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Mesure du Redox : quand, pourquoi, comment ?

30 mars 2020 Paru dans le N°430 à la page 55 ( mots)
Rédigé par : Antoine BONVOISIN

Le Redox, ou potentiel d’oxydoréduction, est aujourd’hui mesuré principalement pour des applications sur les eaux usées, ou en complément d’autres mesures sur l’eau potable. Son faible coût, l’un de ses principaux avantages, en fait un indicateur encore largement employé dans différents domaines.

Le potentiel rédox (ou potentiel d’oxydo-réduction, ORP en anglais) est une mesure qui indique le degré auquel une substance peut oxyder ou réduire une autre substance. Le Redox indique donc le pouvoir oxydant ou réducteur d’une substance par rapport à une autre. Le caractère “oxydant” ou “réducteur” est relatif à une réaction chimique. Plus une solution aura un pouvoir oxydant important, plus le Redox augmente ; et inversement pour son pouvoir réducteur.
TMR, spécialisée dans les techniques de mesure, la régulation et le dosage, met en œuvre des capteurs Redox principalement pour le contrôle de la qualité des eaux du secteur tertiaire, dans les hôpitaux et les cliniques notamment.

Ce type de mesure peut également permettre d’évaluer le pouvoir désinfectant d’une solution, qui influence le temps de vie des bactéries : un oxydant puissant comme l’ozone ou le peroxyde d’hydrogène, casse le cytoplasme des bactéries, et réduit donc leur temps de survie dans l’eau. Certains réseaux d’eau qui n’utilisent pas la mesure de chlore, par exemple, peuvent recourir à une mesure Redox en contrôle pour obtenir un indice de la capacité de croissance ou de réduction de la microbiologie.

Par ailleurs, dans le secteur de l’eau potable, certaines agences de l’eau, ou certains exploitants, définissent la potabilité de l’eau en fonction d’une valeur de Redox, même si cela n’est pas requis au plan réglementaire. La mesure est également fréquemment utilisée en station d’épuration, couplée à une mesure de l’oxygène dissous, pour réguler l’aération des bassins. Une autre application fréquente du redox en eaux usées est la désodorisation. On a affaire ici à des solutions de lavage avec des concentrations élevées de réactifs.

Mesure Redox : des applications très diverses

Bürkert France propose la mesure de Redox par exemple pour des applications en tours aéroréfrigérantes (TAR). Ces tours sont omniprésentes dans de nombreux secteurs industriels, lorsqu’un refroidissement est requis au cours ou en fin de process. On recourt alors à la mesure Redox, car les produits chimiques utilisés inhibent les sondes de chlore ; on préfèrera donc opter pour le Redox, qui permet d’évaluer le taux de désinfectant présent dans le circuit. « Le Redox est principalement utilisé pour mesurer la présence et l’absence des oxydants, donc principalement le chlore, ou l’ozone dans certains cas », explique Olivier Bertrand, Responsable de marché Eau chez Bürkert. « On utilise le Redox dans les tours aéroréfrigérantes, ou pour mesurer l’absence de chlore dans des eaux ultrapures, en industries agroalimentaires, pharmaceutiques, ou dans les secteurs de l’énergie ou de la micro-électronique. Le chlore pose des problèmes dans certains process de fabrication, c’est la raison pour laquelle il est parfois important de mesurer sa présence ou son absence ».
Le Type 8905 de Bürkert est un système compact et modulaire de surveillance de tous les paramètres importants de l’eau, dont le redox, sur une seule plate-forme.

L’inconvénient de la mesure Redox est qu’elle ne permet pas de connaître la valeur absolue de la teneur en chlore ou d’autres éléments recherchés car certains paramètres caractéristiques de la solution analysée peuvent influencer sa valeur. Le potentiel peut dépendre du contexte chimique et notamment du pH et des autres éléments dissous, mais aussi du contexte physique comme, par exemple, la lumière qui influence l’activité microbiologique via la photosynthèse.

« Si dans une eau on mélange du chlore et de l’ozone, on ne peut pas évaluer la quantité relative des deux éléments. L’intérêt du Redox est que l’on utilise une sonde dont la mesure est indépendante de la température. C’est une très bonne image des pouvoirs oxydants, et cela permet de mettre en place des processus régulés de traitement. C’est une solution souvent peu onéreuse, alors que les sondes de mesure du chlore et de l’ozone sont plus chères et nécessitent des chambres de mesures contraignantes à mettre en place » poursuit Olivier Bertrand.
On touche là à certains avantages de la mesure Redox, sa fiabilité, la simplicité de sa mise en place, et le peu d’entretien du matériel qu’elle nécessite. Cette mesure se fait directement en ligne, contrairement à d’autres mesures.
Bürkert France propose aussi le Redox pour une double vérification en complément des mesures de chlore. Également dans les piscines qui utilisent le plus souvent des sondes au chlore, mais qui parfois, pour des raisons de budget, installent des appareils de mesure du potentiel d’oxydoréduction.

Respecter des règles très précises

TMR, spécialisée dans les techniques de mesure, la régulation et le dosage, met en œuvre des capteurs Redox principalement pour le contrôle de la qualité des eaux du secteur tertiaire, dans les hôpitaux et les cliniques notamment. Ces mesures permettent par exemple de prévenir le développement de légionelles. La société propose ainsi des capteurs Redox pour les tours aéroréfrigérantes, où l’utilisation du Redox est très fréquente, cependant en compétition avec les mesures ampérométriques qui ouvrent des perspectives intéressantes dans un champ d’application plus large que par le passé. « Nous vendons plus de capteurs Redox que de capteurs pH dans ces secteurs » explique François Charrier, président de TMR. Le Redox est simple à mettre en œuvre et économique, mais il y a des limites au niveau de son exploitation, il faut respecter des règles physico-chimiques : la valeur du pH et la conductivité de l’eau doivent être relativement stables si l’on veut que la relation entre la mesure Redox et la concentration de l’oxydant reste stable et exploitable. « Dans le cas contraire, l’interprétation du signal devient délicate, voire instable. De plus, les lois qui régissent les phénomènes d’oxydo-réduction, résultant de l’ensemble des réactions des couples oxydo-réducteurs, sont de type Nernstien donc basées sur des relations non linéaires, de type logarithmique, entre les concentrations des oxydants et des réducteurs par rapport au signal délivré en mV (comparable aux signaux délivrés en pH-métrie). Comme alternative à cela, les mesures ampérométriques des oxydants résiduels (chlores, bromes, ozone, acide peracétique, peroxyde d’hydrogène, dioxyde de chlore), réalisées avec des capteurs très spécifiques délivrent des signaux directement exprimés en concentrations (mg/l) facilement exploitables. Des progrès considérables ont été apportés avec ces nouveaux capteurs qui connaissent depuis 3 ans un développement très rapide ».

Une mesure peu onéreuse

Une mesure Redox est, globalement, deux fois moins onéreuse qu’une mesure ampérométrique, cette dernière étant également moins chère qu’une mesure colorimétrique, elle-même étant plus coûteuse en service et réactifs et beaucoup moins sélective qu’une mesure ampérométrique. Autre atout du Redox, la mesure de type potentiométrique, qui nécessite des électroniques simples. Outre le coût, un autre avantage du Redox est sa capacité d’implantation : certains capteurs employés supportent des températures et des pressions élevées.
Les électrodes et les capteurs sont les parties mesurantes d’une détermination rédox. Les sondes de Yokogawa proposent plusieurs possibilités de montage : rétractable, en immersion, à débit transversal et en insertion.

« Que cette mesure soit parfois décriée peut s’expliquer soit par une mauvaise connaissance de cette technique de mesure, soit par la présence sur le marché de capteurs Redox aux qualités parfois douteuses » poursuit François Charrier. Les qualités du capteur et de l’électronique sont essentielles pour la fiabilité de la mesure. En effet, la concentration dans le milieu analysé est telle qu’une éventuelle dérive de la mesure par les potentiels parasites (charges statiques, vitesse des fluides en ligne…) peut générer des potentiels en mV supérieurs aux potentiels délivrés par une forte variation de la concentration en oxydants. « La recherche d’économie porte parfois sur la surface de matière noble (platine ou or) tellement réduite que les échanges moléculaires deviennent instables et, ou, que l’élément de référence (Ag/AgCl) est très vite pollué par les ions en présence dans l’eau à analyser ».

TMR dispose d’une large gamme pour proposer la bonne adéquation entre les matériels et les applications, où le rôle du fournisseur est de transmettre toute l’information au client pour lui indiquer les limites de telle ou telle technologie, et c’est en toute connaissance de cause que le client choisit la technologie la mieux adaptée.
« En dehors des tours aéroréfrigérantes et du traitement des eaux des circuits tertiaires, nous employons la mesure Redox dans plusieurs domaines », complète François Charrier. Notamment pour les BTS (barrières techniques de sécurité) en dépotage des camions de réactifs concentrés, en neutralisation des bassins de collecte des rejets oxydants ou réducteurs, en désinfection des eaux de piscine, en traitements des eaux usées en décyanurisation, déchromatation, et parfois en traitement des eaux usées en dénitrification dans les phases anoxies et aérobies.

Des électrode combinées pH Redox

Yokogawa France fournit le matériel nécessaire pour réaliser différentes mesures chimiques. L’entreprise travaille ainsi dans de nombreux secteurs dont ceux de la chimie, de la pétrochimie, de l’agroalimentaire et du traitement des eaux. « Avec le Redox, on ne quantifie pas d’élément en particulier, mais plutôt un ensemble d’éléments qui font le pouvoir oxydoréducteur d’une solution, et cette mesure ne répond pas à toutes les applications. Il faut faire attention : le Redox ne permet pas de connaître la concentration d’un produit dans une solution, car plusieurs entités interviennent, elle donne un indice sur la présence ou non d’un produit » précise Frédéric Connan, chef de produit analyse.
Vue des transmetteurs Memorail de Knick souvent utilisés en traitement d’eau car plus faciles à installer et moins chers.

« Nous proposons généralement des électrodes combinées, qui mesurent le Redox, le pH et la température. Dans un équilibre chimique, le pH peut perturber la mesure de Redox, c’est donc l’intérêt de proposer des sondes de ce type, poursuit Frédéric Connan. Ce qui nous distingue des autres fournisseurs, c’est que nous proposons toujours les trois mesures. Nous avons plusieurs types de sondes, selon si la mesure doit être faite en ligne, ou non. On adapte les sondes aux conditions de pression et de température ».

Knick France propose des sondes permettant de mesurer le Redox, ou des électrodes combinées permettant de mesurer à la fois le Redox et le pH. « La plupart des clients préfèrent remplacer la mesure d’oxygène dissous par celle du Redox, témoigne Samuel Samouelian, Regional Sales Director. Le Redox est essentiellement utilisé dans les process de traitement des eaux, pour mesurer les niveaux d’oxydation des eaux usées, ou, dans le cas des eaux ultrapures, pour évaluer les résidus de chlore ou d’autres éléments, pour vérifier si ces eaux sont exemptes de toute trace de pollution ».
EFS (Etude Fabrication Service) maîtrise également la mesure du Redox et l'intègre dans sa sonde Multi-Probe+, une solution multi-paramètres de mesure physico-chimiques en insertion au cœur des conduites des réseaux d’eaux potables ou de process. Véritable produit IoT sans fil et autonome en énergie, la sonde peut transférer à distance directement sur serveur ftp toutes les données mesurées localement telles que le Redox, la turbidité, la conductivité, le pH, le débit, la pression, la température et la vitesse d’écoulement.
Si le Redox est utilisé à titre informatif, il n’est jamais employé pour piloter des process. « Le pH est par exemple beaucoup plus utilisé pour piloter des opérations » poursuit Samuel Samouelian. « Pour nous, le Redox représente 10 % des ventes de matériel et d’électrodes sur le marché du pH, ce qui est donc peu important. Ce n’est pas un moteur marketing et stratégique pour une entreprise comme la nôtre. Cette mesure est importante pour des cas précis, pour certaines phases de production, qui représentent une faible part du marché ».
La Smartpat ORP 1590 de Krohne est une sonde de Redox 2 fils alimentée par la boucle courant, conçue pour les applications eau et eaux usées. La sonde est équipée d’une électrode en platine, d’une membrane céramique et d’une sonde de température.

De nombreux fabricants développent des électrodes combinées parmi lesquels Mettler Toledo Analyse Industrielle qui intègre trois mesures dans ses sondes : température, pH et redox. C’est aussi le cas de Endress+Hauser qui ne propose pas moins de 8 capteurs pH-redox avec des membranes en verre et des diaphragmes de différentes natures selon les eaux à mesurer asociés à la transmission du signal digitale Memosens, ou encore Hach, Chauvin-Arnoux, Datalink Instruments, Rittmeyer, Cometec, Hanna Instruments, Lutz-Jesco, ou Xylem Analytics, Acta mesures. Beaucoup d’entre-eux ont développé des solutions digitales pour réduire les coûts d’exploitation de la mesure.

Une sonde rédox est classiquement constituée d’un anneau de platine, qui doit être associé à une électrode de référence pour constituer un capteur complet. Or, cette électrode de référence, généralement constituée d’un fil de chlorure d’argent, est le talon d’Achille des électrodes de rédox (et de pH), puisque sa durée de vie excède rarement un an. Pour pérenniser le système, Hach propose des capteurs de rédox ou de pH intégrant une deuxième électrode de mesure, immergée dans une solution tampon en remplacement des électrodes de référence au chlorure d’argent. On obtient ainsi des capteurs différentiels ayant une durée de vie de 3 à 5 ans.
Ces capteurs, qui ne sont plus des éléments consommables intègrent un convertisseur analogique/numérique et permettent en outre de réduire la sensibilité du signal des électrodes classiques aux interférences ou à l’humidité.
Canne d’immersion UNIDIP de Swan équipée d’une sonde Redox, une sonde de température et une sonde de pH.

La sonde SensoLyt® 700 IQ (SW) de Xylem présente une armature pH/Redox numérique avec préamplificateur intégré et sonde de température, ainsi qu’une protection contre la foudre à connecter à l’IQ Sensor Net. En stockant les valeurs de calibration dans la sonde, on peut produire une mesure de pH pré calibrée. Grâce au verrouillage rapide de la sonde, elle s’enlève facilement du lieu d’utilisation et se rebranche sur site aisément après la calibration en laboratoire.

Aquacontrol de son côté associe à sa pompe doseuse électromagnétique digitale la mesure débit proportionnel avec régulation pH/Redox.
Le fabricant tourangeaux SDEC propose quant-à-lui deux sondes multi paramètres Aqua Troll 500 et Aqua Troll 600 qui disposent de 4 emplacements permettant de personnaliser les capteurs en fonction des besoins et de suivre ponctuellement ou en continu les 8 paramètres physico-chimiques standards dans l’eau.
Le capteur combiné pH/potentiel d'oxydo-réduction des sondes multiparamètres AquaTROLL 500 et 600 est composé d'une électrode pH en verre, d'une électrode de référence avec électrolyte liquide composé de KCl saturée en AgCl et d'une électrode platine pour la mesure du potentiel d'oxydo-réduction.
La dérive du capteur pH est de 0,1 en 60 jours en eau douce (100 jours en eau de mer), il est donc recommandé d'étalonner le capteur tous les 2 à 3 mois ce qui est unique pour une sonde multiparamètres de terrain sur le marché.

Utiliser la mesure à bon escient

Krohne promeut la mesure Redox dans les domaines des eaux usées, essentiellement sur des filières biologiques pour estimer au mieux l’alimentation des bactéries en oxygène. Cette mesure est même parfois privilégiée par rapport à la teneur en oxygène. « Dans les stations d’épuration, on cherche à savoir si les bactéries ont assez d’oxygène, et on utilise donc le redox pour suivre ces phénomènes » précise Damien Jacquier, Energy, Water and Environment division manager. « Le choix de la mesure Redox ou de la mesure de la teneur en oxygène est déterminé au cas-par-cas. En règle générale, les exploitants savent quelles technologies ils préfèrent employer ».
Tête de sonde à insertion Multi-Probe+ avec mesure Redox.

Krohne travaille principalement avec des stations d’épuration, des exploitants aussi bien privés que publics, et dans le domaine de l’agroalimentaire, où les industriels ont parfois des stations implantées directement dans leurs locaux.

Mais pour Guillaume Schneider, Sales Manager chez Swan, la mesure Redox n’est pas forcément utilisée toujours correctement. « Il y a beaucoup d’abus, estime-t-il. Son avantage est d’être peu coûteuse, mais lorsque ce paramètre est utilisé pour faire des corrélations (notamment au chlore libre) c’est dangereux, il faut donc veiller à l’utiliser convenablement ». Comme chez Knick France, le Redox ne représente qu’une part de marché assez faible chez Swan : sur 1.200 à 1.300 analyseurs vendus par an, seulement 5 concernent le Redox. Si le Redox reste donc encore largement employé dans certains secteurs, certains fabricants ou fournisseurs se désintéressent de cette mesure pour se concentrer sur d’autres marchés, parfois plus rentables. 
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