Le rapport émanant du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et de l’inspection générale des finances (IGF) relatif aux opérateurs de l’eau et de la biodiversité, rendu public au mois de juillet dernier, dresse un état des lieux du cadre dans lequel sont conduites les politiques de l’eau et de la biodiversité. Il préconise un retour au fondamentaux et une priorisation des objectifs de manière à garantir une adéquation entre les missions et les moyens. Un recentrage progressif des interventions sur les actions en faveur du grand cycle de l’eau, du milieu marin et de la biodiversité et une évolution du système des redevances des agences figurent parmi les principales préconisations.
Le rapport constate en premier lieu que les politiques de
l’eau et de la biodiversité, bien que pilotées depuis 10 ans par une même
direction d’administration centrale, se sont construites par juxtaposition et
accumulation d’objectifs, sans se poser la question de l’adéquation des
missions et des moyens et sans vision globale. « Les contraintes
budgétaires sont ainsi devenues les véritables déterminants de ces
politiques » indiquent les rapporteurs. Au total, pas moins de 20
établissements publics (6 agences de l’eau, 10 établissements publics de parcs
nationaux, l’AFB, l’ONCFS, l’EPMP et le CELRL) sont chargés de la mise en œuvre
de la politique de l’eau et de la biodiversité, aux côtés des services déconcentrés
de l’Etat. Résultat, « Les politiques de l’eau et de la biodiversité, qui
ne sont que juxtaposées, forment un ensemble dépourvu de cohérence »
indique le document.
Le rapport procède ensuite à une analyse des financements et
des interventions des agences de l’eau.
A court terme, c’est à dire dans le cadre de la mise en œuvre des 11èmes
programmes d’intervention (2019-2024), il préconise de recentrer les
interventions des agences là où elles sont les plus efficaces. Ce qui doit conduire
à relever les seuils d’intervention, à accroître la sélectivité des aides et à
en arrêter certaines. Sont notamment visés l’assainissement non collectif et le
financement des stations d’épuration au titre de la seule mise en conformité
aux obligations réglementaires issues de la directive ERU. « Les aides à
l’assainissement non collectif auxquelles les agences de l’eau prévoient de
consacrer 140 M€ au XIe programme, pourraient être arrêtées, au regard de leur
faible efficience du point de vue des enjeux environnementaux » précise le
rapport.
A moyen terme, c’est à dire dans la perspective des 12èmes programme d’intervention, le rapport recommande
de recentrer fortement les interventions des agences sur les actions de
connaissance, de planification et de gouvernance, sur la solidarité
territoriale dans le petit cycle de l’eau et sur les interventions en faveur du
grand cycle, du milieu marin et de la biodiversité.
Les agences de l’eau, dont les aides financières relèvent
aujourd’hui de trois logiques (financement d’opérations d’intérêt commun au
bassin dans le grand cycle, financement de la solidarité urbain-rural dans le
petit cycle et rôle de mutuelle des services d’eau et d’assainissement),
cesseraient ainsi de faire office de « mutuelle » pour les services d’eau
potable et d’assainissement. Pour rendre ce recentrage plus acceptable et mieux
utiliser l’outil fiscal, une réforme du système des redevances est envisagée.
Elle reposerait sur trois volets.
Le premier concerne la rénovation de la redevance pour
pollution domestique à laquelle serait associé un abandon définitif des primes
épuratoires, dont l’efficacité n’est pas démontrée. Cette redevance, qui repose actuellement sur
la facture d’eau, reposerait sur la quantité de pollution rejetée. Ca ne serait
donc plus les consommateurs qui serait taxés mais les stations d’épuration ou
ceux qui rejettent une pollution, la
redevance étant fonction du niveau de pollution rejeté.
Le deuxième volet concerne la mise en place d’une redevance
assise sur les ventes d’engrais minéraux azotés et l’augmentation des taux de
la redevance pour pollutions diffuses agricoles, probablement à hauteur
d’environ 50 M€.
Le troisième volet touche à la diversification des
ressources des agences par la création d’une redevance de solidarité entre les
territoires urbains et ruraux et d’une redevance directement liée à la
biodiversité.
« Ce recentrage strict des interventions des agences de
l’eau au 12ème programme se justifie notamment, dans le principe, par le fait
que le financement du renouvellement des équipements, dans le petit cycle, a
vocation à être assuré, dans le cadre d’un service public industriel et
commercial, par le consommateur d’eau, via le prix de l’eau, et non pas au
travers d’interventions financières des agences » indique le document.
Le rapport se penche enfin sur une rationalisation
éventuelle de l’organisation et du fonctionnement des nombreux opérateurs de l’eau et de la
biodiversité. Cinq scenarios sont proposés, les rapporteurs précisant que la
mise en cohérence des politiques de l’eau et de la biodiversité en constitue un
préalable.
le rapport
« L’avenir des opérateurs de l’eau et de la biodiversité » est
accessible ici