Produits chimiques, alcools, huiles, solvants, hydrocarbures… Quelles que soient leurs activités, les sites industriels stockent et manipulent des liquides dont ils doivent prévenir le déversement accidentel dans l’environnement. Revue des solutions de rétention à leur disposition.
Les solutions de rétention disponibles sur le marché sont nombreuses. Elles s’adaptent à une grande diversité de besoins à tous les stades de leur activité qu’ils soient fabricants de produits chimiques, centrales nucléaires, usines de cosmétiques, producteurs de conserves, distilleries, aires de dépotage, zones portuaires… etc.
Le plus souvent, c’est le choix des modèles qui diffère, en fonction de la nature et du volume de liquide en jeu, de sa dangerosité ainsi que de la configuration du site sur lequel il est manipulé.
Bacs et planchers de rétention : la première des précautions
Autre paramètre à considérer : la quantité de produit stocké. Le bac ne sera pas dimensionné de la même façon pour porter trois cuves de 1.000 litres que pour un fût de 220 litres. D’autant que le volume de rétention, c’est-à-dire le volume de liquide que peut récupérer le bac en cas de fuite, doit être conforme à la réglementation (cf. encadré).
Le design peut lui aussi être déterminant. Certains modèles permettent un stockage des fûts à l’horizontale ou la mise en place d’une rehausse, pour faciliter le soutirage des cuves. La présence de roulettes ou de pieds adaptés aux transpalettes contribue à la sécurisation des déplacements. Par ailleurs, « l’indicateur de fuite que nous venons d’ajouter à certains de nos bacs permet de réagir plus rapidement en cas d’écoulement », ajoute Sonja Kartausch, responsable marketing chez DENIOS.
Autre solution, les bacs de rétention souples, qui sont simples, rapides à monter et ne prennent pas de place une fois pliés. « Les bacs souples sont une solution adaptée pour des usages occasionnels ou bien pour des utilisations fixes dans la durée, souligne Pascal David, Gérant de Difope. Ces bacs sont conçus pour être placés sous les racks accueillant des produits à risque ».
Leur usage est également recommandé dans les zones de remplissage ou de dépotage de produits sur sites industriels (les bacs répondent aux contraintes réglementaires). Ils peuvent aussi être utilisés pour stocker du matériel ou comme aire de lavage à part entière. « Chez Difope, nous fabriquons nous-même nos bacs et sommes capables de proposer plus d’une trentaine de références standard comme des solutions sur-mesure sans limites de taille. Les contenances peuvent aller de 50 à 80.000 litres » précise Pascal David.
Il existe également des cuves double peau ou double enveloppe qui sont un moyen efficace de protéger les réservoirs, cuves ou autre contenant de tout déversement accidentel. Proposées par Cadiou Chaudronnerie plastique ou CTP Environnement, ces solutions double peau sont faciles à mettre en œuvre et permettent une rétention totale du fluide. Ces cuves peuvent être installées sur une simple dalle béton, sans dispositif de protection supplémentaire.
Du côté des armoires et conteneurs de rétention qui servent au stockage de plusieurs dizaines, voire centaines de fûts, diverses options de sécurité sont proposées : ventilation, isolation thermique, stockage hors gel… Dernière innovation en date : « des conteneurs entièrement validés coupe-feu 120 minutes avec une certification par un organisme agréé, comme l’explique Sonja Kartausch. Cela permet d’envisager leur installation au plus près des chaînes de production, sans distance de sécurité ». Le statut de fabricant d’entreprises telles que Delahaye Industries, Haleco, Labaronne Citaf ou Ocène leur permet également de développer des solutions sur mesure concernant le stockage d’huiles, d’hydrocarbures, de solvants ou de produits inflammables. Il peut par exemple s’agir de planchers de rétention couvrant toute la surface d’une pièce par exemple, de pièces souples ou rigides adaptées à une configuration particulière ou de modules conçus pour le stockage ou l’utilisation de produits particuliers. Ainsi, et pour satisfaire aux obligations des sites soumis à déclaration et contrôle périodique sous la rubrique 4710 “chlore emploi et stockage” de la réglementation des ICPE (à partir de 3 bouteilles de 49 kg), Eurochlore a développé des solutions de stockage clé en main. Ces solutions vont de l’armoire de sécurité chlore pour le stockage et l’utilisation de 4 à 6 bouteilles jusqu’au module de stockage chlore qui prend la forme d’un local technique aux fins de stockage ou d’utilisation pouvant aller jusqu’à 10 bouteilles de 49 kg. Incombustibles, ces modules sont constitués de panneaux de fibre de verre et recouverts d’un traitement résistant aux intempéries et aux fuites éventuelles de produits. L’aménagement intérieur est conçu pour garantir un niveau de sécurité adapté au produit.
De son côté, Cadiou a mis au point, en collaboration avec un groupe utilisant des produits chimiques, la D-Tect Box, une armoire de dépotage en toute sécurité. « Cette armoire a permis à cette usine qui était menacée de déménagement par les autorités de maintenir son activité sur le même site », souligne Pierre Oger, gérant de Cadiou Chaudronnerie plastique. Son fonctionnement repose sur la vérification de compatibilité chimique entre le produit déjà stocké dans la cuve et le produit que l’on veut mettre dans cette même cuve lors du dépotage d’un camion. Le dépotage de produits chimiques comportant certains risques, cet outil assure la sécurité de l’opérateur, s’inscrit dans la prévention des risques chimiques pour les établissements classés Seveso, dans le respect et la protection de l’environnement et d’un point de vue financier, évite la perte d’exploitation ».
Les fibres absorbantes : en préventif comme en curatif
Comme les bacs de rétention, chaque type d’absorbants correspond à un type de liquide : produits chimiques, hydrocarbures, solvants, huiles, etc. « Pour améliorer leur résistance au peluchage ou à l’usure, on peut y ajouter des films de renfort, précise Carole Bossis, responsable marketing chez Delahaye Industries. Il est aussi possible de mettre un film étanche sur leur surface inférieure pour une meilleure protection des sols ».
Comme toujours, le choix du type de fibres dépend de l’application envisagée. Par exemple, pour protéger le sol des gouttes qui pourraient tomber d’une machine en réparation, des feuilles absorbantes suffisent. Les rouleaux permettent de réagir rapidement en cas de fuites plus importantes, tandis que les tapis servent à protéger durablement des zones de manipulation ou de transit. Les coussins, beaucoup plus épais, sont utiles pour éponger de grands volumes de liquides. Quant aux boudins et barrages, ils permettent de confiner un écoulement nettement plus important.
Les obturateurs de canalisation : mettre en rétention tout ou partie du site
C’est la qu’interviennent les obturateurs de canalisations dans leur version fixe proposés par Pronal, Satujo, Musthane ou encore Norham. Installés à demeure dans les canalisations, ils sont placés en partie supérieure pour ne pas perturber le flux et reliés à une armoire de commande en surface. Il suffit d’appuyer sur le bouton de cette armoire pour les gonfler et ainsi obturer une canalisation. TeleStop® de Satujo, permet ainsi, en cas de rejets accidentels, la mise en rétention d’un site par l’obturation rapide de ses canalisations, empêchant ainsi toute dispersion, par le réseau d’eaux pluviales, des effluents pollués. Le système repose sur trois éléments : un obturateur à poste fixe en canalisation, un terminal de gonflage et un système de déclenchement.
« Pour plus de réactivité encore, le déclenchement de nos obturateurs TeleStop® peut être automatisé, en lien avec l’alarme incendie ou des capteurs de détection de polluants, explique Cyrille Crouzette, responsable commercial chez Satujo. Nous proposons également en exclusivité une option qui permet d’activer notre dispositif TeleStop® depuis un téléphone portable. Autre système spécifique aux obturateurs TeleStop® : une double sécurité contre le risque de dégonflage accidentel ». L’entreprise développe par ailleurs une application mobile qui permettra de surveiller l’état du dispositif à tout moment depuis son smartphone ou sa tablette (niveau de charge de la batterie, etc.).
Chez Musthane, « les obturateurs Muststop® Securit ont la particularité de pouvoir se dégonfler et se remettre en place après utilisation, sans que personne n’ait besoin de descendre dans la canalisation », souligne Albine Mast, superviseur commercial dans cette entreprise.
Utilisés dans toutes les industries, ils peuvent être fabriqués sur mesure pour des canalisations circulaires ou ovoïdes, d’un diamètre 150 mm à 2.500 mm.
Les barrières de protection : en version manuelle ou automatique
Il en existe de toutes sortes, pour répondre à tous les budgets et configurations. La barrière la plus simple est manuelle. Accrochée à un mur, il faut la déplacer en cas d’urgence, pour la glisser dans des rails posés de chaque côté de la porte, et la verrouiller en position. Comme elle est en aluminium, elle est légère, mais s’il y a beaucoup d’ouvertures à sécuriser rapidement en peu temps, et une seule personne disponible pour le faire, cela peut devenir compliqué… Mieux vaut réserver ce modèle aux ouvertures très éloignées du risque incendie. Les barrières pivotantes, qui se ferment comme un passage à niveau, ou les barrières de type guillotine sont plus pratiques, surtout si leur déclenchement est automatique.
« C’est en se déplaçant in situ, en prenant les mesures des portes, en échangeant avec les équipes et en discutant des risques avec les pompiers que l’on est en mesure de définir l’option la plus appropriée », indique Philippe Lutz, dirigeant de Coprin, avant de préciser que ses barrières sont certifiées par l’organisme allemand TÜV.
Drains et caniveaux recueillent les eaux de ruissellement
Parmi les points à étudier avec soin, leur imperméabilité bien sûr, mais aussi leur capacité de drainage et leur résistance à certaines contraintes locales : passages de poids lourds, risques de fuites de liquides corrosifs, fréquence des périodes de gel et de salage, etc. ACO, Birco, Funke, Mea ou Hauraton proposent des solutions à grilles, à fentes, en béton, béton polymère, acier, résine, inox… capables de retenir efficacement les eaux de ruissellement même sur les surfaces à contraintes extrêmes.
Autre élément à prendre en considération : la facilité d’installation. En effet, « si la norme impose que les lignes de caniveaux soient étanches au moins 30 minutes en cas de saturation de l’ouvrage, des études montrent que, même avec du matériel de qualité, ce n’est pas toujours le cas : certains installateurs ne prennent pas le temps de mettre des joints entre les caniveaux, constate Thomas Gaudebert, chef de marchés marketing chez ACO. C’est pourquoi nous avons lancé fin 2016 une nouvelle gamme, ACO Multiline Seal In, dont les caniveaux intègrent un joint à leur extrémité. Quand on les emboîte, on est sûr que l’étanchéité est garantie, et ce pendant au moins 72 heures ! ».
Solutions ultimes, les bassins de retenue
C’est par exemple le cas des SAUL de Nidaplast ou encore des Rausikko box SC développés par Rehau qui peuvent être associés à des solutions de traitement des particules solides par sédimentation (Sediclean). De même, l’ensemble HydroMaxx est un dispositif de traitement bien adapté aux aires industrielles ou aux parkings par exemple. Il résulte de l’association d’un module de sédimentation SediClean permettant de séparer les particules solides telles que le sable, les poussières de freinage et les résidus de pneus avec une unité d’adsorption et de filtration HydroClean AF pour séparer les particules fines, les huiles minérales légères ainsi que les substances polluantes dissoutes telles que le plomb, le cuivre et le zinc.
Attention cependant à ne pas assimiler un bassin SAUL à une solution de rétention des polluants. « Les bassins SAUL ne constituent pas une solution destinée au recueil des eaux d’assainissement ou encore d’extinction d’incendie, souligne-t-on chez Rehau. Ils sont destinés au stockage temporaire des eaux pluviales uniquement. Ainsi, il est essentiel de garantir leurs caractéristiques de tenue mécanique et leur fonctionnement à long terme. Pour cela, il faut protéger les bassins SAUL, et par le fait le milieu récepteur, en installant en amont de ces bassins des dispositifs de traitement des eaux pluviales adaptés à la nature du polluant : les séparateurs à hydrocarbures, par exemple, doivent être placés avant le bassin de stockage ».
Chez Birco, les chambres souterraines voûtées StormTech® permettent non seulement de récupérer les eaux pluviales, mais aussi de les prétraiter. Elles sont composées de plusieurs tunnels. Le premier, celui qui capte le flot, est équipé d’un géotextile qui retient les matières en suspension et les polluants. Les autres tunnels se remplissent ensuite grâce à un système de surverse. Les eaux pluviales peuvent ainsi être stockées temporairement, le temps de laisser les matières en suspension sédimenter, avant d’être traitées localement ou évacuées de façon régulée dans le réseau d’eaux usées.