Canalisations PVC et chlorure de vinyle monomère : la surveillance au service de l’équilibre sanitaire, économique et environnemental des réseaux d’eau potable
30 decembre 2019Paru dans le N°427
à la page 109 ( mots)
Rédigé par : Cyrille LEMOINE de Neroxis sa
Connu de tous, le PVC s’est, depuis le milieu du XXe siècle, progressivement installé comme un matériau incontournable des réseaux d’eau. En résidentiel, le PVC est essentiellement utilisé pour les réseaux d’eaux usées, et donc sans risque majeur. Toutefois, le polychlorure de vinyle a massivement été installé dans les réseaux de distribution d’eau potable. Jusqu’à représenter 40?% des plus de 800.000 kilomètres de canalisations que compte le territoire français.
Si, depuis le début des années 1980, la polymérisation du PVC est parfaitement maîtrisée et permet de garantir une intégrité du matériau dans le temps, les canalisations précédemment installées ne connaissent pas une telle stabilité. Avec le temps, de faibles débits, la teneur en chlore de l’eau ou encore des températures élevées en périodes de chaleur, des molécules de chlorure de vinyle monomère (CVM) peuvent être libérées dans les réseaux, et atteindre les points de consommation.
Or, le CVM est reconnu toxique depuis les années 1970. Pour limiter les risques, et en application du principe de précaution lorsque les facteurs favorables connus sont réunis, des purges des réseaux sont régulièrement opérées, impliquant des coûts économiques et écologiques importants. Quels sont les risques réels ? Les réseaux concernés ? Les solutions à mettre en œuvre pour, à la fois, sécuriser les populations et gagner en efficacité et performances dans la gestion des réseaux d’eau potable ?
Le chlorure de vinyle monomère n’existe pas à l’état naturel. Produit chimique purement synthétique, il entre dans la composition du polychlorure de vinyle : le PVC. En résidentiel, si le PVC est essentiellement utilisé pour les canalisations d’évacuation, une partie des réseaux d’eau potable enterrés utilise ce matériau.
Obtenu par polymérisation en suspension, en émulsion ou en masse, le PVC n’est soumis à un dégazage sous vide, afin d’éliminer la plus grande partie du CVM résiduel, que depuis le milieu des années 1970. Eu égard au cycle de vie très long des réseaux d’eau, on estime à plus de 150 000 kilomètres les portions de canalisations de ce type encore en fonctionnement sur l’ensemble du territoire.
Avec le temps et les dégradations résultant notamment du chlore présent dans les eaux d’un réseau, ce PVC est amené à se dégrader et à libérer des particules de CVM, très volatil et peu soluble dans l’eau. Un mécanisme de dispersion de CVM encore renforcé par une augmentation des températures et un effet de concentration lorsque les débits sont faibles.
Dès lors, les réseaux en milieu rural, dont le débit est par définition plus faible du fait d’une sollicitation moindre, y sont particulièrement exposés. Notamment en période de chaleur, où la température à l’intérieur des canalisations peut dépasser 20 °C.
Quels risques sanitaires associés aux CVM ?
Reconnu toxique dans les années 1970, le chlorure de vinyle monomère est classé depuis 1987 comme agent cancérogène certain pour l’Homme, selon le centre international de recherche sur le cancer (CIRC). Depuis les années 1980, le PVC destiné au contact avec les aliments ou avec l’eau potable doit contenir moins de 1 mg de CVM par kg de matériau, ce qui ne génère plus de migration de CVM.
La toxicité du CVM peut jouer un rôle actif dans l’apparition de cancers du foie, et notamment de l’angiosarcome hépatique, un cancer du foie très rare (10 cas/an estimés en France). Mais également tenir lieu de facteur aggravant dans le carcinome hépatocellulaire (ou hépatocarcinome), forme la plus fréquente de cancer du foie (7.600 cas/an estimés en France).
Si, dans le cas d’une consommation quotidienne d’eau du robinet renfermant des teneurs faibles de CVM, le risque de cancer est théorique et fondé sur des études toxicologiques réalisées sur des animaux, le principe de précaution a toutefois prévalu dans l’élaboration des réglementations liées au CVM.
Ainsi, en France, l’analyse du chlorure de vinyle monomère dans l’eau du robinet, sur le réseau de distribution, est systématique depuis 2007. La limite de qualité pour l’eau du robinet est fixée à 0,5 µg/L, en application de la directive européenne 98/83/CE relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine.
Réseaux d’eau en France : des situations disparates
Dans les faits, l’ensemble du réseau d’eau potable français connaît des situations extrêmement hétérogènes. Ce qui n’est pas étonnant avec un patrimoine national de réseau d’eau potable estimé à 878 000 kilomètres d’après Eaufrance, au sein duquel le PVC pourrait représenter jusqu’à 40 % des linéaires posés.
Pour améliorer les connaissances sur cette problématique, une étude a été menée en 2002 par JM Cador sur huit départements français, avec des résultats particulièrement contrastés. Ainsi, les linéaires en tuyauteries PVC représenteraient 3 % dans la Somme, tandis que l’Indre-et-Loire en compterait 71 %.
Parmi les raisons de l’existence d’un tel réseau et de telles disparités : la dispersion de l’habitat. Laquelle induit nécessairement de très longs linéaires par habitant. Et c’est aussi d’ailleurs pour cette raison, et parce que des canalisations PVC sont plus simples et moins coûteuses à déployer, que ce type de tuyauteries est largement majoritaire, voire exclusif en milieu rural.
En ce qui concerne l’état de ce réseau, si une partie est relativement récente du fait d’une adduction tardive de certains habitats et du développement des résidences secondaires en milieu rural, le rapport de 2002 estimait à 10 % les linéaires âgés de plus de 50 ans et à 35 % ceux posés 30 à 50 ans plus tôt. Ces derniers, soit environ un tiers du parc, correspondent précisément à l’époque concernée par les relargages de CVM dans les canalisations PVC.
Face à cette situation, et sachant que le taux de renouvellement annuel au niveau national est estimé à 0,64 % (soit plus de 150 ans pour un renouvellement total), des solutions de remplacement plus rapides (75 à 125 ans) sont à rechercher pour éviter la dégradation des rendements des réseaux. Ce qui représente des coûts estimés entre 600 millions et 1 milliard d’euros par an au niveau national.
Dans tous les cas, il est évident que les canalisations en PVC ancien, à joints collés et posés entre 1960 et 1975, étant considérés comme des matériaux à risques, fragiles et en mauvais état, sont à remplacer en priorité, notamment si des relargages de CVM sont régulièrement constatés.
Réseaux d’eau potable : la délicate gestion d’un patrimoine enterré
Interdites depuis la fin des années 1970, les canalisations en PVC sans dégazage à vide ont été massivement déployées sur les réseaux d’eau potable tout au long des deux décennies précédentes : plusieurs centaines de milliers de kilomètres en ville comme en milieu rural. Un patrimoine enterré dont la gestion globale (modifications, réparations, remplacement partiel) est estimée à environ 1,5 milliard d’euros par an.
Avec un coût d’intervention sur réseau qui peut atteindre 1.000 euros le mètre linéaire (en ville selon la configuration des lieux), les collectivités territoriales en charge de la gestion de ces réseaux d’eau potable doivent en permanence composer entre la qualité de service et du produit, la sécurité sanitaire et les finances publiques.
Ce qui les conduit nécessairement à faire des choix : si les interventions sur les réseaux anciens conduisent systématiquement au remplacement des sections concernées par des canalisations en matériau plus moderne et plus stable, les cycles prévisionnels de modernisation des réseaux devraient maintenir des canalisations en PVC anciennes au moins jusqu’en 2025.
Pour autant, les mesures régulières de CVM sur le réseau, selon les plans de surveillance des agences régionales de santé (ARS), associées aux auto-contrôles des opérateurs eux-mêmes, permettent de limiter les risques, et d’alerter les populations en cas de pollution avérée. Ce qui engendre en général une interdiction temporaire de consommation de l’eau du robinet. Étant, très volatiles, les CVM disparaissent après ébullition de l’eau ; c’est uniquement la consommation d’eau froide qui pose un problème dans ce cas.
Depuis 2007, et notamment grâce aux progrès techniques permettant d’analyser plus facilement le CVM dans l’eau, la France a d’ailleurs mis en place une réglementation plus exigeante que la réglementation européenne, et rendu obligatoire l’analyse du CVM dans le contrôle sanitaire de l’eau.
CVM et réseaux d’eau potable : une gestion préventive des risques
En complément d’une surveillance régulière du taux de CVM sur les réseaux d’eau potable, notamment lorsque le patrimoine enterré recense des canalisations en PVC installées préalablement à la prise de conscience de leur toxicité dans les années 1970, collectivités territoriales et opérateurs savent adopter des mesures de prévention.
On l’a vu : des débits faibles et donc une certaine stagnation des eaux, notamment lorsqu’elles sont chlorées, dans les réseaux PVC anciens augmentent le risque de libération de chlorure de vinyle. Ce qui expose les réseaux ruraux bien plus fortement. Tandis que l’augmentation des températures en période estivale renforce également les processus chimiques conduisant à la dégradation des canalisations PVC anciennes. Et ce malgré le fait qu’elles soient enterrées, ce qui limite partiellement les variations de température.
Pour limiter les risques sanitaires lorsque ces deux facteurs sont réunis, les collectivités territoriales associées aux opérateurs peuvent, par mesure de prévention, décider de procéder à des purges du réseau. Il s’agit bien sûr d’éviter au maximum la consommation d’eau impropre par les populations. Un procédé qui, s’il a le mérite de limiter les risques auprès des consommateurs, implique des coûts importants puisqu’il consiste, ni plus ni moins, à rejeter en puisard ou à injecter dans les réseaux d’eaux usées, de l’eau potentiellement encore potable.
Un pilotage automatique des facteurs à risques
L’inconvénient du système de purges est qu’il est généralement réalisé de façon empirique, c’est-à-dire sans constat réel des débits ou de la température, ou, dans le cas de prélèvements pour analyse de la présence de CVM, selon un rythme qui dépend totalement de la disponibilité des équipes. Laquelle est forcément moindre durant les congés d’été, alors qu’il s’agit d’une des périodes les plus risquées.
Résultat : en application du principe de précaution, le mécanisme de purges est parfois amené à être trop souvent sollicité, particulièrement en période de forte chaleur. Ce qui est aussi paradoxal, ces périodes étant généralement synonymes de restriction d’eau. Et plus globalement, n’est pas très « eco-friendly ».
Pour limiter ces coûts de purges, l’objectif est donc de disposer d’une visibilité bien plus fine de la réalité d’un réseau, des débits réels qui y sont constatés ainsi que des températures. Et c’est à l’aide de sondes posées sur les réseaux à l’occasion d’interventions successives que les opérateurs peuvent assurer un suivi juste et efficace de l’ensemble des réseaux qu’ils gèrent.
De cette façon, ils peuvent suivre en temps réel ces indicateurs, afin de ne procéder à des purges que lorsque cela s’avère strictement nécessaire, au regard des débits et de la température constatée en tel ou tel point du réseau. Une gestion automatisée qui permet ainsi de concilier sécurité sanitaire, restrictions budgétaires et éco-responsabilité tant des collectivités territoriales que des opérateurs privés ou publics en charge de la gestion des réseaux d’eau potable.
La solution Birdz-Neroxis KAPTA 3000 SP4
Les sondes KAPTA™ 3000 AC4, de Birdz-Neroxis, sont déjà connues pour la surveillance des réseaux et ont déjà été utilisées pour la détection de malveillance lors de grands événements (COP21, Jeux Olympiques de Londres, Jeux de la Francophonie de Nice…) et de façon plus générale, pour la détection de contaminations accidentelles (dans plus 200 villes). Aujourd’hui, la gamme KAPTA évolue et s’enrichit avec la sonde SP4 qui mesure la vitesse de l’eau, la conductivité, la température et les transitoires de pression.
Ce produit est particulièrement adapté aux réseaux avec des problématiques de CVM. En effet, les mesures de vitesse permettent d’estimer les temps de séjours qui, une fois couplés avec la mesure de température, permettent de définir un niveau de risque plus précis. Les différents seuils de cet indicateur sont alors utilisés pour déterminer le niveau de purge adéquate. Ces consignes de purge peuvent être mise à jour automatiquement, sur les parties du réseau concerné, par envoi de SMS de commande aux équipements de purge.
Le système peut aller encore plus loin grâce à la mesure de conductivité qui trace l’origine de l’eau. En effet, suivant son origine, l’eau potable n’a pas nécessairement suivi le même parcours dans le réseau, et ne traverse pas les mêmes canalisations. Ainsi, il n’est pas rare qu’un point du réseau soit alimenté par des eaux provenant de source différentes (eau de surface, de forage, achat d’eau de commune voisine…) qui présentent des caractéristiques différentes, notamment en conductivité. En tenant compte de cette information, on peut cibler les sources d’approvisionnement les plus critique et optimiser encore plus les purges pour limiter les risques sanitaires tout en réduisant l’impact écologique.
Enfin, les mesures de transitoire de pression, mesures très rapides, de 10 à 100 fois par seconde, permettent d’identifier des variations brutales de pression susceptibles d’endommager les canalisations ou de générer des retours d’eau.
Ces systèmes autonomes et communicants peuvent s’installer, sur n’importe quel type de canalisations, sans coupure d’eau, grâce à un kit d’installation composé d’un collier de prise en charge, d’une vanne et d’une pièce d’adaptation spécifique.
Ainsi, les solutions IoT (Internet of Thing) telles que proposées par Birdz-Neroxis, permettent d’améliorer la gestion du risque sanitaire des réseaux de distribution d’eau potable, tout en réduisant l’impact environnemental de l’approvisionnement en eau.
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