Après le vote quasi unanime du projet de loi Engagement et Proximité par le Sénat en octobre, les collectivités territoriales vont pouvoir aider les ménages démunis à payer leurs factures d’eau et d’assainissement.
Alors que
l’octroi d’une allocation eau aux plus démunis ou la création d’un tarif réduit
de l’eau leur était interdit jusqu’ici, le projet de loi adopté a éliminé cet
obstacle juridique et permettra la mise en place d’une plus grande solidarité dans
le secteur de l’eau au niveau de chaque collectivité. Les usagers de l’eau pourront
désormais contribuer tous ensemble à réduire les dépenses d’eau des ménages démunis
de leur collectivité. Auparavant, les aides étaient limitées à des interventions
a posteriori sur demande pour honorer partiellement des dettes d’eau impayées.
L’aide a priori fournie
dans le nouveau système pourra être forfaitaire ou dépendre de la consommation
d’eau (tarif). Elle aura la forme d’une allocation eau (ou chèque eau) ou d’un
tarif réduit si l’usager a un compteur individuel. Les bénéficiaires seront
déterminés par la collectivité compte tenu des ressources des ménages et de
leur taille. A cette fin, les collectivités pourront avoir accès aux données
individuelles détenues par les organismes sociaux ou d’aide au logement pour
identifier ces personnes selon leurs ressources et la taille du ménage.
Le financement
des aides de solidarité pour l’eau au profit des ménages démunis sera effectué
au niveau du service local d’eau et de l’assainissement et non au niveau départemental
ou national. Ces services supporteront l’incidence du tarif réduit pour les
ménages démunis mais pourront recevoir une aide financée par le budget de la
collectivité territoriale dans la limite de 2% des redevances HT d’eau et
d’assainissement (au lieu de 0,5%). Si la collectivité fait appel à un système
de chèques eau, elle en financera le coût. Chaque collectivité pourra abonder
le Fonds de solidarité pour l’eau (FSL) du département pour permettre à celui-ci
de verser des aides pour l’eau dans les collectivités les plus pauvres du
département.
Les
collectivités pourront désormais choisir les systèmes de tarification de leur
choix pour les consommations domestiques. Elles pourront instaurer ou non un
abonnement qui ne devra pas être trop important et ils pourront moduler le
montant de cet abonnement en fonction des revenus et de la taille du
ménage. Elles pourront même prévoir dans le cas des ménages démunis une
première tranche gratuite. La tarification sera proportionnelle ou progressive
en fonction de la consommation et pourra tenir compte des revenus du ménage et
de sa composition. En outre, le tarif de l’eau pourra être modulé selon la
saison.
Les
collectivités pourront également prévoir des tarifs différenciés, c’est à dire
des tarifs différents pour les abonnés domestiques et pour les autres abonnés. A
titre d’exemple, elles pourront augmenter le tarif des non-ménages pour éviter
que l’instauration d’un tarif social de l’eau ne cause une augmentation du prix
de l’eau de la plupart des usagers domestiques.
Comme le nombre
de bénéficiaires du tarif réduit ou du chèque eau devrait être assez faible dans
la plupart des collectivités et que l’aide sera probablement limitée à une
fraction du prix moyen de l’eau, il paraît probable que l’incidence de ce tarif
sera très faible, de l’ordre de 2% des factures moyennes d’eau au maximum.
La mise en œuvre
de la nouvelle disposition législative devrait contribuer à la lutte contre la
pauvreté sans créer de difficultés dans les collectivités. Toutefois, il faudra
s’assurer que le système de gestion et de contrôle des aides pour l’eau
n’alourdisse pas les frais de gestion de manière excessive. La mise en place d’une
liaison étroite entre le système des chèques eau et le système des chèques
énergie serait de nature à permettre une mutualisation des données individuelles
et une diminution des non-recours.
Au plan concret,
les collectivités pourraient examiner si des ménages de leur ressort sont
soumis à des dépenses d’eau élevées, voire inabordables. S’il en est ainsi, elles
pourront faire usage de la nouvelle loi pour aider les plus démunis à avoir accès
à l’eau à un prix abordable sans mettre en place des mécanismes coûteux. La
première étape consistera à identifier la classe des bénéficiaires des aides.