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Analyse en ligne : des appareils à la maintenance toujours plus allégée

30 novembre 2018 Paru dans le N°416 à la page 47 ( mots)
Rédigé par : Emilie TRAN PHONG

Bien que l’analyse en ligne présente un réel intérêt pour les industriels de l’eau, tous n’ont pas encore sauté le pas. Beaucoup sont freinés par les coûts de maintenance qui peuvent être associés aux instruments de mesure. Pour les convaincre, les fabricants ont donc fait évoluer leurs produits, de manière à faciliter leur entretien.

En complément des analyses en laboratoire imposées par la réglementation, les usines de production d’eau potable et les stations de traitement des eaux usées sont de plus en plus nombreuses à s’équiper d’instruments de mesure en ligne. Les exploitants en installent à l’entrée et à la sortie de leurs usines, ainsi qu’à des étapes intermédiaires, de manière à pouvoir contrôler en permanence le bon fonctionnement de leurs équipements et le bon déroulement des process. Ainsi, il est possible d'être alerté dès l’émergence d’un problème, le situer et appréhender la nature rapidement, et ainsi intervenir avant la crise, comme le souligne plusieurs intervenants sur le forum d'échanges techniques FluksAqua. Beaucoup hésitent néanmoins à investir dans de tels dispositifs, du fait des coûts financiers et humains associés à leur maintenance. Les fabricants en ont conscience.
Le système 8905 de Bürkert, pour l’eau potable, repose sur des cellules de mesure micro-électromécaniques (Mems). Chacun des quatre cubes visibles sur la photo en contient une. Grâce à leur design “plug-and-play”, ils se remplacent d’un simple clip.

Aqualabo, AquaMS, Bürkert, Datalink Instruments, EFS Environnement, Endress+Hauser, Krohne, Metrohm, S::can, Swan, Shimadzu, Tethys Instru-ments, Xylem Analytics ou encore Waltron, TMR et Walchem… Tous ont innové pour faciliter l’entretien de leurs appareils.

Longévité des matériaux

Premier axe de progrès constaté : la durée de vie des produits. Moins les pièces s’usent, moins il faut les changer souvent. Quand ils le peuvent, les fabricants adoptent des matériaux inaltérables : électrodes en or ou en platine, fenêtres de mesure en saphir, LED, etc. Évidemment, cela n’empêche pas d’avoir à nettoyer les sondes régulièrement, surtout si elles sont immergées dans des eaux brutes ou usées. C’est pourquoi les fabricants travaillent aussi le design de leurs appareils pour que ce nettoyage, tout comme les opérations d’étalonnage et de calibration, ne soit pas compliqué à réaliser. Auquel cas il risque d’être mal fait, affectant ainsi directement la précision de l’appareil et… sa longévité. « Sur les analyseurs de DCO QuickCODultra de la marque Lar, dont nous sommes distributeur exclusif, toutes les pièces susceptibles d’être démontées pour maintenance sont accessibles en façade, et la plupart peuvent être changées sans outil, en actionnant un clip ou un levier », indique par exemple Christophe Vaysse, ingénieur technico-commercial chez Anael. Chez Bürkert, on mise sur le “plug-and-play” : « Notre système d’analyse en ligne type 8905, pour stations d’eau potable, est composé de plusieurs cubes de mesure (un par paramètre : pH, redox, conductivité, chlore, dioxyde de chlore et turbidité). Il est possible d’en enlever un, pour maintenance, sans interrompre le fonctionnement de l’ensemble. Quand on le remet à sa place, il est immédiatement opérationnel, explique Olivier Bertrand, responsable marché de l’eau de la marque. Pour l’étalonnage des cubes, c’est très simple : nous avons mis au point un outil de calibration et nettoyage automatique portatif, qu'il suffit de plugger sur le MZ15 ».
La sonde potentiostatique SZ283 d’Aquacontrol, pour la mesure du chlore, du dioxyde de chlore et de l’ozone dans l’eau potable, a séduit le groupe Suez et ses filiales. Placée dans une chambre à écoulement libre, elle ne nécessite pas ou peu de nettoyage selon la qualité de l'eau.

Metrohm, lui, a développé un capteur thermométrique, la Thermoprobe, qui ne comporte ni membrane, ni diaphragme. Compacte, elle est facile à nettoyer. Et, comme elle ne comporte pas non plus d’électrolyte interne, elle n’a pas besoin d’être étalonnée. Même chose avec la sonde de chlore SZ283, fabriquée par B&C Electronics pour l’eau potable : « ce capteur s’appuie sur une mesure potentio-statique ouverte qui, parce qu’elle ne nécessite ni électrolyte ni de membrane, a une durée de vie plus longue, indique Joël Guilleray, directeur d’Aquacontrol, distributeur exclusif de cette marque en France. Le capteur est compact et très facile à nettoyer et à remplacer. En outre, ses électrodes en platine, en forme d’anneaux, permettent une grande stabilité du zéro, ce qui évite un réétalonnage fréquent ».

Tenant compte des retours d’expérience de ses clients, Krohne a lancé cet été une nouvelle version de son capteur de niveau de boue Optisys SLM 2100. Parmi les évolutions apportées, nombreuses sont celles qui visent à en simplifier l’entretien.

Chez Swan, c’est la gestion des stocks de pièces détachées qui a été simplifiée. « Tous nos instruments sont conçus avec le même boîtier électronique, appelé AMI, explique Guillaume Schneider, directeur commercial chez Swan. Seul le logiciel change. Si bien qu’il suffit d’avoir une carte électronique en stock. Quand un appareil AMI tombe en panne, quel qu’il soit, cette carte sera valable. Il n’y aura qu’à mettre dessus le bon soft, correspondant au paramètre à mesurer ».

Sans contact et sans réactifs

Autre stratégie, plus radicale, adoptée par les fabricants : repenser complètement les principes de mesure. Alors qu’il fallait jusqu’ici plonger les capteurs de hauteur et de vitesse dans l’eau, les instruments sans contact se multiplient, à l’image des capteurs de niveau Micropilot d’Endress+Hauser, du débitmètre LaserFlow d’Ijinus ou encore du détecteur d’hydrocarbures Row de Cometec. Comme ils ne sont pas immergés, ils s’encrassent moins.
La gamme SmartPat de Krohne, avec convertisseur intégré, est déjà disponible pour les mesures de pH (photo), de conductivité et de Redox. Elle sera élargie à d’autres paramètres courant 2019.

Chez Swan, on a même réussi à concevoir un turbidimètre sans contact, l’AMI Turbiwell. « Au lieu que l’échantillon d’eau remplisse toute la chambre de mesure, comme sur un modèle classique, il n’occupe que la partie basse. Les sondes sont placées au-dessus. Et cela n’impacte pas la qualité de la mesure, puisque le logiciel de calcul tient compte de la diffraction du signal lumineux au moment où il entre et sort du liquide », explique Guillaume Schneider.

Pour les appareils qui ne peuvent pas fonctionner hors de l’eau, il existe divers systèmes d’auto-nettoyage : essuie-glaces, jets d’air ou d’eau comprimée, etc. Certains sont particulièrement élaborés, puisqu’ils empêchent carrément les dépôts. Exemple chez Krohne : « l’Optisys CL 1100, pour l’analyse du chlore dans l’eau potable, est équipé d’une fonction de nettoyage automatique de sonde, dit ASR (pour Automatic Sensor Cleaning), explique Damien Jacquier, responsable de la division Eau. Un processus électrochimique interne à l’appareil provoque la génération d’oxygène et d’hydrogène au niveau de la sonde, ce qui dissout le calcaire et évite d’avoir à le nettoyer manuellement ». Sur le turbidimètre Optisys TUR 1050 de la même marque, un système de nettoyage par ultrasons permet d’éviter les dépôts dans la cuvette de mesure. Même s’il ne se substitue pas complètement à un nettoyage manuel, cela permet d’allonger considérablement le temps entre deux interventions de maintenance.

L’analyseur 2035 de Metrohm, destiné à la surveillance en ligne dans les stations d’épuration, comporte dix voies de mesures. Multi-paramètres, il permet ainsi de superviser les données de process de plusieurs capteurs externes sur un même outil.

Avec les analyseurs colorimétriques, un autre problème se pose : celui des réactifs, qu’il faut recharger régulièrement. Des méthodes de mesures alternatives commencent à voir le jour. Ainsi, le nouveau capteur de nitrate d’Endress+Hauser ne fonctionne plus avec des réactifs chimiques, mais avec un spectromètre UV. Au-delà de telles révolutions technologiques, la plupart des appareils colorimétriques évoluent vers une moindre consommation de réactifs. Les gammes Liquiline Système CA80 d’Endress+Hauser, ou Instran d’Anael, sont ainsi équipées de seringues et pompes micro-doseuses, qui permettent de prélever de plus petits échantillons d’eau, donc d’utiliser trois à six fois moins de réactifs pour faire les mesures. Même chose avec l’analyseur de phosphates Phosphax, chez Hach : la mesure y a été optimisée, de manière à réduire le nombre de fois où le technicien doit se déplacer pour recharger le réservoir de réactifs. Idem pour l’analyseur de carbone organique total COT B3500, lancé cette année par le même fabricant : une méthode d’oxydation avancée a été mise au point qui, parce que plus efficace, offre à l’appareil une autonomie de six mois au lieu d’un.

Étalonnage sécurisé

Swan a trouvé le moyen de garantir à ses clients que les pièces détachées seront encore disponibles dans dix ans : il les fabrique toutes, pour ne pas être dépendant de fournisseurs qui décideraient d’arrêter de les produire (ici, le turbidimètre AMI Turbiwell).

Dans certains domaines, comme celui de la turbidimétrie, l’étalonnage nécessitait jusqu’à présent la manipulation de liquides toxiques, comme la formazine. C’est de moins en moins le cas, les fabricants proposant désormais des étalons solides ou des fioles scellées de produit stabilisé. Mieux, les turbidimètres AquaScat de Sigrist, en plus d’être sans contact, disposent d’un étalonnage automatisé : à une fréquence programmée, un bras motorisé vient positionner un étalon solide devant l’optique, sans gêner ni interrompre l’écoulement de l’eau dans l’appareil.

MicroMac ECO est un analyseur en ligne conçu par Systea et commercialisé par Anhydre pour surveiller des effluents et des procédés en usine. Il peut combiner de 1 à 4 paramètres en une seule machine. Doté de sorties analogiques et numériques ModBus, son intégration dans les systèmes existants est très simple.

Sur d’autres instruments, le risque lié à l’étalonnage n’est pas chimique mais postural. Il faut se pencher au-dessus d’un bassin pour accéder à la sonde, tout en regardant l’écran du convertisseur fixé plus loin sur un mur. Une opération acrobatique évitée par les SmartPat, sondes avec convertisseurs intégrés fabriquées par Krohne : il est possible de déconnecter l’ensemble (capteur + convertisseur) pour réaliser l’étalonnage hors ligne, dans des conditions optimales, et ainsi permettre d’allonger la durée de vie de la sonde par une meilleure régénération des sondes.

Plus de prédictif, moins de curatif

Le Bactosense de Sigrist est un appareil dédié à la mesure cytométrique du nombre total de cellules microbienne (TCC), en ligne. Il permet de limiter au strict minimum les interventions d’un opérateur et augmente sa sécurité en interdisant tout contact avec les réactifs et les déchets, grâce à un système de cartouche interchangeable et rechargeable. Les cycles de nettoyage sont automatiques. Une seule maintenance préventive est requise chaque année.

Au-delà de la facilité et de l’ergonomie de l’entretien, les fabricants communiquent de plus en plus sur la maintenance « qui ne sera pas la même sur de l'eau potable et en assainissement, comme l’explique un intervenant sur le forum d’échanges techniques FluksAqua. Pour l'assainissement, il faut systématiquement penser à l'auto-nettoyage pour alléger, autant que possible, la maintenance ». La maintenance préventive, permet en effet de mieux planifier les interventions. Les capteurs ne se contentent plus d’envoyer des données. Ils peuvent aussi être configurés et consultés à distance, et alerter l’exploitant en cas de problème. Ils intègrent même des dispositifs internes d’autodiagnostic. 

Chez Endress+Hauser, par exemple, « nous proposons l’option Heartbeat sur tous nos capteurs de dernière génération, explique Matthieu Bauer, responsable de marché Environnement. Dans sa version de base, Heartbeat indique de façon très visuelle sur l’appareil, à l’aide d’un picto souriant ou non, s’il fonctionne correctement ou si, au contraire, il y a besoin d’intervenir. Dans sa version communicante, ce système peut être interrogé à distance. Il peut aussi donner l’alerte à la moindre mesure suspecte ». En plus de signaler le problème, Heartbeat fournit dans son message une notice d’intervention pour le technicien : que faire ? comment ? avec quels outils ? etc. 

La technologie Heartbeat d’Endress+Hauser garantit une vérification et un diagnostic permanents sans interruption de process.

Même chose chez Hach, avec les capteurs associés au transmetteur connecté Claros : « Les appareils en ligne deviennent pro-actifs. Les instructions de maintenance étant incluses dans les messages d’alerte, ils permettent même à des non-spécialistes de l’instrumentation d’intervenir », explique Jean-Pierre Molinier, spécialiste produits sondes et analyses en continu chez Hach.

Metrohm propose aussi cette fonction d’autosurveillance. Mais, pour Pierre Guillou, chef de produits Analyseurs process de la marque, cela ne suffit pas : « L’implantation d’un analyseur, c’est d’abord la recherche de la meilleure technique d’échantillonnage en vue d’une maintenance la plus réduite possible. Que celle-ci soit préventive ou curative, elle doit être réalisée de façon appropriée, pour ne pas nuire à la longévité de l’appareil, ni impacter les coûts de maintenance initialement prévus. C’est pourquoi nous avons aussi un important volet formation ».

L'analyseur QuickCODultra d’Anael est le seul sur le marché à pouvoir assurer le suivi de la DCO en ligne sans réactif et sans corrélation, par oxydation thermique à 1200°C sans catalyseur en moins de 4 minutes. Il peut gérer jusqu'à 6 voies d'échantillons. L'absence de filtration et la simplicité de sa maintenance courante, avec l'accès direct en façade à tous les organes permettant l'analyse, sont des atouts importants pour l'utilisateur final.

Chez Mettler Toledo Analyse Industrielle, la technologie ISM permet de connaître les performances des sondes et savoir à quel moment il faudra les étalonner, assurer leur entretien ou les remplacer. Les données prédictives, disponibles partout où cela est nécessaire, permettent de réagir en toute confiance en cas de défaillance intempestive d’un point de mesure. Cette technologie permet également de réduire les coûts liés au cycle de vie de la sonde et d'optimiser son utilisation. 

La maintenance est réduite au strict minimum grâce à des diagnostics prédictifs et la durée de fonctionnement de la sonde accrue grâce à des mécanismes de protection intégrés. 




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