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Actualités France

Valorisation des boues : Ternois combine séchage solaire et récupération d'énergie

30 juillet 2007 Paru dans le N°303 ( mots)

Les collectivités disposent d'une large palette de procédés pour sécher leurs boues. Parmi ceux-ci, le séchage solaire, qui associe de bonnes performances à des coûts avantageux en investissement comme en fonctionnement. Mais en période hivernale, le faible ensoleillement associé aux basses températures et à un fort taux d'humidité ne favorisent pas l'évaporation des boues. Pour pallier cet inconvénient, Ternois propose un procédé qui combine séchage solaire et récupération d'énergies issues des procédés épuratoires. Explications.

Ternois conçoit, construit et exploite depuis près de 40 ans, des stations de traitement des eaux urbaines et industrielles. Cette société, devenue en quelques décennies le cinquième traiteur d'eau français et le premier qui soit totalement indépendant des grands groupes, emploie près de 100 personnes et prévoit de réaliser en 2007 un chiffre d'affaires supérieur à 40 millions d'euros. Initialement spécialisée dans le domaine du traitement des eaux industrielles, la société a peu à peu acquis une double compétence en se développant également dans le traitement des eaux usées urbaines. Le fait de regrouper au sein d'une seule et même structure l'ensemble des savoir-faire nécessaires à la construction et à l'exploitation d'une station d'épuration lui a permis d'acquérir une maitrise parfaite des techniques de traitement par boues activées, auxquelles sont venus s'adjoindre, au fil du temps, d'autres procédés tels que la méthanisation, les lits à macrophytes, les disques biologiques ou encore les biofiltres' Spécialisée dans la construction d'unités de petites tailles (de 10 à 15.000 E.H.) Ternois s'est peu à peu imposé sur le segment des unités plus importantes. C?est par exemple le cas de trois installations supérieures à 50.000 E.H. actuellement en cours de construction à Cournon d'Auvergne (63), à Sorgues (84) et à La Crau (83). A côté de ce savoir-faire reconnu en matière de constructeur, Ternois développe également des contrats d'affermage comme par exemple à l'Aigle, dans l'Orne, où après avoir construit la station, elle a gagné le contrat d'affermage sur une durée de 10 ans. De même à Livron-sur-Drome où Ternois a gagné le marché de la construction d'une station d'épuration équipée d'un sécheur solaire avant de remporter la délégation de service public des réseaux et de la station. Ternois a aussi développé des activités d'assistance technique proposées aux exploitants qui ne disposent pas toujours de toutes les expertises requises en interne. Cette assistance prend alors la forme de contrats de mise à disposition ponctuelle de personnels, par exemple pour réaliser l'entretien des équipements électromécaniques ou plus régulière s'il s'agit d'assister l'exploitant dans la conduite de ses installations. Ces formules d'assistance à la carte et d'aide à l'exploitation répondent bien aux attentes des exploitants puisqu'aujourd'hui, Ternois-Exploitation gère plus d'une centaine d'ouvrages tant pour les collectivités que pour les industriels : réseaux d'eau potable et d'assainissement, postes de relèvement ou de refoulement d'eaux usées, stations de traitement et d'épuration des eaux. Ternois a également beaucoup misé ces dernières années sur le développement en propre ou par le biais de partenariats de nouveaux procédés de traitement. La société a ainsi développé avec le britannique Brightwater un procédé de traitement basé sur la biofiltration qui pourrait constituer dans les prochaines années une alternative intéressante aux procédés actuels. Dans le domaine du traitement des boues, Ternois propose également une large palette de procédés allant de la digestion, en partenariat avec des sociétés allemandes qui ont développé des digesteurs compacts et performants, jusqu'aux outils de déshydratation. Et dans le domaine du séchage des boues, Ternois a développé, en partenariat avec Huber Technology, un procédé de séchage solaire qui répond bien aux besoins des collectivités qui souhaitent sécher leurs boues pour réduire les coûts. Sécher les boues pour réduire les coûts La crise que traverse la filière "boue" depuis quelques années est liée pour une bonne part aux volumes sans cesse plus importants engendrés par des taux de collecte des eaux usées toujours plus élevés, par l'efficacité croissante des stations d'épuration et enfin par le développement de nouveaux traitements comme la dénitrification et/ou la déphosphatation, rendus obligatoires pour de nombreuses agglomérations situées en zones sensibles. Avec en corollaire, et quelle que soit la filière d'élimination ou de valorisation choisie, la nécessité d'obtenir une siccité minimale des boues. Si bien qu'aujourd'hui, de nombreuses raisons conduisent les collectivités, quelle que soit la taille de leurs exploitations, à envisager de sécher leurs boues. La première d'entre-elles consiste à réduire la quantité de boues évacuées pour réduire les coûts. Olivier Bernat est Directeur général adjoint de Ternois. Il explique : « Une station d'épuration de 10.000 E.H. produit chaque année en sortie de centrifugeuse environ 1.100 tonnes de boues à 20% de siccité. Un séchage à 80% permet de réduire ce volume à 275 tonnes. Il est donc très simple de diviser par quatre la quantité de boues à évacuer. Conséquence directe, si l'évacuation est réalisée en agriculture, sur un coût moyen de 25 euros la tonne, l'exploitant économisera environ 20.000 euros par an sur le coût d'évacuation. S?il opte pour le compostage, il économisera 61.000 euros par an et si c'est l'option de l'incinération qui est choisie, ce sont quelque 123.000 euros par an qui seront économisés ! Ce sont donc des chiffres qui parlent' ». Sécher les boues à 70 ou 80% permet donc de réaliser de grosses économies tout en obtenant un produit stabilisé et quasiment hygiénisé et en préservant l'avenir par rapport à une éventuelle évolution des débouchés. Car si un jour la filière de valorisation agricole se referme, les autres voies ne resteront ouvertes qu'aux boues ayant atteint une certaine siccité. « Si l'exploitant décide d'aller en four de cimenteries, mieux vaut avoir une boue séchée à 80 % qu'à 20 % » souligne Olivier Bernat. Reste à trouver le mode de séchage le plus adapté à la taille de l'exploitation et à la nature des boues à sécher. En règle générale, le séchage thermique du fait de ses coûts fixes élevés tant en investissement qu'en fonctionnement, s'adresse plutôt aux stations de plus de 50.000 E.H.. Mais il existe pour les petites et moyennes collectivités, une solution utilisant des énergies renouvelables : le séchage solaire, basé sur l'évaporation de l'eau contenue dans les boues, provoquée par le rayonnement solaire utilisé comme source d'énergie thermique. Ce phénomène d'évaporation est optimisé par l'utilisation de ventilation naturelle ou forcée, ainsi que par le retournement des boues via un dispositif spécifique automatisé. « C?est un procédé simple et rustique qui demande néanmoins une attention particulière sur le dimensionnement des ouvrages et leur implantation », précise Olivier Bernat. Mais bien conçu et correctement conduit, le séchage solaire, parce qu'il est simple et économique tant en termes d'investissements qu'en termes d'exploitation peut devenir rapidement rentable pour des stations de petite et moyenne taille. Fort de ce constat, Ternois a développé avec Huber Technology un procédé de séchage solaire totalement automatisé. Un procédé de séchage solaire totalement automatisé « Le principe du séchage solaire repose sur trois facteurs, rappelle Olivier Bernat : l'augmentation de la température par effet de serre, le retournement mécanique des boues pour optimiser le contact entre la boue humide et l'air de séchage en évitant tout processus de fermentation et la désaturation de l'air de la serre grâce à une extraction mécanique ». C?est la parfaite combinaison de ces trois facteurs qui permettra un séchage satisfaisant. Pour y parvenir, Ternois et Huber ont conçu une unité de séchage solaire, en général accolée à l'atelier de déshydratation, constituée de trois zones : la première est dédiée à l'étalement des boues humides sous la forme d'une couche uniforme. La seconde zone est dévolue au séchage proprement dit tandis que la troisième zone, située à l'autre extrémité de la serre, permet un stockage en ligne des boues qui permettra, en fonction des contraintes liées aux plans d'épandage, de stocker les boues séchées et stabilisées sur 8, 10 ou 12 mois. Mais ce qui distingue le procédé Ternois-Huber d'autres procédés qui font souvent appel à un chargeur à l'entrée ou à la sortie de la serre pour étaler la boue, c'est qu'il est entièrement automatisé. « Nous avons souhaité proposer aux collectivités un procédé entièrement automatisé pour s'affranchir des conditions opératoires, réduire les coûts de main d'?uvre, économiser du temps d'exploitation, mais aussi pour conserver une parfaite maitrise du procédé ce que ne permet pas toujours la présence d'un chargeur en entrée de serre», explique Olivier Bernat. Concrètement, le procédé se caractérise par une automatisation de l'amenée des boues à l'entrée de la serre grâce à une vis de répartition qui part de la centrifugeuse et a pour fonction de répartir la boue sur toute la largeur de la serre. Cette vis de répartition circule sur des rails fixés sur des murets de béton de 1 mètre de hauteur bordant la serre. Quand la vis est pleine, elle s'avance de deux mètres et son auge s'ouvre pour déverser un andain de boue sur toute la largeur de la serre. Ensuite, c'est le pont de retournement qui va se charger de lisser cet andain sur une épaisseur de 20 cm environ, avant de commencer à le retourner. Ce pont, d'une largeur de 9 ou 11 mètres, circule sur les mêmes rails d'acier que la vis de répartition grâce à un système d'entrainement par chaine qui permet d'écarter tout risque de déraillement ou de patinage. « Le pont de retournement est au c'ur du procédé, précise Olivier Bernat. Sa fonction consiste à effectuer un vrai retournement et non pas simplement une simple scarification comme on le voit trop souvent sur d'autres procédés. Il permet d'obtenir rapidement une granulation de la boue sans aucune poussière. Pour favoriser le séchage et éviter tout phénomène de fermentation et donc d'odeur, le laps de temps entre deux retournements est au maximum de deux heures. Le pont lui-même à fait l'objet d'un soin particulier au niveau de la conception et de la fabrication. Entièrement réalisé en acier inoxydable passivé par trempage, il est équipé de quatre groupes de moteurs, « dont deux totalement dissociés permettent d'animer la mise en translation du pont et la rotation de l'auge ce qui permet de gérer la vitesse d'avancée de la boue toujours dans le but de conserver une parfaite maitrise du procédé », précise Olivier Bernat. Pour assurer l'extraction de l'air humide et participer ainsi à sa désaturation, de 4 à 6 ventilateurs par serre permettent d'extraire des volumes d'air allant de 30 à 60.000 m3/heure. De la même façon, de 6 à 8 ventilateurs répartis au sein de la serre assurent un brassage intérieur qui a pour fonction d'effectuer une déstratification évitant la formation de gradients en température et en hygrométrie et d'obtenir une atmosphère la plus homogène possible. Un dispositif de régulation assez pointu avec des mesures de températures intérieures et extérieures, des mesures d'hygrométrie, de pluviométrie, permet de contrôler le process en temps réel et le cas échéant d'en optimiser le déroulement. Quant au stockage des boues séchées, il se fait en ligne à l'extrémité de la serre. Il s'agit d'une fosse dans laquelle les boues arrivées en un peu moins d'un mois à une siccité proche de 80% sont poussées automatiquement par le pont. Pour déstocker ces boues, il suffira de faire intervenir un chargeur. Tout ceci permet d'obtenir un séchage satisfaisant des boues sur une période plus ou moins longue de l'année, en général fonction des conditions climatiques du lieu ou est située la serre. Mais il est possible d'obtenir le même résultat toute l'année en optimisant le processus avec un plancher chauffant Optimiser le processus avec un plancher chauffant Quelle que soit la région dans laquelle se situe le sécheur solaire traditionnel, il y a toujours un certain nombre de mois dans l'année durant lesquels les boues sèchent peu, voire pas du tout. En cause, la température insuffisante qui règne dans la serre pour enclencher le processus d'évaporation de l'eau. Durant ces périodes, certains se contentent de stocker les boues ce qui contribue parfois à l'apparition de nuisances olfactives. « Dans plusieurs régions, confirme Olivier Bernat, les sécheurs traditionnels solaires sans apport d'énergie complémentaire, sont dimensionnés non pas sur des paramètres de séchage, mais sur des paramètres de stockage ». L?apport d'un plancher chauffant permet de remédier à ce problème. Sa fonction est double. Il garantit un chauffage constant sur l'année quelles que soient les conditions climatiques et permet de diviser quasiment par deux les surfaces de serres nécessaires. « Avec un sécheur solaire traditionnel, la siccité atteinte avoisine les 60 à 65% même si, en période estivale, il est possible d'obtenir ponctuellement un peu plus, souligne Olivier Bernat. Le plancher chauffant nous permet de garantir 80% de siccité en moyenne annuelle, en complétant pendant les périodes ou c'est nécessaire, et uniquement pendant ces périodes là, l'énergie solaire ». Le procédé est d'autant plus intéressant qu'il n?obère que faiblement le bilan énergétique de la serre. Car le plancher chauffant est alimenté par une pompe à chaleur qui va récupérer les calories sur l'eau de sortie de la station d'épuration en l'abaissant de quelques degrés. « De 2 à 3°, ce qui est en général plutôt bénéfique pour le milieu récepteur » précise Olivier Bernat. L?eau à 45° circule dans les serpentins coulés dans le radier de la serre et contribue ainsi durant l'hiver à permettre la poursuite du processus de séchage sans dépense énergétique supplémentaire. En Allemagne, deux installations de ce type fonctionnent depuis plusieurs années sans le moindre problème. En France, deux installations de 8.000 et de 12.000 E.H. fonctionnent également de façon satisfaisante à St Maurice de Beynost (01), et à Barbezieux (16) et 13 autres installations sont en cours de construction. A Laval, sur une station de 150.000 E.H. qui doit être portée prochainement à 250.000 E.H., Ternois est en train de construire un sécheur solaire qui traitera quelque 850 tonnes de matières sèches par an ! Sur cette installation, le plancher chauffant sera alimenté non pas par une pompe à chaleur mais par une chaudière brulant le biogaz produits par les digesteurs présents sur le site? Fort de ces premiers succès, Ternois multiplie les études sur des stations de grandes tailles de 50 à 120.000 EH. « Nous tablons clairement sur un développement du séchage solaire sur des stations de 80 voire 100 ou 120.000 EH. » explique Olivier Bernat, sachant que ce procédé est éminemment modulaire : il est parfaitement possible de coupler le solaire avec d'autres procédés et, en cas de succès, de procéder ensuite par extensions successives ». Mais le procédé ne se limite pas à des installations de moyennes ou grandes tailles. Ternois compte ainsi commercialiser prochainement un sécheur moins large (6 mètres) susceptible de rendre compétitives des petites unités à partir de 3.000 EH.