On en sait un peu plus sur ce que sera la future législation européenne sur les pesticides : une vingtaine de substances entrant dans la composition des herbicides, fongicides et insecticides seront interdites et les États membres devront à adopter des plans d'action encourageant une utilisation « raisonnée » des pesticides.
Les parlementaires européens sont enfin parvenus à un compromis avec le Conseil sur la future législation européenne. Largement approuvé par les eurodéputés le 13 janvier dernier, ce compromis porte sur deux textes : un règlement sur la production et l'autorisation des pesticides et la directive proprement dite relative à l'utilisation de ces produits.
Une vingtaine de substances chimiques interdites
Une liste de substances actives sera établie à l'échelle de l'Union. Les pesticides seront ensuite autorisés au niveau national sur la base de cette liste. Certaines substances hautement toxiques, notamment celles qui sont génotoxiques, carcinogènes, toxiques pour la reproduction ou perturbatrices du système endocrinien seront interdites si elles présentent un risque significatif. Cependant, le principe de précaution a ses limites !
Une substance « nécessaire pour combattre une menace sérieuse » pourra être approuvée durant 5 ans même si elle ne remplit pas les critères de sécurité?.
D?une façon générale, les produits contenant des substances dangereuses devront être remplacés si des alternatives plus sûres existent. Le délai pour le faire sera de trois ans.
Les États membres pourront autoriser des produits phytosanitaires au niveau national ou via la reconnaissance mutuelle. L'Union sera divisée en trois zones (nord, centre et sud), la reconnaissance mutuelle étant la règle dans chacune de ces zones. Les États membres pourront quand même interdire un produit sur leur territoire. Les délais d'autorisation des produits seront raccourcis et les États membres devront décider de la reconnaissance mutuelle dans un délai de 120 jours.
La nouvelle réglementation remplacera progressivement la législation européenne actuelle. Les pesticides mis sur le marché selon les règles en vigueur pourront continuer à être utilisés jusqu'à l'expiration de la validité de leur autorisation en cours. Il n'y aura donc pas de retrait soudain et massif de produits actuellement sur le marché.
Pour Hiltrud Breyer, rapporteur du Parlement sur ce règlement, « Cet accord est "gagnant-gagnant", non seulement pour l'environnement, la santé publique et la protection des consommateurs, mais aussi pour l'économie européenne, par le fait qu'il va susciter davantage d'innovation et placera l'Europe en position de leader dans ce domaine ».
Réduire les quantités de pesticides utilisées
L?accord intervenu entre le Parlement et le Conseil concerne également la directive sur l'utilisation des pesticides. Selon cet accord, les États membres devront adopter des Plans nationaux d'action avec des objectifs chiffrés, des mesures et des calendriers ainsi que des mesures destinées à promouvoir une gestion intégrée de la lutte contre les parasites et des méthodes alternatives. Ce calendrier et ces objectifs seront fixés sur la base d'indicateurs.
Les eurodéputés, soucieux de faciliter la conclusion d'un compromis avec le Conseil, ont cependant renoncé à demander un objectif de réduction de 50%.
La pulvérisation aérienne des cultures sera interdite mais des dérogations pourront être accordées. Les États membres devront veiller à ce que les mesures appropriées soient prises pour protéger l'environnement aquatique et les captages. Ces mesures incluront des zones tampons pour la protection des organismes aquatiques et des zones de protection des eaux de surface et des eaux souterraines utilisées pour l'approvisionnement en eau potable. Dans ces zones, il sera interdit d'utiliser ou de stocker des pesticides. Des zones protégées devront également être créées le long des routes et autoroutes.
Enfin, le Parlement et le Conseil se sont mis d'accord pour interdire l'utilisation de pesticides ou pour la maintenir à un niveau minimum dans des zones particulières telles que les parcs, les jardins publics, les terrains de sport, les cours de récréation, les enceintes scolaires et les terrains de jeux, ainsi qu'à proximité d'infrastructures de santé publique.
La directive devra être mise en ?uvre par les États membres au début de 2011. Pour Christa Klaß, rapporteur du Parlement pour cette directive, « cette directive est un pas en direction de la protection de l'environnement et des consommateurs européens. L'objectif est d'utiliser le moins possible de pesticides, et au bon moment et avec le bon dosage. La gestion du risque en est la clé, via la formation d'utilisateurs professionnels et l'information adéquate des utilisateurs privés. »
Les deux textes doivent encore adoptés formellement par le Conseil pour que cette nouvelle législation entre en vigueur. Critiquée par les industriels, elle satisfait globalement les écologistes. Les Verts saluent l'une des législations « les plus restrictives au monde » tandis que Greenpeace déplore le nombre trop restreint de produits concernés par l'interdiction.