Rétablir le cycle de l’eau par des systèmes d’infiltration de la pluie au plus près de sa chute et contribuer au rétablissement du bon état des masses d’eau en Traitant les eaux de ruissellement, c’est l’objectif poursuivi par les industriels pour répondre aux exigences de la Directive-Cadre sur l’eau. Un domaine encore jeune, à l’origine de nombreuses innovations et que de nouvelles normes devraient bientôt encadrer.
La gestion des eaux de ruissellement est aujourd’hui une question cruciale dans les zones urbanisées car les surfaces artificialisées sont de plus en plus importantes et totalisaient déjà 4,4 millions d’hectares en 2013. Le taux d’infiltration, de 50 % en zone naturelle, chute à 15 % sur un sol imperméabilisé pour une même pluviométrie.
Non seulement les capacités des réseaux à absorber les fortes pluies sont rapidement dépassées et entraînent un risque d’inondation accru, mais le cycle de l’eau est perturbé. Les couches superficielles et profondes ne sont plus alimentées par les eaux pluviales. L’assèchement des sols et la baisse du niveau des nappes induisent des tassements différentiels des sols et génèrent des dégâts pour les immeubles et les infrastructures. En cas de forte pluie, les eaux de ruissellement chargées en polluants et en matières en suspension d’origines diverses occasionnent des dégradations et polluent les rivières.
Face à ces défis qui soulignent les limites des politiques “tout tuyau” menées ces dernières décennies, les pouvoirs publics encouragent les collectivités locales à prendre en compte cette problématique.
La loi du 12 juillet 2010 (art.L.2333-97 à L.233-101 du code général des collectivités territoriales) a donné aux communes la possibilité de créer une taxe pour la gestion des eaux pluviales urbaines, assortie d’un système d’abattement incitant à la mise en place de dispositifs de gestion à la parcelle, c’est-à-dire au plus proche du point de chute de l’eau. Fossés, noues et tranchées de rétention sont des solutions simples à mettre en oeuvre mais nécessitent un certain espace. Des solutions plus complexes existent également qui répondent à la volonté de réduire l’emprise foncière des ouvrages, comme le stockage sur toiture ou dans des bassins de rétention ou d’infiltration enterrés. Les bassins de rétention peuvent être équipés de dispositifs pour restituer l’eau à un débit calibré au milieu naturel ou bien vers un réseau d’assainissement.
Ils peuvent également constituer une réserve pour l’arrosage, par exemple, et valoriser ainsi les aménagements urbains.
Le boom des structures alvéolaires
Dans ce cadre, les solutions reposant sur l’utilisation de structures alvéolaires ultralégères (SAUL) sont très prisées pour leur facilité de mise en oeuvre. En polypropylène PP, en PEHD ou en PVC, elles se présentent sous forme de blocs parallélépipédiques composés à 95 % de vide (contre 30 à 40 % pour les graves poreuses et 50 à 60 % pour les produits creux en béton), et offrent l’avantage d’être modulaires et manuportables, de s’adapter à la topographie et aux exigences architecturales, et de ne nécessiter que des volumes de terrassement réduits. Présents sur le marché depuis plus de trente ans pour la réalisation de remblais en construction routière, le nombre de fabricants s’est multiplié depuis une dizaine d’années et les produits se sont diversifiés pour répondre à l’évolution de la problématique de l’assainissement pluvial. Cinq fabricants (Fränkische, Nicoll, Nidaplast, Rehau et Wavin) se sont d’ailleurs rassemblés au sein d’un syndicat, le STORM, pour promouvoir ce concept, défendre la qualité des produits proposés et des services associés et professionnaliser ce marché.
Nidaplast, pionnier dans le domaine avec ses blocs en nid d’abeille Nidaplast EP et Nidaflow, propose des structures en nid d’abeille en PP autocurables et découpables, les AZ box, utilisées pour des bassins de rétention mais aussi pour accroître la capacité de rétention des noues ou des tranchées drainantes. Rehau, Funke, Fränkische, Hauraton, Nicoll, Wavin, Sotra Seperef, ACO ou Graf proposent des SAUL qui se distinguent par leur taille, leur résistance mécanique et leur mode d’alimentation et de diffusion de l’eau à travers la structure (verticale, horizontale, tridimensionnelle).
ACO met un point d’honneur à garantir à ses clients la qualité de ses solutions. ACO Stormbrixx en polypropylène injecté, confirme ses performances et obtient l’avis technique du CSTB. Avec sa construction modulaire imbriquée unique et très stable, le système offre une importante capacité de stockage (95 % de vide) qui permet de réduire au maximum les volumes de terrassement pour la réalisation des bassins d’orage.
Les évolutions récentes vont vers une facilitation de la mise en oeuvre avec des systèmes d’autoclipsage sans pièces rapportées et la réduction de l’encombrement des SAUL au stockage. C’est ainsi que de plus en plus de fabricants comme Rehau, Fränkische ou Sotra Seperef par exemple, avec sa version Raincube Core ultracompact, proposent des éléments en deux parties (moitiés de parallélépipède), ce qui permet d’empiler les caissons. « Notre Rausikko box C, comme compact, est empilable pour le conditionnement, ce qui réduit les coûts de transport et l’emprise au sol des palettes sur le chantier, souligne Cynthia Him, chef de produit Gestion des eaux pluviales chez Rehau. Ces box sont sur le marché depuis 2012 et peuvent être associées aux box de génération précédente ».
De même, Fränkische a lancé récemment sa version empilable Rigofill. Alors qu’un camion pouvait contenir 80 m3 en blocs montés en usine, il transporte l’équivalent de 300 m3 avec les structures empilables, un gain appréciable pour ce constructeur travaillant pour des clients dans les DROMCOM. Dans ce cas cependant, la responsabilité du montage sur le chantier incombe au client. Les montages se font avec des clips intégrés aux poteaux (ergots mâle et femelle) et on relie les blocs entre eux par des clips.
Les SAUL permettent de réaliser des bassins de plusieurs milliers de mètres cube aussi bien que des bassins de quelques mètres cube seulement. Selon que ces structures sont enveloppées dans une membrane étanche ou un géotextile poreux, il s’agira d’un bassin de rétention ou d’infiltration dans le sol sous-jacent.
Bien que l’infiltration apparaisse comme la meilleure réponse au ruissellement, le choix de cette solution doit tenir compte du milieu récepteur. Elle doit être abandonnée si la perméabilité du sol est trop faible, par exemple du fait de la présence de couches argileuses, si le sol est pollué ou l’ouvrage trop près des bâtiments (moins de 5 m). La nappe phréatique doit également être protégée en ménageant au moins un mètre entre le fond du bassin et le niveau haut de la nappe. Le guide technique Les SAUL pour la gestion des eaux pluviales, publié par l’IFSTTAR (Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux) avec l’appui du CERTU (Centre d’études sur les réseaux, les transports, l’urbanisme et les constructions publiques), a été réactualisé récemment avec un retour de 20 ans sur, notamment, la conception, le dimensionnement hydraulique et mécanique, la mise en oeuvre et la maintenance des ouvrages en structures alvéolaires ultralégères. Intégrant la diversité des produits aujourd’hui disponibles sur le marché, les expériences d’experts, maîtres d’ouvrage, maîtres d’oeuvre, entreprises et exploitants, aideront les acteurs à concrétiser leur projet.
En tout état de cause, le produit miracle n’existe pas plus en gestion des eaux pluviales que dans d’autres domaines, mais la diversité des produits actuellement sur le marché et encore en plein développement permettent d’inventer des solutions adaptées à chaque situation en tenant compte du bassin-versant, du milieu récepteur, du projet d’aménagement et de la fréquentation attendue. Combiner les systèmes et agir en plusieurs points du cycle de l’eau est sans doute la meilleure façon d’améliorer à la fois la qualité de l’eau et sa circulation.
À chaque projet sa solution
« Aujourd’hui, les aménageurs sont incités à gérer les eaux pluviales au plus près de leur point de chute, explique Cynthia Him, Chef de produit Gestion des eaux pluviales chez Rehau. Les projets d’envergure, de la zone commerciale aux nouveaux lotissements, sont plus encadrés et doivent faire l’objet d’un dossier loi sur l’eau. On a ainsi de plus en plus de bassins de moins de 100 m3, par exemple dans des projets de petits lotissements, à côté des grands bassins enterrés de 5 600 m3 d’un seul tenant. En milieu rural, où la pression sur le foncier est moins forte, le bassin à ciel ouvert, moins cher, est souvent privilégié. Nous avons néanmoins été amenés à remplacer ces bassins par des structures enterrées, notamment pour éviter les moustiques ».
Les petits projets trouvent des solutions toutes prêtes.
Nidaplast propose des kits de 2 m3 de blocs Nidaplast : petits bassins d’infiltration, puits perdus ou tranchée drainante. Polypipe dispose également de kits de mini-bassins de 3, 6, 9 et 12 m3 de différentes configurations pour s’adapter à l’espace disponible et à la profondeur du réseau. Ces kits sont composés de SAUL Polystorm et d’un bloc d’inspection.
Ce fabricant offre également des structures très fines pour drainage et infiltration (Permavoïd), de 15 ou 8,5 cm d’épaisseur, idéales en cas de nappe peu profonde. Elles ne nécessitent que 15 cm de remblai et supportent des charges roulantes lourdes (20 tonnes à l’essieu). Une version irrigation passive de ce produit existe pour la réalisation de toitures végétalisées qui présentent aussi l’intérêt de participer à la thermorégulation des bâtiments.
Wavin propose de son côté des kits complets prêts à poser, composés d’un bassin de stockage (modules Wavin Q-Bic), d’un tabouret de régulation de débit (avec ventilation et pelle anti-colmatage) et des accessoires de raccordement. Ces kits complets de rétention et d’infiltration à la parcelle peuvent être installés et raccordés au tabouret en quelques minutes. L’installation peut être réalisée à faible profondeur et sous voie circulée, sous un accès de garage…. Le bassin et le tabouret sont inspectables et nettoyables.
D’autres fabricants comme Hamon, Nidaplast, Le Prieuré ou Nicoll disposent également de solutions pour récupérer, stocker et réutiliser l’eau de pluie des toitures sous un aménagement sportif ou un espace paysagé dans un objectif de zéro rejet. Hamon Thermal Europe propose ainsi des blocs (le Rétentio) de hauteur variable (de 50 à 500 mm), permettant le stockage et la réutilisation des eaux de toiture. Les blocs de stockage de 6 ou 15 cm d’épaisseur de Nidaplast (Nidaroof) se posent quant à eux directement sur du geoflow et accueillent des éléments précultivés (Nidasedum) ou non (Nidaterra) pour les toitures végétalisées ou aménagées. Ces éléments ont une sous face recouverte d’un géotextile poreux qui leur permet de restituer aux plantes l’eau stockée dans les Nidaroof. Le Prieuré Vegetal iD, spécialiste de la végétalisation des bâtiments, propose pour sa part depuis 2015 un concept de toiture hydroactive connectée développée avec l’Insa Lyon et le CETE d’Ile-de-France (Hydroventiv). Un capteur permet de suivre le volume d’eau stocké dans les éléments placés sous les bacs contenant la végétation, la température et le débit de fuite. Il permet également de piloter à distance de façon optimale la sub-irrigation du toit dans les régions de type méditerranéen pour lesquelles les pluies sont souvent insuffisantes. Nicoll offre une solution globale d’évacuation (Akasison) pour l’évacuation des eaux de pluie sur les toitures plates ou peu pentues qui fonctionne par dépression. L’eau ainsi récupérée peut alimenter un système d’infiltration en aval.
Des SAUL semi-circulaires ou circulaires (deux moitiés clipsées) sont proposés par Sotra Seperef (Duborain) et Hauraton (Drainfix twin) et supportent le trafic léger ou piétonnier. Duborain est adapté pour l’infiltration des eaux de pluie à la parcelle ou le stockage complémentaire sous une noue par exemple. Sotra Seperef propose également des Kit EP Rainbox 3S de 1,2 m3 ou de 3,5 m3 (avec un regard filtrant) pour favoriser l’infiltration à la parcelle. Ils se posent sur un lit de gravier 6/10 de 10 cm recouvert d’un géotextile et d’un remblai en sable puis en terre végétale.
Les bassins en SAUL de plus grande envergure trouvent aussi leur place au coeur de la ville, sous la voirie ou un espace vert sans arbre. Les fabricants peuvent être spécialisés mais nombre d’entre eux, comme Rehau (titulaire d’un avis technique) ou Sotra Seperef offrent une gamme de produit de résistance mécanique adaptée à l’usage qui sera fait en surface (piétonnier, véhicules légers ou véhicules lourds de type camions ou avions) et à la hauteur de la structure. « Les Rausikko box se posent en décalant les caissons en mûr de maçon, sans pièces rapportées pour les jonctions, ce qui confère plus de solidité et de stabilité à la structure, ajoute Cynthia Him. Nous pouvons monter des structures jusqu’à 2,64 m lorsque les conditions s’y prêtent, c’est-à-dire en tenant compte des charges dynamiques et statiques qui vont s’exercer sur le bassin (trafics routiers, parking, lieu de stockage...) ».
La gamme EcoBloc regroupe la 3éme génération de SAUL chez GRAF. Plusieurs types de modules sont disponibles, tous compatibles les uns avec les autres pour pouvoir proposer un bassin sur mesure et adapté aux contraintes rencontrées : EcoBloc Inspectable 420 L, dédié à la réalisation de bassins gros volumes, EcoBloc Inspectable 230 L, idéal lorsque la nappe phréatique est peu profonde, EcoBloc Flex, empilable pour économiser de l’espace lors du transport, EcoBloc Maxx, capable de supporter un passage camions jusqu’à 40 t et EcoBloc Light, le plus léger, qui permet de charger jusqu’à 475 m³ dans un seul camion.
Les solutions se diversifient et se distinguent parfois des SAUL.
C’est par exemple le cas des chambres proposées par Eluvio ou des systèmes Subway 12 d’ATE qui permettent de construire des bassins d’infiltration visitables qui ne se colmatent pas.
Optimiser le prix du mètre cube stocké et infiltré
Moins courant mais en fort développement, les constructeurs de réservoirs métalliques circulaires, comme Tubao ou Tubosider, proposent aujourd’hui des solutions de stockage et d’infiltration de l’eau de pluie. « Le Tubodrain résulte d’une réflexion avec le Grand Lyon sur un ouvrage d’infiltration à disposer sous le parking du Grand stade de Lyon en 2013, explique Eddy Paquelet, chef d’agence Tubosider. Il s’agit d’un tuyau Spirel, comme pour les tampons d’orage classiques, dans lequel sont réalisées des lignes de percements sur le point bas de sorte que les remblais techniques contigus ne soient pas déstabilisés par l’eau d’infiltration, surtout si la structure est disposée sous une voie circulée ». Le tuyau est posé sur une tranchée drainante de 30 cm de profondeur avec des matériaux de granulométrie 20x40, protégée par un géotextile pour en prévenir le colmatage dans le temps. Le Tubodrain est réalisé sur mesure et livré “clef en main” : piquages réalisés en usine, amorces trous d’homme, cloison de décantation intégrée possible, régulateur de débit si le sol n’est pas très perméable. Le temps de mise en oeuvre réduit, nécessitant très peu de fournitures annexes sur le chantier et engendrant très peu de déchets (ni soudage, ni découpes sur place). « Notre système est particulièrement intéressant lorsque les couches perméables sont profondes car on peut alors placer des tuyaux de gros diamètres (2,90 m), réduisant ainsi le coût de la fourniture par rapport au m3 stocké, poursuit Eddy Paquelet. Un autre point fort de notre système est qu’il est entièrement visitable et curable physiquement. Cela réduit les coûts d’entretien. Ils peuvent également être posés sous voiries lourdes sans dalle de répartition. Nos produits sont certifiés par le centre technique de l’Est Nancy ».
Des solutions tubulaires en grand diamètres reposant sur d’autres matériaux, notamment le PP ou PEHD, sont également proposées par Polieco, Pipelife ou Ryb. « Nos solutions en drain, faciles à mettre en oeuvre quelle que soit la typologie en surface (espace vert, parking, voirie), sont 100 % nettoyables et, selon le diamètre, visitables, souligne Thierry Decugniere chez Polieco. Elles répondent à des besoins allant de 6 à 150 m3 ».
Le développement rapide d’ouvrages hydrauliques sur mesure en béton préfabriqué, tels que proposés par Cimentub, totalement équipés et capables de répondre à une large spécificité de besoins permettent également d’optimiser les coûts.
Assurer la pérennité de l’ouvrage d’infiltration
Un danger guette les ouvrages d’infiltration : le colmatage. « Depuis 2010, nous travaillons en 4 phases, selon une approche de gestion intégrée des eaux pluviales, GIEP, un concept que nous avons déposé à cette époque et qui est notre leitmotiv, s’enorgueillit Christophe Chastel, directeur technique chez Fränkische. Nous promouvons une approche globale de la question afin de ne pas se focaliser sur un seul élément du cycle de l’eau. Il ne faut pas seulement dimensionner l’ouvrage en fonction des pluies locales, des surfaces imperméabilisées et du coefficient de perméabilité du sol, il faut traiter en amont pour que les matières en suspension (entre 20 et 200 micromètres) ne puissent entrer, se déposer sur les parois et ralentir ainsi le débit d’infiltration, limitant les performances de l’ouvrage dans le temps et grevant sa pérennité. Il faut aussi gérer le flux aval en cas de très grosse pluviométrie qui dépasse les capacités du bassin ».
Une approche partagée aujourd’hui par la plupart des fabricants comme Rehau, Aco ou Wavin, car un système bien conçu et adapté est un gage de maintenance réduite et de coût global avantageux. Certains constructeurs développent des drains de sédimentation hydrocurables à intégrer à la structure, comme les Draintank de Funke ou les Rausikko Box de Rehau qui disposent d’un véritable canal fermé dont la longueur est déterminée par les données hydrauliques du projet et placent en début de chaîne un regard avec un nombre prédéterminé de caissons hydrocurables. Les drains récupèrent les fines qui se déposent au fond. « Nous mettons l’accent sur le fait de pouvoir garantir un volume utile d’eau pendant toute la durée de vie du bassin grâce à la possibilité de faire un hydrocurage efficace car le canal est fermé et les sédiments sont localisés à cet endroit, insiste Cynthia Him de Rehau. Les structures ouvertes autorisent le passage des sédiments qui tapissent le fond du bassin avec le colmatage possible du géotextile et la réduction en conséquence de la perméabilité du bassin ».
Autres fabricants, autre philosophie. Fränkische pour sa part a conçu des caissons très ouverts, constitués de canaux longitudinaux et transversaux à parois diffusantes. Des éléments de regard Quadro-control intégrés dans la structure permettent l’inspection et l’entretien de l’ensemble de l’ouvrage : « avec ces regards, on est capable d’explorer tous les étages de la structure et de nettoyer même le géotextile sur le fond et les côtés du bassin, affirme Christophe Chastel, directeur technique chez Fränkische. Avec notre système il est possible de réduire le coefficient de sécurité pris pour pallier la baisse de débit avec le temps par encrassement. Cela permet de diminuer le volume de la structure et de baisser le coût pour l’aménagement tout en garantissant un bon fonctionnement et une protection des biens et des personnes ».
Wavin a adopté la même approche avec ses Q-Bic, des blocs dont toute la partie centrale est vide et qui forment des canaux aisément hydrocurables une fois alignés. Wavin Qbic Plus nouvelle génération, est encore plus accessible sur toutes les hauteurs et dans toutes les directions. Inspectable et hydrocurable, il ne nécessite pas d’éléments supplémentaires car les puits sont intégrés au module. De larges canaux profilés à fond lisse, permettent une inspection bidirectionnelle par caméra et un nettoyage par hydrocureuse. Ces modules bénéficient d’une fiche de déclaration environnementale et sanitaire (FDES) et peuvent être raccordés à une galerie technique modulaire en béton qui est physiquement accessible et nécessite moins de tampons de voierie.
L’approche de la société Hamon est différente. Grâce à son système de diffusion breveté, le bassin est « by-passé » lors des phénomènes pluvieux normaux. Le bassin n’est donc pas rempli inutilement, ce qui permet de réduire considérablement les coûts d’entretien. « Notre présence sur le marché depuis plus de 25 ans nous a permis de vérifier l’efficacité de notre système breveté et la pérennité des ouvrages de stockage réalisés en GEOlight ® » affirme Yves Bezault, directeur de production chez Hamon Thermal Europe. Parmi les solutions innovantes de bassin de rétention ou d’infiltration, Chapsol propose depuis quelques mois son nouvel Ecobassin- XL, seule structure cadre en béton du marché composée de 2 alvéoles séparées par un système de poteaux. Le gain matière est sensible avec +25 % de capacité de stockage comparé à des solutions traditionnelles. L’Ecobassin est particulièrement adapté aux cas de circulation lourde et pour son accessibilité et sa facilité d’entretien. Equipé de perforations pour infiltration en radier ou piédroits, l’Ecobassin-XL reste une solution fiable puisque visitable en cas de colmatage.
Avec ou sans drain intégré dans la structure, les fabricants s’accordent sur la nécessité de prévoir un traitement en amont du bassin par décantation sédimentation pour limiter le passage des fines susceptibles d’encrasser l’ouvrage. Bien souvent, les unités proposées intègrent le traitement des polluants de toute nature. En effet, les pluies urbaines contribuent à la dégradation des eaux superficielles en lessivant les micropolluants toxiques minéraux (plomb, zinc, cuivre, chrome) ou organique (ammonium, pesticides…) entraînant une accumulation toxique dans la chaîne alimentaire.
Le traitement des eaux de ruissellement s’avère indispensable, en particulier des premières eaux, très chargées, lors d’un épisode orageux.
Infiltrer une eau traitée
Un avantage du décanteur placé en tête de l’ouvrage d’infiltration est qu’il permet d’arrêter également les hydrocarbures. En effet, les véhicules ont évolué depuis 20 ans et la pollution liquide a beaucoup diminué sur les parkings. Les teneurs en hydrocarbures dans les eaux de ruissellement sont la plupart du temps inférieures à 5 mg/l et ces polluants sont fixés sur les MES. « Dans la norme actuellement discutée à l’AFNOR, se dégage un consensus entre industriels, maîtres d’oeuvre et pouvoirs publics pour dire que les décanteurs sont plus adaptés aux pollutions de voiries traditionnelles, confie Christophe Chastel de Fränkische. Les séparateurs d’hydrocarbures, faits pour travailler sur les liquides flottants et fonctionnant par séparation des densités, n’arrêtent pas les particules fines et devraient être cantonnés aux stations-service, aux aires de lavage ou sur les sites pétrochimiques ».
Outre les hydrocarbures, les parkings et voieries lourdes recueillent du plomb, du nickel, du zinc et du cuivre (provenant des débris de pneus par ex) qui sont lessivés par l’eau de pluie. Cette pollution soluble n’est pas piégée dans les décanteurs et doit faire l’objet d’un traitement spécifique, le plus souvent par le passage dans un filtre où ils seront adsorbés. Là encore, des solutions innovantes sont apparues sur le marché, plus ou moins décentralisées, qui interviennent au niveau de la collecte ou à l’entrée des bassins d’infiltration. C’est par exemple le cas du Stoppol de Saint Dizier Environnement qui permet un traitement décentralisé avec rejet au milieu naturel ou infiltration dans le sol (Voir à ce sujet notre dossier dans EIN n° 388).
Le dispositif de prétraitement conçu par Rehau se compose d’un décanteur Sedi-Clean, abattant les fines jusqu’à 400 micromètres (sable, poussière de freinage, résidus de pneus), et d’un système d’adsorption et de filtration Hydromaxx, monté en série, pour immobiliser les particules très fines, les huiles minérales et les pollutions dissoutes. Le granulat filtrant doit être changé tous les 4 ans. Toujours en amont de l’ouvrage, Fränkische propose la solution Sedi-pipe qui est une canalisation linéaire en PP à contre-pente (pour accélérer la vitesse de sédimentation) avec grille anti-remobilisation, placée entre deux regards en polyéthylène équipés d’une cloison siphoïde permettant de piéger les flottants. Selon les besoins du projet, on peut ajouter une grille supérieure pour regrouper les gouttelettes d’hydrocarbure par coalescence et les séparer de l’eau par densité. La gamme Substrator, équipée d’une cartouche filtrante, permet d’adsorber les métaux dissous. « Nous avons modifié récemment le substrat de la cartouche car l’utilisation de sels de déneigement peut provoquer le relargage par effet ionique des pollutions métalliques fixées dans le filtre, indique Christophe Chastel. Cette nouvelle cartouche a été présentée au salon des technologies de l’environnement IFAT en mai dernier. Toute notre gamme de Sedi-pipe bénéficie d’un avis technique du CSTB. L’adoption d’un prétraitement permet de diminuer les frais d’exploitation et d’assurer la pérennité de l’ouvrage. Il nous est arrivé de trouver le décanteur en amont d’un ouvrage plein et le bassin en état ! ».
Infiltrer plus fréquemment en décentralisant le traitement
Il est possible de décentraliser le prétraitement et/ou l’infiltration en agissant directement au niveau du collecteur : caniveaux ou avaloirs. L’avantage des systèmes qui infiltrent sur place est qu’ils sont relativement faciles à mettre en place. Il n’y a pas de contraintes altimétriques, pas besoin de point bas pour les rejets ni de pompe.
Des fabricants comme Hauraton (système Drainfix Clean) proposent des caniveaux en béton ou en PP avec traitement des eaux par un substrat filtrant fortement carboné (Voir à ce sujet notre dossier dans EIN n° 392). Le caniveau offre une capacité de rétention de 75 à 110 l/ml mais ne prévoit pas d’infiltration directe. L’eau ainsi récupérée peut être acheminée dans un bassin contigu de rétention ou d’infiltration. Une équipe dédiée suit et conseille tous les projets.
Birco, spécialiste des caniveaux à fente en béton pour charges extrêmes (aéroport, complexe portuaire) dispose également d’un système de traitement modulaire des effluents conçu en collaboration avec 3P Technik et offrant une capacité de traitement d’une surface de 20 m2 par mètre linéaire de caniveau. Le caniveau Birco Pur est équipé d’un bac de sédimentation en PEHD avec crochets de sécurité sous lequel est situé un support métallique perforé contenant un sac de filtration combinant charbon actif et granulat en céramique. D’une durée de vie de 10 ans, cette unité de filtration fixe les polluants organiques et inorganiques avec un débit de sortie de 20,7 l/sec.
Seul en son genre, le caniveau D-Rainclean de Funke, en PP, permet non seulement le traitement de l’eau sur place mais également son infiltration directement sous le caniveau. Chaque module de 50 cm est percé de 8 trous assurant un coefficient de perméabilité de 9.10-4 à long terme. Les eaux de ruissellement sont collectées et filtrées dans le caniveau par dégradation biologique pour les hydrocarbures et par adsorption pour les métaux. Une petite réserve d’eau (environ 3 litres d’eau par mètre linéaire) est ménagée dans le fond du caniveau pour assurer l’humidité suffisante au développement de la vie microbienne. « Notre dispositif traite les pollutions même en faible concentration, avec des abattements de 90 à 99 % des métaux et des rejets d’hydrocarbures inférieurs à 0,2 mg/l, souligne Raphaël Vite, directeur de Funke France. Le substrat a une durée de vie de 15 à 20 ans s’il est bien dimensionné. Il demande beaucoup moins d’entretien que les systèmes classiques comme les noues, les décanteurs-dépollueurs, les filtres plantés de roseaux ou les avaloirs qui nécessitent, pour certains, des interventions une à deux fois par an. Lorsque le substrat est saturé, il est ensuite aspiré et conduit dans un centre de traitement spécialisé. Hormis le coût d’évacuation du substrat lié au volume, les frais liés à l’intervention sont limités puisque le changement n’intervient que tous les 15 à 20 ans ».
Le D-Rainclean existe en version ouverte pour accueillir des plantations ou en version carrossable avec une grille en fonte. Si le coefficient de perméabilité du sol est moins bon que celui du caniveau, une zone tampon est créée sous le système par des SAUL ou tout autre structure de stockage comme des cailloux pour restituer l’eau plus tard. La partie filtrante peut être combinée avec un caniveau fermé si besoin. Les linéaires de caniveaux et avaloirs sont dimensionnés en fonction le plus souvent de pluies biennales et en prévision d’épisodes orageux. Dans ce cas, des trop-pleins (bypass) dirigent l’eau dans une unité de stockage située sous le caniveau, dans le réseau ou bien dans le milieu naturel, comme le cours d’eau avoisinant. « Cette année, nous avons amélioré le système en équipant dans chaque module de 50 cm, un cylindre vertical un peu surélevé qui permet de récupérer les eaux de ruissellement lorsque le débit de pointe dépasse les capacités du caniveau, continue Raphaël Vite. Ce trop plein est également rempli de substrat filtrant. Étant moins sollicité que le reste du caniveau, il gardera une perméabilité élevée. Ce dispositif peut aussi être utilisé à d’autres fins, comme augmenter la surface imperméabilisée sans modifier le linéaire ou bien pour augmenter la qualité de service (traiter une pluie décennale) ».
Ce système de traitement innovant est peu répandu aujourd’hui mais le domaine est encore jeune. « Plus d’une centaine de chantiers de caniveaux épuratoires ont été réalisés et plus de 150 000 m3 de caissons ont été posés, rapporte Raphaël Vite. Cela nous permet d’avoir des retours sur certains besoins et de faire évoluer nos produits pour y répondre. Nous sommes très impliqués en amont dans l’approche, le dimensionnement et l’étude de faisabilité du projet. Nous travaillons beaucoup avec les bureaux d’études et la maîtrise d’oeuvre et d’ouvrage ».
Bien dimensionner l’unité de prétraitement
« La difficulté en France, par rapport à l’Allemagne qui a une approche théorique de la question, est que nous sommes tenus, par la directive-cadre européenne sur l’eau, à une obligation de résultat sur les sorties du système (le bon état des eaux) mais nous manquons de données de référence sur lesquelles baser nos quantifications des pollutions présentes dans le milieu et celles suscitées à venir par l’utilisation finale (circulation, bâtiment, véhicules légers), confie Christophe Chastel, directeur technique chez Fränkische. Chaque concepteur doit analyser la problématique et trouver sa solution pour résoudre le problème. Nous disposons aujourd’hui d’analyses plus fines pour améliorer nos solutions par rapport aux problématiques actuelles. Nous réfléchissons à ces questions, avec d’autres industriels et experts, afin de faire évoluer notre approche normative. Par exemple le dimensionnement des bassins se basait il y a encore quelques années sur les pluies décennales. Aujourd’hui, alors que l’intensité des pluies augmente, on s’aperçoit que, surtout dans certaines régions, ce n’est pas suffisant pour protéger les biens et les personnes. On est passé à des dimensionnements supérieurs ».