Alors que le gouvernement a engagé la révision de plusieurs textes juridiques, la FNCCR, favorable à un strict contrôle de la qualité des boues d’épuration, dénonce toutefois les nouveaux freins pour la valorisation des déchets organiques par les collectivités au profit de l’incinération, faute de pouvoir utiliser d’autres solutions locales.
Les collectivités locales sont compétentes pour l’assainissement des eaux usées et la collecte des ordures ménagères, dont les biodéchets des ménages. Elles assurent avec efficacité la collecte de matière organique et sont elles-mêmes productrices de biodéchets (restauration scolaire, etc.) et de déchets verts (espaces verts, terrains de sport, voirie…). Elles sont aussi pleinement engagées dans la transition énergétique avec le développement des énergies renouvelables.
La FNCCR avait déjà condamné la nouvelle réglementation qui interdit aux collectivités de co-composter ou de co-méthaniser leurs boues d’épuration et leurs biodéchets, y compris ceux qu’elles ont produits et collectés. Cette impossibilité de mutualiser les infrastructures existantes renchérit le coût de traitement. De surcroît, elle rend parfois impossible ce traitement, faute de pouvoir atteindre la taille critique requise.
Aujourd’hui, un projet de décret relatif au compostage des boues et digestats de boues d’épuration, actuellement en consultation publique, va contraindre fortement (et sans doute de facto condamner) le compostage des boues en limitant la quantité de déchets verts utilisables en mélange pour fabriquer le compost.
En outre, la FNCCR et 18 autres associations (filières assainissement, déchets et énergie) ont déposé une motion contestant un projet de deuxième décret, portant lui sur les critères autorisant le retour au sol des matières fertilisantes, dont celles contenant des boues. Ces critères sont pour certains infondés, avec un calendrier d’application assurément irréaliste.
La FNCCR prône naturellement une bonne traçabilité des boues et la prise en compte de nouveaux polluants pour assurer leur innocuité, mais attend que les critères posés soient justifiés.
L’incinération ne doit pas être la seule issue
Si ces textes ne sont pas améliorés, les collectivités en charge de
l’assainissement n’auront pas d’autres solutions que de faire incinérer leurs
boues d’épuration, avec pour conséquences d’importantes émissions de CO2 pour
le transport de ces boues, leur séchage et leur incinération, ce qui posera des
problèmes d’acceptabilité de la part des riverains d’incinérateurs existants ou
à construire.
Cela entraînera également la perte d’un apport aux sols de matières
organiques et minérales à bas coûts, qu’il faudra remplacer par des engrais et
des amendements industriels, coûteux pour les agriculteurs et peu écologiques.
Le renchérissement induit pour les coûts de l’assainissement des eaux usées
(collectif ou non collectif), estimé par la FNCCR à plusieurs centaines de
millions d’euros, pèsera plus particulièrement sur les territoires ruraux et
leurs habitants.
Bien qu’elle puisse produire de la chaleur « renouvelable » essentiellement
utilisable en zone urbaine, l’incinération des boues d’épuration ne saurait
donc répondre à l’ensemble de ces enjeux environnementaux, économiques et
d’aménagement du territoire.
À l’heure de la décentralisation et de la décomplexification, la FNCCR
invite l’État à laisser les collectivités compétentes s’organiser pour gérer et
valoriser ces différents flux de boues, de biodéchets et de déchets verts, en
fonction des enjeux, des contraintes et des atouts de leurs territoires, plutôt
que d’imposer un modèle, uniformément, pour tout le territoire national.