Analyseurs de COT : moins coûteux , et plus faciles à mettre en oeuvre
31 decembre 2019Paru dans le N°427
à la page 85 ( mots)
Rédigé par : Antoine BONVOISIN
Les technologies employées pour mesurer le Carbone Organique Total (COT) dans l’eau ont peu évolué ces dernières années. En revanche, les méthodes sont maintenant moins coûteuses et les appareils plus faciles à utiliser. Certaines mesures UV permettent en outre de caractériser plus précisément le carbone présent dans les échantillons.
Le COT est représentatif de la matière organique dans l’eau, et constitue notamment les nutriments utilisés par les bactéries pour se développer. La mesure du COT est aujourd’hui réglementaire sur les eaux potables, où la teneur doit être inférieure à 2 milligrammes par litre. Il en va de même pour les eaux pharmaceutiques, où la concentration ne doit pas excéder 500 microgrammes par litre.
Les principes de mesure du COT sont employés depuis longtemps et ont peu changé au cours du temps. Le carbone organique est mesuré indirectement en quantifiant le différentiel entre le carbone total et le carbone inorganique contenu dans les échantillons. Trois technologies peuvent être employées : la mesure par UV, l’oxydation chimique, ou encore l’oxydation thermocatalytique.
La mesure par oxydation UV fonctionne pour des eaux pures, et se prête bien à une utilisation en milieu pharmaceutique, quand les conductivités sont inférieures à quelques micro-siemens.
Mesurer le COT par oxydation UV
C’est la technologie qu’emploie Swan, sur des eaux pures ou ultra-pures, avec des analyseurs en ligne. « Le but avec les analyseurs en ligne est d’avoir des instruments simples à utiliser, et parfaitement fiables et robustes. Nous proposons des analyseurs de COT par oxydation UV à 254 nanomètres, explique Guillaume Schneider, Sales Manager chez Swan. Nous installons, qualifions les analyseurs et faisons la maintenance, nos clients étant généralement des industries pharmaceutiques. Ces dernières années, certaines choses ont changé. Avant, nous travaillions avec des analyseurs assez difficiles à mettre en œuvre. Aujourd’hui, les appareils sont moins chers, faciles à utiliser et peuvent être rentables pour de petites productions d’eaux à usage pharmaceutique. De l’eau brute jusqu’à sa potabilisation, nous mettons en avant notre nouvel analyseur par spectrométrie à 254 nm caractéristique de la charge organique. Cette mesure d’absorbance (résultat exprimé en m-1 ou cm-1) pourra être traduite en équivalant COT, en DCO par exemple. Innovant, l’AMI SAC 254 peut être accompagné d’un module de nettoyage chimique réduisant ainsi la maintenance de 55 % ».
Avec l’acquisition de la société Seres, Swan étend son portefeuille d'instruments de mesure à un nouveau COT-mètre en ligne pour les hautes concentrations, destiné aux eaux de chaudière.
Cet instrument permet une surveillance du COT sur les retours condensats et sur les eaux brutes pour les transformer en eau potable selon la norme EN DIN 1484.
Après une oxydation UV et un ajout faiblement dosé de persulfate, la concentration de COT est détectée par NDIR (Infrarouge Non Dispersif). La gamme de mesure couvre de 0 à 100 ppm voire 1000 ppm avec une dilution de l’échantillon.
S::CAN propose également la technologie UV-Visible. « Nous sommes une filiale française d’un fabricant autrichien, leader mondial pour la spectrométrie UV-visible » précise Philippe Marinot, son directeur général. « Nous proposons des sondes, qui couvrent l’ensemble du spectre UV-Visible de 200 à 750 nm. Grâce à une très bonne résolution du capteur optique nous pouvons intégrer 256 longueurs d’ondes. Des algorithmes de calcul performants vont convertir l’empreinte spectrale en mg/l de COT, en tenant compte des interférents potentiels tels que la turbidité. De plus, la sonde peut déterminer simultanément d’autres paramètres physico-chimiques ».
S::CAN s’est principalement positionnée sur les mesures de COT pour les eaux de surface, les eaux potables et les eaux usées. L’avantage du système proposé est qu’il repose entièrement sur une technologie optique qui ne nécessite pas de réactifs ou peu de maintenance. L’entreprise travaille principalement avec des traiteurs d’eau, comme Suez, Veolia ou Saur, ainsi qu’avec des collectivités territoriales, et des centres de recherche comme le BRGM qui réalisent des études d’impacts sur les nappes souterraines. S::CAN intervient enfin auprès d’industriels pour le contrôle des effluents.
« L’installation des sondes et leur mise en service sont très simples, nos sondes sont directement immergeables dans le milieu. Le nettoyage des fenêtres de mesures se fait automatiquement par autobrosse, aucune opération de maintenance n’est nécessaire » poursuit Philippe Marinot. « Nous avons environ 10.000 sondes installées à travers le monde, et les retours d’expériences démontrent la précision du système et sa fiabilité ».
Gros avantage des appareils proposés par S::CAN, ils permettent de réaliser d’autres mesures comme la turbidité, les nitrates, la DCO et DBO, et les organiques dissous. Toutes ces mesures ne nécessitent qu’une seule sonde, ce qui peut être avantageux pour les clients. L’entreprise a développé ces dernières années un spectromètre à LED pour des applications simples sur l’eau potable, par exemple pour la mesure du COT combiné à la turbidité. Dans ce cas, le spectre émis se limite à quelques longueurs d’ondes. Et S::CAN s’apprête à commercialiser un nouveau spectromètre, utilisant l’ensemble du spectre UV-visible comme les autres appareils, mais dont le temps de réponse sera plus rapide et qui pourra être géré à distance avec une tablette ou un smartphone.
De même, la sonde de mesure à immersion en ligne multi-paramètres UV-Probe 254+ d’EFS, est équipée d’un transmetteur qui permet le contrôle de la qualité des eaux et des effluents en continu et sans réactif. Elle mesure directement le C.A.S. 254 et le C.A.S. 560. Par corrélation, la sonde estime le COT mais peut aussi être corrélée à la DCO ou DBO.
Pour s’assurer de ne passer à côté d’aucune variation du niveau de COT, il peut être utile d’avoir des mesures en permanence. C'est ainsi que Lar, distribué par Anael, a développé un nouvel analyseur d'eau ultrapure pour les industries pharmaceutiques et des semi-conducteurs : le QuickTOCtrace. Ce dernier utilise le suivi différentiel de la conductivité avant et après une oxydation aux UV de l'effluent, en moins de 30 s.
L’analyseur 6000TOCi de Mettler Toledo Thornton exploite des mesures de conductivité avant et après l’oxydation de l’échantillon par UV pour fournir des mesures de COT en continu et en temps réel. La technologie d’oxydation UV de Mettler Toledo assure une mesure en moins d’une minute. Associé au transmetteur multiparamètre M800, le système répond à toutes les exigences des pharmacopées mondiales. Les diagnostics Intelligent Sensor Management (ISM®) intégrés au 6000TOCi permettent de connaître en permanence l’état de l’analyseur et affichent des notifications de maintenance préventive qui permettent aux utilisateurs d’anticiper et de planifier les interventions de routine.
Les autres évolutions à noter concernent la transmission des données : avec les nouvelles versions des appareils, celles-ci pourront être communiquées par wifi ou Bluetooth.
Gagner en précision dans la caractérisation du COT
Aqualabo propose également des solutions UV pouvant fournir quelques analyses complémentaires. « Nous avons une bibliothèque de spectres UV sur laquelle on se base pour quantifier la teneur en COT d’un échantillon » explique Séverine Goulette, directrice marketing stratégique. « Notre analyseur permet de balayer plusieurs longueurs d’ondes UV, ce qui permet par corrélation de connaître la teneur en COT via une méthode de déconvolution ».
Cette méthode se différencie de celles utilisant une seule longueur d’onde, à 254 nanomètres, et où une corrélation est établie entre la mesure et la teneur en COT. La méthode employée par Aqualabo permet d’être plus précis sur la mesure de concentration en COT en tenant compte de plusieurs longueurs d’ondes.
« Ce qui est intéressant également avec cette méthode, c’est que nous pouvons regarder le spectre UV de l’échantillon, qui est comparé à un modèle UV correspondant à la nature de l’eau analysée, et ainsi en déduire la présence de certaines molécules » poursuit Séverine Goulette. « Sous réserve de savoir quelles molécules sont produites par une industrie par exemple, on peut en déduire celles présentes dans l’eau et qui constituent le COT ».
Cette caractéristique permet d’avoir une information plus précise sur le COT, et donc d’identifier plus particulièrement ce qui participe à la pollution.
La maintenance à réaliser sur les appareils est assez légère : ces derniers ne nécessitent pas de réactifs, et l’entretien se résume au changement de certains tuyaux et à l’ajout d’eau javellisée pour les auto-nettoyages. D’autres mesures peuvent en outre être réalisées en simultanée, comme la DBO, la DCO, les nitrates et les matières en suspension. « Cela permet de bien caractériser la qualité de l’eau, sur des eaux industrielles, en milieu naturel, ou encore en milieu urbain » précise Séverine Goulette.
Aqualabo travaille avec des clients situés en Asie, au Vietnam, en Chine, où ces technologies sont très appréciées, car simples à mettre en œuvre. Leurs produits sont proposés pour la surveillance de la qualité de l’eau, ou encore pour des stations d’épuration urbaines. En France, l’entreprise intervient auprès de collectivités territoriales, de régies des eaux, d’opérateurs tels que Suez, Veolia ou Saur, et d’industriels dans les domaines de la pétrochimie et de l’agroalimentaire.
« Le fait de pouvoir mieux caractériser le COT peut intéresser certains acteurs » explique Séverine Goulette. « Par exemple, sur l’étang de Berre, plusieurs réseaux industriels parviennent à la station d’épuration, et l’objectif est de comprendre qui rejette quoi, à quel moment et en quelle quantité pour savoir qui doit financer le traitement des eaux et à quelle hauteur. Nos appareils permettent de réaliser des analyses plus précises et d’interpréter au mieux les résultats obtenus. Certaines grandes villes peuvent également identifier des rejets industriels dans leurs eaux ».
Autre avantage lié à ces analyseurs, quatre points de mesure peuvent être installés avec le même appareil, il est donc possible d’analyser 4 échantillons différents sur un seul site. Cette caractéristique permet par exemple d’analyser différentes sorties de production sur un même site. Sur un bassin d’épuration, il est possible de faire des mesures en entrée et en sortie du bassin, avec un seul appareil, sans avoir à utiliser deux sondes. « Et nous tentons d’être moins chers que nos concurrents sur le prix des appareils » poursuit Séverine Goulette. « Le coût de notre appareillage se situe autour de 8.000 euros ».
Plus de précision, c’est également ce que permet Ll COTmètre 7010 de Metrohm qui s’appuie quant à lui sur la méthode éprouvée de l’oxydation avancée à double étage avec double longueur d’onde ultraviolet et injection de persulfate. Sans recours à des températures élevées, les substances organiques contenues dans l’échantillon sont converties en dioxyde de carbone (CO2) dont la concentration sera détectée par NDIR (Infrarouge Non Dispersif). L’équipement se caractérise par un faible coût à l’acquisition puis à l’exploitation et une interface utilisateur à écran tactile couleur qui facilite l'accès aux paramètres de procédés, à la base de données de résultats et aux diagnostics, avec protection par mot de passe.
La méthode d’oxydation avancée Hach Biotector constitue une évolution significative pour l’analyse du COT en continu. Elle offre un pouvoir d’oxydation important avec la mise en œuvre de radicaux hydroxyles tout en étant simple à mettre en œuvre avec de la soude et de l’air comprimé comme utilités. Restant une analyse à température ambiante, il n’y a pas de dépôts de sels dans le réacteur, réduisant la maintenance et le taux d’indisponibilité. Le volume d’échantillon injecté dans le réacteur est de plusieurs millilitres là où d’autres méthodes sont limitées à quelques dizaines de microlitres. Là encore, cela réduit la maintenance et les pannes avec des diamètres de tuyauterie plus larges et un fonctionnement sans filtre sur l’échantillon. « Cette méthode d’analyse permet de faire évoluer l’analyse du COT en continu pour toutes les applications, explique Jean-Pierre Molinier, spécialiste procédés chez Hach. Là où la mesure était faisable simplement, sur de l’eau potable ou des condensats par exemple, elle amène désormais une autonomie inédite de 6 mois sans aucune intervention sur l’analyseur. Là où la mesure du COT demandait des efforts de maintenance importants, ceux-ci sont réduits avec un taux de disponibilité certifié de 99,86 %. Enfin, des applications interdites à l’analyse en ligne pour cause de bouchages sont désormais possibles comme par exemple l’analyse dans les effluents bruts d’industries agroalimentaires pour la réduction des pertes matières avec un retour sur investissement très court ».
Autrement, peu d’améliorations technologiques sont à noter. Les évolutions se situent plutôt au niveau des fonctionnalités des analyseurs, qui sont dotés de systèmes de communication plus évolués avec le numérique, avec des données accessibles directement sur une page web.
Mesure UV, oxydation thermique, des usages différents
Endress+Hauser a fait le choix de proposer la technologie UV plutôt pour l’analyse d’eaux en milieu naturel ou pour les eaux potables et propose des méthodes basées sur l’oxydation thermique en milieu industriel.
« Avec l’UV nous travaillons à 254 nanomètres, puis nous corrélons les mesures d’absorbance obtenues avec des mesures en laboratoire du COT si nécessaire » explique Matthieu Bauer, responsable de marché Environnement et Energie. « Mais le problème est que l’on ne détecte pas les liaisons simples carbone avec cette technologie, comme les alcools et les sucres par exemple. C’est la raison pour laquelle nous déconseillons cette méthode pour caractériser des effluents industriels. En revanche, nous la proposons sur des stations d’alertes dans le domaine de l’eau potable : le capteur CAS51D permet d’effectuer une mesure fiable et continue, avec un très faible entretien ».
Pour les applications industrielles, Endress+Hauser propose un analyseur CA72TOC qui utilise l’oxydation thermique pour mesurer le COT. L’appareil fonctionne à 850 degrés, ce qui permet de mesurer l’ensemble des composés carbonés, quelle que soit la longueur de la chaîne carbonée. Un effort particulier a été fait sur la maintenance de l’appareil, une étape de collecte et de piégeage des sels permet d’éviter des bouchages du système et augmente l’autonomie de l’analyseur.
Anael développe des solutions en ligne par voie thermique et chimique (QuickTOCultra et QuickTOCuv). Pour des effluents difficiles à oxyder, avec des MES ou encore fortement salés, la combustion s’impose. Plus performante, cette technique transforme le carbone en CO2 à des températures élevées (1.200 °C) sans catalyseur. L’analyse nécessite de 3 à 5 mn.
La technique utilisée par le COT Aurora 1080 de Physitec Fondis repose aussi sur la combustion catalytique – haute température (680 °C) avec un catalyseur en platine. Outre sa cadence de traitement (300 échantillons peuvent être analysés par jour ) et son logiciel TOC view intuitif, l’analyseur COT Aurora 1080 se caractérise par 4 innovations brevetées : le smart slide injector qui rallonge la durée de vie du joint d’étanchéité ; le Pulsed time injection qui permet l’introduction d’un volume important d’échantillons en plusieurs micro injections ; la durabilitié du Tube guard protector grâce à la récupération du sel non combustible et le système Stop flow – du bypass injection qui convertit le tube à combustion en piège à CO2.
Shimadzu exploite également les méthodes par oxydation, chimique ou thermique. Les deux techniques étant utilisées distinctement en fonction des contraintes et des habitudes des clients. Les systèmes par oxydation chimique sont moins adaptés lorsque les molécules sont difficiles à oxyder, où en présence de composés solides, comme la cellulose.« Nous proposons différents appareils en fonction des besoins des clients » explique Christian Consolino, spécialiste produit chez Shimadzu. « En laboratoire, nous proposons un COT-mètre nommé TOC-V, qui permet de réaliser une oxydation chimique avec persulfate de sodium, UV et chaleur. Cet appareil est notamment adapté pour l’analyse des eaux potables, eaux de rivières, eaux de piscines, eaux des industries pharmaceutiques, qui ont donc de faibles teneurs en carbone. Nous proposons aussi une analyse par combustion catalytique avec le TOC L, adaptée aux eaux très chargées, ou difficiles à oxyder ».
Pour les installations en ligne, Shimadzu propose un système d’oxydation thermocatalytique pour les effluents industriels et les stations de production d’eau urbaine. « Nous travaillons avec des clients assez variés, allant des industries à des organismes publics » précise Christian Consolino. « Ces dernières années, les instruments n’ont pas tellement évolué, nous avons plutôt des améliorations de logiciels, qui avertissent lorsque des maintenances sont nécessaires, ou s’il faut changer un catalyseur ou un réactif. En industrie pharmaceutique ou en cosmétique, on améliore l’intégrité des données : le logiciel permet de s’assurer que la mesure a été acquise correctement, et que tout a été fait dans les règles. La partie instrument ne change pas, c’est tout ce qui est autour qui évolue. Il en va de même pour les préleveurs, qui sont notamment munis d’un homogénéiseur intégré, qui permet de bien mélanger les échantillons et de proposer jusqu’à 6 voies d’analyse sur le même instrument ».
Si les technologies ont peu évolué ces dernières années, les appareils permettent aujourd’hui d’acquérir plus d’informations et leur utilisation est facilitée. L’amélioration des mesures de COT pourrait en outre remplacer à terme les mesures de DCO, qui sont parfois contestées.
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