Les techniques de potabilisation à travers les siècles ne sauraient se détacher des progrès de l’hydraulique, depuis l’antiquité jusqu’à l’époque moderne. A l’aube de l’époque contemporaine, avec la révolution industrielle (vapeur, puis électricité), et le grand mouvement hygiéniste pasteurien concomitant, suivent les avancées en termes de traitement physico-chimique et microbiologique de l’eau. La fin du XXème siècle s’accompagne d’une accélération des transferts de technologies (par exemple membranaires), et le début du XXIème siècle adapte les traitements aux contraintes environnementales, ainsi qu’aux réglementations sanitaires plus drastiques (cf. progrès analytiques, études épidémiologiques…). L’évolution des technologies de traitement d’eau suit donc la frise chronologique, et s’attache à l’histoire des civilisations - tant sur le plan sociétal qu’économique, accélérée par la mise en place progressive de l’eau courante (celle-ci étant de fait très récente, à partir de la fin des années 1800).
DESINFECTION
Plus anecdotique, Bacon, dans son ouvrage natural history en 1625, recommande la désinfection de l’eau de boisson avec des petites quantités d’acide sulfurique (vitriol) pour éviter qu’elle se «putréfie». Certaines techniques de désinfection ont ainsi été appliquées empiriquement pendant plusieurs siècles. Cependant, leur mécanisme n’est connu que depuis seulement cent cinquante ans environ. Vers 1680, Anthony van Leeuwenhoek développa le microscope. Sa découverte des microorganismes était considérée avec intérêt.
Déjà, il observait l’action des acides sur les animalcules ; en recouvrant ceux-ci de vinaigre, il constata que ceux-ci – d’habitude mobiles comme de petites anguilles - cessent de bouger. Il a ensuite fallu près de deux cents ans aux scientifiques avant d’utiliser le microscope (Figure 11B) pour distinguer les microorganismes des autres pathogènes ; entre les deux, vers 1776, Spalanzini démontre que la génération spontanée de microorganismes était impossible après que le liquide fut porté à ébullition durant une heure.Lors du XVIIème siècle., les hommes ont été touchés par de graves maladies tels que le choléra et la peste (Figure 11). L’origine de celles-ci était mal interprétée. On pensait que ces maladies étaient une punition divine ou étaient causée par l’air impur ou par l’alignement des planètes. Les découvertes de Snow, médecin britannique à Londres (Figure 12), si elles furent vigoureusement contestées par la communauté scientifique lorsqu’il les présenta, viendront renforcer l’attention portée à l’alimentation en eau.
C’est lui en effet qui met en évidence la transmission du choléra par l’eau contaminée à la suite de l’épidémie de Londres en 1854, et non par l’air vicié. Grace à son étude épidémiologique il a démontré que les malades étaient tous allés chercher l’eau à une même fontaine contaminée; cette analyse factuelle encourage la dynamique engagée par les villes pour s’approvisionner en eau ailleurs que dans leurs puits.
La révolution scientifique du XIXème siècle va accélérer la prise de conscience de la nécessité de traiter l’eau; la théorie aérienne des miasmes cède la place à la théorie aqueuse microbienne; aux travaux de Snow succèdent ceux de R. Koch, K.J. Eberth, puis L. Pasteur (Figure 13) qui en seront les figures majeures ; la corrélation est faite scientifiquement entre les microbes et les pathologies («nous buvons 90% de nos maladies», Pasteur 1851). Louis Pasteur, fer de lance de l’hygiénisme, alimente ce mouvement en prônant la propreté, notamment le lavage des mains. Il énonce aussi que l’eau peut charrier des maladies sans qu’on ne le voie ni qu’on ne le sente, et qu’elle peut nécessiter des traitements pour les éliminer. S’intéressant à la vie des microorganismes, il pose la base des premiers traitements en mettant en évidence l’intérêt des filtres, notamment la bougie en porcelaine - développé par le biologiste Chamberland (Figure 14). Au dix-neuvième siècle, l’effet des désinfectants tel que le chlore fut découvert. Aussi, depuis 1900, les désinfectants sont énormément utilisés par les compagnies de production d’eau potable pour empêcher la propagation de maladies et pour améliorer la qualité de l’eau. Mais revenons en France à Paris, à la fin du XVIIIème siècle sous Louis XVI. Le comte d’Artois finance la construction à Javel d’une manufacture qui va exploiter l’invention d’un chimiste venu d’Annecy.
Nom commercial du produit: l’«eau de Javel». Claude-Louis Berthollet (Figure 15) peut-il se douter, en ce jour de 1785, qu’il vient de faire une découverte promise à un bel avenir ? En présentant le 21 décembre de cette année-là, devant ses collègues de l’Académie royale des sciences, son «Mémoire sur l’acide marin déphlogistiqué» (le chlore dénommé alors “esprit de sel déphlogistiqué”), le savant achève de mettre en lumière le pouvoir décolorant de ce gaz verdâtre découvert une quinzaine d’années plus tôt par le chimiste suédois Scheele, identifiant au passage l’hypochlorite de sodium. Derrière ce nom, un produit qui allait bientôt devenir célèbre dans le monde entier pour ses propriétés hygiéniques: «l’eau de Javel». En fait, le procédé fut d’abord appelé le «berthollage» et les solutions chlorées décolorantes «lessives de Berthollet». La découverte de l’eau de Javel se situe au carrefour des études de laboratoire et de la recherche appliquée aux «arts industriels». Une démarche bien dans l’esprit du siècle des Lumières dont Claude-Louis Berthollet est un pur produit; l’homme fut médecin avant d’être chimiste, et la science, voilà sa seule passion.
A sa mort en 1822, «l’eau de Javel», qu’Alban et Vallet avait commencé de produire à la fin du XVIIIème siècle dans leur manufacture, est utilisée non seulement pour le blanchiment des textiles mais aussi, de plus en plus, pour la purification de l’eau. Le produit a mis un certain temps à s’imposer dans le public. Ses propriétés dans le domaine de l’hygiène allaient lui ouvrir une nouvelle carrière en attendant sa diffusion sous forme de bidon individuel, dans les années 1870, puis la création des premières marques une décennie plus tard - notamment La Parisienne. Par la suite, dès le début du XXème siècle, les procédés industriels de traitement à l’eau chlorée ou à l’eau de Javel se développent (Figures 16). Parmi les 1ers écrits sur le sujet, l’utilisation de dérivés du chlore est attestée dans le Kent (1897) suite à une épidémie de typhoïde, puis les premières installations connues en Belgique (Ostende 1903), en Grande Bretagne (Lincoln 1904), aux USA (Chicago 1908)… Retour en début de XIXème siècle. En 1820, le pharmacien Antoine-Germain Labarraque (1777-1850) remplaça la potasse par la soude et étudia les utilisations médicales et pharmaceutiques de l’Eau de Javel. Il inventa le “Chlorure d’oxyde de soude et de chaux”, variété d’Eau de Javel qui permit, entre autres choses, d’arrêter le processus de putréfaction des muqueuses. Il fit ainsi un grand pas dans le domaine de l’hygiène.
La “liqueur de Labarraque” fut utilisée par les chirurgiens, les médecins, certaines usines, les égoutiers, les fossoyeurs… Elle fut largement distribuée lors d’une épidémie de choléra, en 1832. Il employa l’hypochlorite de sodium pour arrêter les gangrènes, accélérer les cicatrisations, désinfecter les hôpitaux… En 1845, Semmelweis, docteur en obstétrique à Vienne, fit tomber la mortalité par fièvre puerpérale de 27% à 0,2% grâce à l’utilisation des hypochlorites par les médecins pour le lavage des mains avant d’accoucher les femmes. En 1892, Calmette découvrit que le bacille de Koch (tuberculose) était détruit par l’Eau de Javel. Les applications de l’Eau de Javel en désinfection se sont développées sous l’influence de plusieurs collaborateurs de Pasteur, notamment Chamberland et Fernbach.
La technique de purification de l’eau à l’aide de chlore gazeux liquéfié comprimé semble avoir été mise au point en 1903 par V.B. Nesfield - officier britannique du service médical en Inde (Figure 17). Pendant «la grande guerre», lors de la bataille de Verdun, l’Armée française, encerclée, ne disposait plus d’eau potable. Le Colonel Bunau-Varilla, directeur du service des eaux de l’armée, mélangea un petit stock d’Eau de Javel à l’eau de la Meuse pour alimenter les troupes en eau potable (d’où l’expression «verdunisation» synonyme de potabilisation à l’Eau de Javel). Grâce à son spectre microbien le plus large connu à ce jour, la chloration (chlore gazeux, bioxyde de chlore, hypochlorite de sodium) est utilisée pour lutter contre la propagation des maladies: fièvre typhoïde, choléra, hépatite virale,…
La désinfection doit faire l’objet d’une attention particulière toutefois, car les eaux de surface contiennent une grande quantité de coliformes (E.coli), virus et protozoaires. L’utilisation de chlore doit donc être étudiée avec soin, du fait qu’il réagit avec la matière organique pour former des sous-produits, tels que les tri-halométhanes ; son utilisation est donc reportée dès la 2nde moitié du XXème siècle. en fin de traitement et la pré-chloration abandonnée. La découverte de l’ozone est quant à elle mentionnée dans des écrits de C.F. Schönbein qui remontent à 1840. Cette découverte fut présentée à l’Université de Munich. Durant ses expériences, celui-ci avait noté ces caractéristiques olfactives. Il appela ce gaz «ozone», qui dérive de ozein; le mot Grec pour l’odeur. En 1891, l’allemand Ohlmuller découvrit les vertus bactéricides de l’ozone pour mieux traiter l’eau. En produisant l’ozone à travers l’électricité, on pouvait détruire dans de fortes proportions microbes et matières organiques contenues dans l’eau. Le premier générateur d’ozone fut fabriqué à Berlin par B.Von Siemens. Ce dernier a également écrit un livre sur l’application de l’ozone dans l’eau, ce qui a entrainé nombre de projets pilotes dans lequel le mécanisme de désinfection par l’ozone fut analysé.
En 1896, outre Atlantique, N. Tesla déposa un brevet de fabrication de générateur d’ozone à usage médical. La première échelle technique d’application de l’ozone pris place à Oudshoorn, Pays-Bas, en 1893. Cette installation d’ozone fut énormément étudiée par des scientifiques français, et une autre unité fut installée à Nice («site de beau voyage» en 1906). En quelques année l’eau de Nice «est alors considérée comme la plus saine de France». Le chimiste Français Marius Paul Otto (Figure 18) fut le premier à créer une entreprise spécialisée dans la fabrication de l’ozone; la Cie Eaux et Ozone (CEO). Dans les années précédant la Première Guerre Mondiale, il y eu une augmentation sensible de l’utilisation de l’ozone dans divers pays. Vers 1916, 49 installations d’ozone furent utilisées à travers l’Europe (26 d’entre elles étaient localisées en France). En 1977, ce nombre avait atteint 1043 installations d’ozone (la moitié des installations localisées en France). L’évolution des matériels glissa de générateurs à plaques vers des générateurs à tubes (Figure 18B). Cependant, cet élan s’essouffla par la suite. Ce fut la conséquence de l’utilisation massive du chlore; une alternative fiable à l’ozone sur le même spectre d’utilisation, pas de limite liée au faible rendement de génération d’ozone, coût d’installation beaucoup moins élevé (absence de traitement de l’air et des évents, d’achat et de maintenance des générateurs, diffuseurs…).
En fin de XXème siècle, l’emploi de l’ozone a recommencé à augmenter ; notamment suite à la découverte en 1973 des trihalométhanes (THM) comme sous-produits indésirables de la désinfection au chlore. De même, son intérêt réapparaît dans l’élimination des micropolluants organiques; ces composés semblaient être oxydés par l’ozone plus rapidement qu’avec les composés chlorés. Avantage tempéré toutefois par la génération de sous-produit, les bromates, qui limitent le taux de traitement. De plus, l’ozone permet aussi de désactiver des microorganismes développant des résistances aux désinfectants, tels que certains parasites unicellulaires pathogènes. De nouvelles technologies physiques ont fait l’objet de développement dans la seconde moitié du XXème siècle; citons l’utilisation des rayonnements Ultraviolet (U.V) notamment pour la désinfection des microorganismes enkystés tels Giardia et Cryptosporidia difficilement atteignables par les désinfectants chimiques classiques.
La diffusion et généralisation de l’utilisation des tables EPA de C*T (Concentration*Time) a ainsi permis de mieux définir les conditions de traitement optimales en fonction de la nature des microorganismes et des désinfectants utilisés (correction faite si besoin notamment de la température et du pH, comme facteurs intrinsèques présents lors de l’application). Pour la désinfection UV, cette formule est alors remplacée par D*T (Dose*Temps). Par ailleurs, les techniques fines de clarification s’étant fort développées, une désinfection «mécanique» voit le jour en parallèle. L’utilisation des membranes avec les traitements d’Ultrafiltration (UF) et de Nanofiltration (NF) permet alors respectivement l’abattement des bactéries et des virus. Seule une désinfection avec un léger résiduel de chlore dans le réseau de distribution reste préconisée pour garantir la qualité sanitaire dans les conduites de transport jusqu’aux branchements des particuliers.
CLARIFICATION
L’eau y subit une chute, est déviée et repart vers le réseau de distribution: le sable contenu dans l’eau tombe au fond du bassin et il suffit de l’enlever périodiquement (Figure 19). Grâce à des vannes, on pouvait maîtriser la hauteur de l’eau dans le bassin et le vidanger. Celui de Pompéi est un petit bâtiment aux façades aveugles. L’intérieur est une salle circulaire à coupole où arrive l’aqueduc. L’eau franchissait une grille en entrant dans le bassin de décantation; une seconde grille traversait le bassin en son milieu. A sa sortie, après un troisième filtre, l’eau s’écoulait dans trois conduits branchés dans le mur de façade sur trois tuyaux de plomb, qui constituaient les trois rameaux principaux de la distribution urbaine.
Du moyen âge à la renaissance, c’est le système d’acheminement à domicile par porteur d’eau qui domine presqu’exclusivement. Parallèlement, les eaux usées et déchets sont rejetés directement dans les rues et cours d’eau; ainsi les sources d’eau potable se trouvent contaminées par les écoulements et infiltrations. Le premier filtre multiple fut développé en 1685 par le physicien Italien Lu Antonio Porzo. Le filtre était composé d’une unité de décantation et d’une unité de filtration au sable. En 1746, le scientifique français Joseph Amy reçu le premier brevet pour la conception d’un filtre utilisé par les ménages vers 1750. Le filtre était composé de laines, d’éponges et de charbon de bois. Tout au long du XVIIIème siècle, ces filtres se répandent au sein des foyers.
A la même époque, les riches propriétaires recourent à des grandes cuves en bois brulé pour conserver l’eau dans de meilleurs conditions. Avançons au XIXème siècle., avec la loi physique de Darcy qui exprime le débit d’un fluide incompressible filtrant au travers d’un milieu poreux. La circulation de ce fluide entre deux points est déterminée par la conductivité hydraulique (ou coefficient de perméabilité du substrat) et par le gradient de pression du fluide. Cette loi a été établie en 1856 par Henry Darcy (Figure 20), après qu’il eut réalisé diverses expérimentations visant à déterminer les lois régissant l’écoulement de l’eau à travers le sable. Les bases expérimentales de Darcy ont ensuite pu être confirmées comme correspondantes à un écoulement de Stokes en milieu poreux (en hydrogéologie et notamment dans le domaine de l’hydraulique souterraine).
Appliquée à la filtration d’eau potable, la forme ronde (sables de rivières roulés) améliore la qualité du traitement et les grains de sable s’imbriquent mieux les uns sur les autres que les grains anguleux (sable de carrière broyé), ce qui diminue les espaces entre grains et donc améliore l’effet de tamisage. La taille effective (TE) et le coefficient d’uniformité (CU) sont les caractéristiques granulométriques les plus importants caractérisant un média filtrant. Plus la taille effective est faible, meilleures sera la qualité de l’eau filtrée, mais le colmatage sera rapide. De même, si l’homogénéité des tailles n’est pas respectée, les grains les plus gros se trouvent au fond du filtre et les plus fins en surface lors du lavage; l’encrassement de surface entraînera un cycle de filtration plus court.
A la fin du XIXème siècle, en accompagnement du vaste mouvement hygiéniste, il faut, pour combattre la pollution, repenser les filières de traitement de l’eau potable, en construisant notamment des usines «modernes ». C’est l’utilisation des plus récentes méthodes de filtration du moment. D’abord, la filtration dite lente (Figure 21) inventé en 1832 par l’Anglais Simpson - ingénieur à la Chelsea Waterwork Company - en 1829; ce filtre était en premier lieu constitué de lits successifs de briques, de gravier et de sable en vrac pour éliminer les solides de l’eau, et en partie sa couleur due à la turbidité. Dès lors la filtration fut rendu obligatoire à Londres pour le traitement de l’eau de la Tamise. En filtration lente, l’épuration résulte d’un processus mécanique (rétention des matières minérales, organiques et organismes vivants), et d’un processus biologique d’élimination compétitive (biomasse complexe en surface avec augmentation importante des bactéries saprophytes au dépend des bactéries potentiellement pathogènes).
Par ailleurs, la présence d’oxygène dissous facilite l’oxydation de l’ammoniaque, et le développement d’algues et zooplancton contribue à diminuer les nitrates, phosphates et gaz carbonique. Le plus souvent cette étape se compose de filtres dégrossisseurs, de préfiltres puis de filtres «finisseurs » ; les premiers débarrassant l’eau des plus grosses impuretés afin d’éviter l’encrassement trop rapide et mise hors service des derniers. Le nettoyage de la masse filtrante encrassée est réalisé initialement sur place manuellement (personnels « racleurs, rouleurs, chargeurs » - Figure 22); le sable est brouetté hors du bassin et repris dans des wagonnets – lesquels sont vidés sur l’aire de lavage (décroutage, nettoyage, rinçage dans des installations de lavage de sable, avant remise en place dans les ouvragesFigure 22bis).
Ces opérations ont été progressivement simplifiées par la mise en œuvre de sélecteurs automatiques permettant leurs automatisations, avec un nettoyage par courant ascendant dans le bassin filtrant. Pour faire face à une demande croissante en eau potable, à la filtration lente a succédé en milieu de XXème S. la filtration rapide (passant de vitesses de filtration de qqs m/j à qqs m/h) – avec des ouvrages réduits de1/10 à 1/20ème.
Ceux-ci étaient pilotés par des régulateurs automatiques (Figure 23) et leurs variantes perfectionnées par des appareils «polhydra» (Figure 23bis) régulant la charge au-dessus du média en fonction de la perte de charge. Cette technologie associe plusieurs étapes ; d’abord coagulation-floculation, puis décantation, puis filtration. Les contraintes foncières ont aussi joué un rôle dans le passage de la filtration lente à rapide, car les techniques et ouvrages requièrent beaucoup de surface en zones de plus en plus urbanisées. C’est le système par coagulation, qui historiquement vers 1882, avec l’introduction dans l’eau d’un réactif chimique à base de sels de fer, permet d’agglomérer (coaguler) les dépôts les plus fins (procédé dit Anderson) avant l’étape de floculation (agglomération des flocs par agitation lente). Les coagulants ont de leur côté évolués avec l’utilisation de produits de plus en plus performants ; aux sels de fer puis d’aluminium ont succédés des polychlorures.
Puis le dopage avec des additifs de floculation; initialement amidon, alginates et carraghénates naturels…, de nos jours remplacés par des agents anioniques et cationiques de synthèse. La loi de Georges Stokes (Figure 24), donne la force de traînée hydrodynamique s’exerçant sur une sphère en déplacement dans un fluide. Elle est utilisée pour déterminer: la viscosité des liquides, la granulométrie de particules en suspension, mais aussi pour stabiliser physico-chimiquement les colloïdes (suspension). Dans notre cas, cette loi est utilisée pour séparer des particules d’un fluide par décantation ou flottation. La décantation en tête de filière –dont l’objectif est d’abattre les matières en suspension (turbidité) – mais aussi de la matière organique colloïdale, permet de dégrossir et «protéger» la phase suivante de filtration.
Elle a vu ses performances (vitesse au miroir de Hazen) évoluer au fil du temps (Figure 25) notamment courant de la 2nde moitié du XXème siècle en réduisant la surface au sol des ouvrages ; décanteurs couloir (Figure 26) à flux horizontal (mono puis multiple étage), puis décanteurs à lit de boues (pulsé ou non), puis décanteurs lamellaires, et enfin décanteurs à flocs lestés. Enfin, notons avec les transferts de technologies matures (industries chimiques et alimentaires) la percée des techniques membranaires – avec le plus souvent une vocation de multi-barrières. Au-delà de la clarification, ce sont la capacité de désinfection, la suppression de la matière organique, et aussi la rétention de solutés dissous (dont la réduction de la dureté de l’eau, carbonate de calcium), et l’élimination de micropolluants (pesticides…) qui valorisent cette technologie.
À suivre en partie 3