ONG, La lutte contre la corruption passe nécessairement par une dynamique du changement et une coalition mondiale contre ce phénomène. C?est pourquoi un réseau international intitulé WIN (Water Integrity Network), a été créé il y a deux ans à l'occasion de la Semaine Internationale de l'Eau de Stockholm à l'initiative notamment de Transparency international et de SIWI.
Objectif : traquer la corruption dans ce secteur. La route sera longue?
Pour en savoir plus : http://www.transparency.org