Créée en 1999 par Philippe Bertin, TMW a développé une technologie d’évapo-concentration brevetée, adaptée au traitement des effluents industriels. Après 10 années de recherche & développement, TMW est entrée, en 2012, en phase de commercialisation active. Basée à Paris (Direction Commerciale) et dans le Maine-et-Loire (Siège et production), la société emploie actuellement 18 salariés et compte déjà une vingtaine de clients équipés de sa technologie (70 % des contrats location et 30% en ventes). Pour appliquer sa technologie à des volumes plus importants, l’entreprise vient de présenter l’Ecostill 18000. Rencontre avec Thierry Satgé, Directeur général de TMW.
Revue L’Eau, L’Industrie, Les Nuisances : Qu’est-ce
qui fait la spécificité du procédé Ecostill ?
Thierry Satgé : Ecostill est un évapo-concentrateur de
nouvelle génération, de conception simple et robuste, capable de réduire
jusqu’à un facteur 10 le volume de déchets industriels liquides. A la
différence des solutions d’évaporation basées sur une pompe à chaleur (PAC) ou
sur la compression mécanique de vapeur (CMV) qui fonctionnent avec des systèmes
parfois complexes de recirculation dans des composants sensibles à la
corrosion, Ecostill fonctionne à pression atmosphérique et température
ambiantes. Basée sur la technologie brevetée MHD (multi humidification
déshumidification), Ecostill met en œuvre des composants en plastique
insensibles à la corrosion. Chaque module fonctionne de façon autonome et
comporte une colonne d'évaporation, une colonne de condensation, un simple
ventilateur permettant la circulation de l'air, et un dispositif de
surchauffage de l'effluent à traiter. Il suffit de raccorder l'unité à une
source de chaleur, une alimentation d'effluent et à une évacuation de
l'effluent concentré et de l'eau pure produite, pour disposer d'une solution
prête à fonctionner.
Revue E.I.N. : Quels sont les avantages de ce procédé
par rapport aux autres procédés d’évapo-concentration ?
T.S. : Ils sont nombreux et reposent sur la
technologie MHD qui permet un fonctionnement à pression atmosphérique et basse
température. L’utilisation de composants 100 % plastique, permet par exemple de
traiter tous types d’effluents, quelle que soit leur agressivité, leur acidité
ou leur toxicité sans rééquilibrage de Ph. La modularité du procédé présente
par ailleurs le double avantage de permettre une évolution de la capacité de
l’installation en fonction des besoins du client et une fiabilité plus
importante : si un module tombe en panne, les autres continuent à
fonctionner. La maintenance est également considérablement réduite, du fait de
l’absence de composants critiques tels que les compresseurs, pompes à vide,
membranes …. Enfin, le principe de l’évaporation à pression atmosphérique et
basse température qui repose sur le principe du cycle naturel de l’eau est
économe en énergie. Il n’impose par ailleurs aucune contrainte de pH en entrée
et produit un distillat à seulement 30-35°qui ne nécessite pas la mise en œuvre
d’un groupe froid.
T.S. : L’évaporation est un phénomène physique, par
nature énergivore, d’où l’idée de développer un système de récupération
d’énergie interne permettant d’en récupérer 80 %. C’est ainsi que la
technologie MHD s’est d’emblée positionnée comme l’une des technologies
d’évapo-concentration les moins énergivores : quand les solutions basées
sur une CMV ou une PAC se situent entre 80 et 220 kWh/m3, nous nous situons, en
version de base, autour de 150 à 160 kWh/m3.
En
dépit de ses bons résultats, nous nous sommes attachés à optimiser toute la
chaine énergétique et à récupérer toutes les calories dispersées, tant sur
l’air que sur l’effluent : nous avons beaucoup travaillé sur la boucle d’air,
nous avons développé un nouvel échangeur thermique en plastique, et tout a été
optimisé pour minimiser la consommation d’énergie avec pour objectif de devenir
le procédé le moins disant en termes de consommation énergétique, c’est-à-dire
de se situer en dessous de 70 kWh/m3.
T.S. : L’objectif est à portée de main. Le nouveau
système de récupération d’énergie sur la boucle d’air nous a permis de diviser
par trois la consommation d’énergie. Nous avons désormais des installations
dont la consommation est inférieure à 100 kWh/m3 avec des échangeurs non
optimisés… C’est dire que l’Ecostill est en passe de devenir la technologie
d’évapo-concentration la moins énergivore du marché, avec un objectif de 50
KwH/M3, que nous devrions valider avant cet été.
T.S. : L’Ecostill est un procédé modulaire et
homothétique reposant sur un ou plusieurs éléments de base d’une capacité de 2
m3/jour. Ainsi, les Ecostill 1000 à 5000 permettaient jusqu’à présent de
traiter des volumes de 2 à 10 m3/jour. Mais certains grands comptes, jugeant
ces capacités insuffisantes, ont exprimé le souhait de voir la technologie
adaptée à des volumes plus importants. C’est chose faite avec l’Ecostill 18000
qui intègre toutes les améliorations développées en interne et permet à TMW de
se positionner sur des volumes traités bien supérieurs à ce que l’entreprise
proposait jusqu’à présent, de 20 jusqu’à 100 m3/jour désormais. Bien sûr, les
fondamentaux qui font le succès de l’Ecostill restent les mêmes : tout en
plastique, pas de compresseur, pas de pompe à vide et une fiabilité maximale…
T.S. : Oui, c’est une ouverture sur des
volumes plus conséquents. Ce n’est pas un nouvel Ecostill, c’est l’application
de la même technologie sur un équipement capable de traiter des volumes plus
importants.
Ecostill
18000 vient se placer au dessus des équipements de type Ecostill 1000 à 5000 et
coexiste également avec notre gamme containérisée, qui intègre en standard
toutes les fonctionnalités requises : filtration, pilotage, suivi à distance,
concentration, et bien évidemment, évapo-concentration, cœur du process MHD
dans des containers de 10 à 40 pieds, sans nécessiter d’infrastructure lourde
ou onéreuse pour être mis en œuvre.
Revue E.I.N. : Le fait de pouvoir traiter des volumes plus conséquents vous ouvre de nouveaux marchés ?
T.S. : Les volumes de déchets liquides générés
par les industriels sont souvent proportionnels à leur taille. Sur de petits
volumes, nous touchions par exemple de nombreuses PME spécialisées en
traitement de surfaces. L’Ecostill 18000 va nous permettre d’adresser des
marchés auxquels nous ne pouvions pas prétendre jusqu’à présent. Mais notre premier
marché restera sans doute le secteur du traitement de surface, devant les
tanneries, le textile ou encore le traitement des lixiviats sur lesquels notre
technologie fait merveille…
Revue E.I.N. : Ou en êtes-vous aujourd’hui en termes de développement commercial ?
T.S. : Depuis le début de la commercialisation
de la technologie, de nombreux industriels tels que Canon, SPI Aero, Spama,
Alfa Laval, Sika, Rehau, GEA ou encore Oberthur Fiduciaire, pour ne citer
qu’eux, se sont dotés d’équipements Ecostill. Au global, la capacité du parc
installé intégrant les équipements loués ou vendus, avoisine aujourd’hui les 90
m3/jour. Au-delà de cet aspect volumes, le savoir-faire de l’entreprise tend à
se diversifier. Au départ, comme toute entreprise issue de la R&D, nous
focalisions sur le produit. Aujourd’hui, nous mettons l’accent sur le besoin du
client. Ce positionnement nous amène à faire de plus en plus d’ingénierie en
amont comme en aval de notre procédé. Il est de plus en plus rare de vendre un
équipement Ecostill seul. Il est souvent nécessaire de mettre en place un
process physico-chimique en amont ou une dé-cyanurisation en aval, par exemple.
Cette évolution nous amène à développer des offres globales, et par conséquent
à faire de plus en plus d’ingénierie.
Revue E.I.N. : Votre développement passe également par l’international ?
T.S. : La problématique de la réduction des volumes
d’effluents industriels pollués est mondiale et les opportunités nombreuses
dans beaucoup de pays du monde. Mais notre taille nous impose de nous
concentrer sur les régions dans lesquelles les opportunités sont les plus
nombreuses. C’est par exemple le cas de la Chine qui est en proie à de gros
besoins tout en étant animée de la volonté de progresser rapidement. Il y a
plus de sites industriels, chaque site industriel génère plus de capacités, les
coûts de traitement sont plus élevés et il y a peu de concurrence. Aujourd’hui,
on ne peut pas encore dire que nous avons concrétisé des affaires, mais nous
avons, en moins d’un an, signé des locations probatoires, ce qui est déjà
beaucoup plus rapide que ce qui se pratique en Europe. Nous espérons a priori
conclure une dizaine de m3 dès cette année.
Propos recueillis par Vincent Johanet
Focus : Oberthur Fiduciaire choisit TMW
La collaboration entre TMW et Oberthur Fiduciaire, un des premiers imprimeurs fiduciaires au monde, a débuté par une mission test sur site de 3 mois, de novembre 2015 à février 2016, pour se conclure avec l’installation d’un Ecostill 8000 (4 modules de 2 m3) pour traiter les effluents liés à l’impression des billets de banque.
Le
problème au départ concernait un effluent compliqué à traiter : une DCO > à
45 000 mg/l), un pH de 12, et la présence de chlorures et de sels
métalliques. L’objectif d’Oberthur Fiduciaire était d’atteindre une DCO ? à
2 000 mg/l. Pour parvenir à ce résultat, l’entreprise avait testé
plusieurs procédés différents, pour finalement n’obtenir que des résultats
avoisinants les 15 000 mg/l.
Oberthur
Fiduciaire s’est donc mis à la recherche d’une solution permettant de réduire
le volume de déchets liquides générés, et à terme sa consommation d’eau, tout
en restant dans des coûts opérationnels et d’investissement raisonnables.
Difficulté supplémentaire : la nature de l’effluent, à base d’huile de ricin,
difficilement traitable par évaporation.
«
TMW nous a proposé de tester son process en essai laboratoire, explique Benoît
Renault chez Oberthur Fiduciaire. Les résultats, en termes de DCO, avoisinaient
alors les 4 000 mg/l. Forts de ce premier succès, nous avons prolongé le
test avec un pilote type Ecostill 1000 pendant 6 mois qui nous a permis de
traiter en conditions réelles 10 % de notre capacité globale ».
«
Ce qui nous a séduit, c’est la réactivité de TMW et de ses équipes, tout comme
la possibilité de faire évoluer le dispositif au fur et à mesure de nos besoins
», souligne Benoît Renault. Nous en sommes maintenant à la troisième génération
de modules, et nous bénéficions d’un véritable accompagnement, tant au niveau
de l’écoute qu’au plan technique ».
Actuellement,
l’installation fonctionne à 80 %. Les projections attendues consistent à
atteindre les 100 %, soit un traitement hebdomadaire de 36 m3.
«
TMW s’est engagé sur les résultats, et c’est sur cet engagement que nous
établissons la qualification de l’installation pour l’utiliser en tant qu’outil
industriel » conclut Benoît Renault. Oberthur Fiduciaire ambitionne ensuite de
devenir complètement autonome sur l’installation d’ici 2018.