Après plus de cinquante ans d’interdiction, la baignade dans la Marne sera de nouveau autorisée à Neuilly-sur-Marne à l’horizon 2026. Un projet rendu possible par les travaux massifs d’assainissement engagés en amont des Jeux olympiques de Paris 2024, et qui implique désormais un programme d’aménagements techniques structurant autour du port de plaisance.
L’annonce du maire de Neuilly-sur-Marne, Zartoshte Bakhtiari, le 22 mars 2025, marque un tournant pour l’ingénierie urbaine et hydraulique en Seine-Saint-Denis. À l’été 2026, une zone de baignade naturelle composée de trois bassins – dont un équivalent à une demi-piscine olympique – verra le jour sur un bras secondaire de la Marne, aujourd’hui non concerné par la navigation commerciale grâce au report du trafic sur le canal de Chelles. Mais pour que le site réponde aux exigences sanitaires et hydrauliques, plusieurs travaux structurants sont prévus, conditionnant la réouverture au public.
L’opération s’inscrit dans le prolongement du plan régional de reconquête de la qualité des eaux, initié dans le cadre des JO 2024, qui a mobilisé plus de 1,4 milliard d’euros depuis 2018. Ce programme a notamment permis de réduire significativement les rejets d’eaux usées et pluviales dans les milieux naturels grâce à la mise en conformité de plus de 1 000 branchements sur le bassin versant, à la construction de dispositifs de stockage-déversement et au déploiement de stations de traitement spécifiques.
À Neuilly-sur-Marne, les enjeux techniques sont doubles : garantir une qualité d’eau conforme à la baignade en eau libre, et sécuriser les usagers face au courant et aux risques physiques. Le projet prévoit l’aménagement de bassins grillagés à même la rivière, combinés à un brise-lames installé en amont pour dissiper l’énergie du courant et intercepter les objets flottants, tels que troncs ou débris. Cette configuration vise à maintenir la transparence hydraulique du site tout en assurant une protection passive des baigneurs.
Autre volet critique : la réhabilitation du port de plaisance, considéré comme vétuste. D’un montant estimé à 2,2 millions d’euros, les travaux comprennent la remise à niveau de l’alimentation électrique, l’aménagement d’équipements sanitaires publics et la mise en conformité de l’ensemble des installations en matière d’accessibilité PMR. Surtout, les bateaux actuellement à quai seront équipés de dispositifs de traitement et de stockage des eaux noires et grises, via des bornes de pompage, afin d’éliminer tout rejet dans le cours d’eau. Une mesure indispensable alors que le port héberge plusieurs bateaux-logements en résidence permanente.
À cette opération s’ajoute la création d’un ponton de baignade pour un coût complémentaire de 700 000 euros, conçu en matériaux résilients face aux contraintes hydromorphologiques locales. Ce ponton servira également d’accès sécurisé et de plateforme d’appui pour la surveillance en période d’ouverture.
Le projet “Les rives de Paris”, comme l’a baptisé la municipalité, s’inscrit dans la dynamique plus large du “plan baignade” francilien. Selon Stéphane Troussel, président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis, “la baignade en milieu naturel n’est pas uniquement un enjeu de cadre de vie et de loisirs, mais aussi de santé publique dans un contexte de réchauffement climatique”. Il ajoute : “Dans le département, c’est le site qui permet le plus rapidement et facilement d’ouvrir à la baignade. Mais nous voulons pousser d’autres projets dans les prochaines années, comme à L’Île-Saint-Denis par exemple.”
Au-delà de la seule opération nocéenne, la reconquête des berges urbaines à des fins récréatives impose une ingénierie transversale associant hydraulique, assainissement, gestion des sédiments, aménagement paysager et exploitation multisaisonnière. Elle pose aussi la question de la pérennisation des investissements publics via la montée en compétences des collectivités en matière de gestion des sites de baignade naturelle en zone dense.