L’avenir climatique de la France, d'ici à 2050, est déjà écrit. Il correspond à un réchauffement de + 2°C et se traduira par une aggravation sensible des effets négatifs déjà observables : canicules plus fréquentes et plus fortes, hausse du niveau de la mer et des risques de submersion, modification du régime des précipitations, moindre enneigement, tensions accrues sur la ressource en eau, perturbation des activités économiques, notamment agricoles et touristiques, ou encore pressions sur la biodiversité. C’est ce que détaille un rapport de 190 pages de la Délégation à la prospective du Sénat qui dresse un état des lieux précis des bouleversements climatiques et de leurs impacts en formulant 18 propositions pour amplifier l'effort d'adaptation de la France face aux défis posés par le changement climatique.
Le niveau des températures moyennes a augmenté
partout en France depuis 30 ans. Les vagues de chaleur sont plus fréquentes et
plus fortes. Le climat de la région de Béziers et Montpellier est, par exemple,
devenu semi-aride. Des villes comme Toulouse ou Millau sont devenues
méditerranéennes. Aujourd'hui, la France est à 15 % méditerranéenne, à la
fin du siècle elle le sera à 50 %. Le niveau de la mer s'élève et avec lui
les risques de submersion. Le régime des précipitations évolue, les glaciers
fondent, la neige se fait moins abondante, notamment en moyenne montagne.
L'évapotranspiration s'accroît, accentuant les pressions sur les ressources
hydriques disponibles et menaçant aussi bien les activités économiques que la
biodiversité et les milieux aquatiques.
Ça, c’est le présent. Mais l'avenir est tout aussi sombre.
Le proche avenir climatique, d'ici à 2050, est
déjà écrit : que l'on parvienne à réduire les émissions ou qu'elles se
poursuivent au rythme actuel, nous devrons faire face en 2050 à une aggravation
significative des impacts du réchauffement climatique. Quels que soient l'évolution
des émissions, tous les effets négatifs déjà observables des changements
climatiques vont donc s'accentuer, qu'il s'agisse des risques naturels, des
problèmes de canicule, de sècheresse des sols ou des tensions sur les
ressources en eau. « Il faut donc se préparer à absorber ce choc
climatique inévitable », souligne le rapport.
D’autant que pour la seconde partie du siècle, dans
le scénario de plus en probable d'une poursuite des émissions au rythme actuel,
la France se trouvera dans une situation alarmante dès 2080, caractérisée
notamment par des vagues de chaleur extrême et des sècheresses d'une durée et
d'une intensité inconnues à ce jour en France.
Une mobilisation globalement insuffisante
Le rapport constate une mobilisation
globalement insuffisante de notre pays sur les enjeux d'adaptation aux dérèglements
climatiques. « La dynamique d'appropriation des enjeux d'adaptation
demeure embryonnaire pour la grande majorité des collectivités territoriales et
des filières économiques » indique-t-il. Il souligne la nécessité
d'envoyer sans tarder un signal politique fort sur le caractère prioritaire de
l'adaptation en suscitant un large débat sociétal pour permettre l'émergence
d'une culture commune et d'un consensus national sur les enjeux d'adaptation.
« Sans une vision partagée à l'échelle territoriale, on risque de voir se
développer des approches adaptatives strictement sectorielles, des jeux
d'acteurs non coopératifs, qui aboutiront à des transferts incontrôlés de
vulnérabilité climatique d'un acteur ou d'un secteur à l'autre notamment sur la
question de l'eau et des conflits d'usages que laisse présager la montée des
tensions sur les ressources hydriques.
Les rapporteurs préconisent l’ouverture de
plusieurs chantiers, dont l’un concerne l'adaptation des politiques de
l'eau. En examinant comment faire face à la raréfaction attendue des ressources
hydriques, ils soulignent qu'un point fait l'objet d'un large accord, à savoir
que les politiques de l'eau doivent désormais donner la priorité à des usages
plus économes de la ressource.
Des usages plus économes de la ressource
Pour les auteurs, le développement d’outils
permettant de construire une convergence entre besoins et ressources passe par
un encouragement des usages plus parcimonieux de l'eau, un partage de la
ressource entre les territoires riches en eau et ceux en situation de stress
hydrique. Comment ? Grâce à des
aménagements tels que des canaux, le développement de la recharge des nappes
par des solutions fondées sur la nature, ou le développement du stockage
hivernal en surface.
Sur les 5,6 milliards de m3 d'eau consommés
chaque année en France, 43 % le sont par l'agriculture, via l'irrigation,
42 % sont liés à la consommation en eau potable, 7 % sont consommés
par les activités industrielles et 8 % sont mobilisés par la production
d'électricité.
Pour être efficaces, les actions de réduction de la
consommation d'eau passent d’abord par une modification profonde des pratiques
culturales et une augmentation des performances en matière d'irrigation.
Pour l’eau potable, les économies passent par le
développement d’incitations financières adéquates, par exemple des mécanismes
de tarification progressive en fonction de la quantité d'eau consommée et
des tarifications différenciées en fonction de la nature des usages (avec un
coût moindre pour les usages classés prioritaires) ;
Le rapport insiste enfin sur la nécessité, pour les
agences, de conserver leurs capacités techniques. « L'État, qui affiche
comme priorité en matière de politique de l'eau un objectif d'économie de la
ressource, doit donc être cohérent dans ses choix budgétaires en veillant à
préserver les moyens des agences» indique-t-il.
Le rapport du sénat est accessible à
l’adresse : http://www.senat.fr/rap/r18-511/r18-511_mono.html#toc6