Le 19 novembre 2024, à l’occasion du Salon des Maires, les représentants des six Agences de l’eau ont officiellement lancé leurs 12èmes programmes, lesquels entreront en vigueur le 1er janvier 2025 pour une durée de six ans.
Un montant inédit
La capacité totale d’aide annoncée dépasse les 13 milliards d’euros, un montant inédit permis par le relèvement, échelonné, du plafond des recettes des Agences de l'Eau. Rappelons que ces fonds proviennent exclusivement des redevances que perçoivent les Agences auprès de tous les usagers. Ils sont ensuite redistribués aux collectivités, industriels, agriculteurs, artisans ou associations pour co-financer des ouvrages ou actions. Outre le montant, inédit, le mode de calcul des redevances va quelque peu évoluer avec l’entrée en vigueur d’une réforme qui se veut plus « incitative ». Ainsi, deux redevances dites de performance seront-elles instituées, afin d’inciter les collectivités à améliorer la performance des réseaux d’eau potable et des systèmes d’assainissement. Par ailleurs, via le relèvement des taux plafonds et l’institution d’un taux plancher, les agences taxeront d’avantage les prélèvements.
Des défis communs
Ces aides doivent contribuer aux grandes orientations du Plan Eau, des SDAGE (Schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux) et des Plans d’adaptation des bassins au changement climatique. Sans surprise, sera donc présente dans chacun d’eux l’idée de répondre à des problématiques communes à tous les territoires.
Premier axe : restaurer le bon état des masses d’eau via la réduction des pollutions à la source. Il reste du chemin à parcourir puisqu’à ce jour seules 44% de ces masses sont en bon état en France, alors que l’Europe a fixé un objectif de 100% en 2027… Les Agences vont donc continuer à soutenir les exploitations agricoles (mise en œuvre de systèmes de production à bas niveaux d’intrants), les industriels (efforts de R&D pour connaître et réduire les émissions de macro et micropolluants) et les collectivités (amélioration de l’épuration des eaux usées et de la gestion des eaux pluviales). Au total, les six agences consacreront 1,2 milliard d’euros par an à la réduction des pollutions.
Autre grand axe : aller vers la sobriété hydrique. L’objectif est ici de réduire de 10% les prélèvements en eau d’ici 2030, conformément au cap fixé par le Plan eau. Les agences soutiendront ainsi les économies d’eau dans les secteurs industriel et agricole, la réduction des fuites des réseaux d’eau des collectivités et la réutilisation des eaux usées traitées.
Tout aussi important : garantir un approvisionnement en eau potable de qualité dans un contexte de raréfaction et de dégradation des ressources. Les agences soutiendront les collectivités dans leurs politiques de gestion durable des ressources (protection des captages en particulier) et des infrastructures de distribution.
Il s’agira également de préserver et restaurer les milieux humides et rivières, afin de les rendre plus résilients aux effets du changement climatique. Les agences soutiendront ainsi les actions visant à restaurer le fonctionnement naturel des milieux (suppression de seuils, élargissement du lit des rivières, …) et renforcer la connectivité entre eux. Elles s’intéresseront aussi à la préservation des fonctionnalités de sols. La restauration des milieux et de la connectivité aidera du même coup à limiter l’érosion de la biodiversité.
Une déclinaison propre à chaque territoire
S’ils répondent à des problématiques communes, chacun des six programmes les pondère évidemment en fonction des contraintes et problématiques propre à « son » bassin :
- L’Agence Seine-Normandie distribuera ainsi 3,7 milliards d’euros d’aides selon six orientations stratégiques : bon état des eaux ; sobriété ; préservation de la ressource pour sécuriser l’approvisionnement en eau potable ; transition agricole ; biodiversité ; solidarité entre les territoires.
- L’Agence Adour-Garonne, avec 2 milliards d’euros, favorisera le développement des politiques de l’eau dans les territoires ; l’équilibre entre ressource disponible, usages et besoin des milieux en recherchant la sobriété ; la préservation et la restauration des milieux aquatiques et leur biodiversité ; la protection de la qualité de l’eau.
- L’Agence Rhin-Meuse allouera 1 milliard d’euros selon cinq axes stratégiques : bon état des eaux à l’horizon 2027 ; sobriété ; préservation de la biodiversité ; solutions fondées sur la nature ; protection et reconquête des captages, une "ultra priorité".
- L’Agence Artois-Picardie dispensera 1,1 milliard d’euros d’aides, pour cinq enjeux : préserver et restaurer la fonctionnalité écologique des milieux aquatiques ; garantir une eau potable en quantité et qualité ; limiter les effets négatifs des inondations en s’appuyant sur la nature ; protéger le milieu littoral et marin ; mettre en cohérence les politiques publiques avec le domaine de l’eau ;
- L’Agence Rhône Méditerranée Corse distribuera 3,1 milliards d’euros d’aides, répondant à quatre enjeux : bon état des eaux ; adaptation au changement climatique ; reconquête de la biodiversité ; solidarité entre les territoires ;
- L’Agence Loire-Bretagne prévoit 2,1 milliards d’euros d’aides, pour deux priorités : l’atteinte du bon état des milieux aquatiques, la garantie d’accès à une eau potable et la solidarité entre les territoires.
À l’occasion du Salon, les présidents de comités de bassins se sont par ailleurs élevés contre l’éventuel prélèvement de 130 millions d’euros prévu par le projet de loi de finances pour 2025, rappelant qu'ils avaient « pris leurs responsabilités » en augmentant les redevances.