L?environnement est un thème décidément à part dans le monde politique.
Définir une politique publique ambitieuse en la matière semble relever d'un exercice impossible tant les intérêts contradictoires sont nombreux.
Impossible d'aller contre l'intérêt de certains lobbies industriels, agricoles, etc'
Il ne faut pas non plus braquer les électeurs, ni même les inquiéter. Bref, tout le monde souhaite une politique de l'environnement mais tous s'y opposent dès lors qu'il faut la mettre en pratique.
Une majorité écrasante de Français souhaite en effet une politique environnementale plus affirmée, plus volontaire. Mais dès que des mesures fortes sont prises, des groupes de citoyens les contestent, parfois vivement, à l'image de la fronde des « bonnets rouges » vis-à-vis de l'écotaxe ou plus récemment encore de la circulation alternée en région parisienne.
Le secteur de l'eau n?échappe pas à cette schizophrénie collective.
Un exemple parmi cent autres. Le lancement l'an dernier du « projet agro-écologique pour la France » laissait entrevoir, enfin, une certaine « écologisation » des politiques publiques menées par le ministère de l'agriculture. Objectif affiché : « produire mieux avec moins d'intrants ». Une nécessité absolue compte tenu de l'impact environnemental mais aussi financier de l'agriculture sur la ressource en eau.
Un an après, qu'observe-t-on sur le terrain ?
En Bretagne, en proie aux problèmes que l'on sait du fait d'un excédent structurel d'azote, le cinquième programme d'actions de lutte contre la pollution des eaux par les nitrates d'origine agricole, récemment signé par le préfet de Région, constitue l'une des plus importantes régression environnementale enregistrée ces dernières années.
Ce programme entérine trois mesures dont les conséquences environnementales ne peuvent être que négatives : la suppression des interdictions d'extension des gros élevages dans les zones excédentaires de lisier, le relèvement du plafonnement des épandages par le passage de la référence de la surface agricole utile (SAU) à la surface épandable, et le relèvement du seuil de l'autorisation des élevages de porcs de 450 à 2.000 places. Tout ceci dans un silence sidéral, sous le seul prétexte qu'« il ne faut pas opposer agriculture et environnement » et alors même que la France, déjà condamnée en juin 2013 par la Cour de Justice de l'Union européenne, devrait l'être à nouveau dans les semaines à venir pour son application trop laxiste de la directive nitrates !
On l'aura compris : les critères qui ont conduit à l'adoption de ces mesures continuent, quoiqu'on en dise, à reposer exclusivement sur un modèle productiviste fondé sur le court, voire le très court terme. Ils ne prennent en compte ni les mutations économiques indispensables, ni le coût des subventions injectées, ni la dégradation des ressources naturelles, et encore moins les émissions de gaz à effet de serre.
Du coup, les doutes qui pèsent sur le bien-fondé de la levée du moratoire sur le financement par les agences de l'eau des retenues d'eau ou la simplification des zonages relatifs à la protection des aires de captage, deviennent plus légitimes'
De même, les mesures récemment adoptées dans le cadre du « choc de simplification » telles que la délivrance d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) ou encore la délivrance d'un certificat de projet qui doit permettre de simplifier les procédures applicables et de réduire les délais d'instruction se feront-elles réellement sans abaisser le niveau des exigences de protection de l'environnement ?
Il est permis d'en douter tant l'écart entre le « dire » et le « faire » est devenu important'