De quelques centimètres cube pour doser ou prélever un échantillon jusqu’à plusieurs dizaines de mètres cube/heure lorsqu’il s’agit de pomper les liquides corrosifs ou visqueux, les pompes péristaltiques, basse ou haute pression, sont partout ou presque… Des industries minières au laboratoire, elles trouvent également de nombreuses applications en traitement de l’eau.
Appliqué à une pompe, ce principe repose sur un patin ou un galet excentré dont la rotation vient écraser périodiquement un tuyau souple situé en périphérie, aspirant et poussant le fluide qui se trouve à l’intérieur. Le fluide est expulsé du tube durant la phase de pressage, tandis que l’aspiration est générée par la détente du tube souple qui retrouve sa forme initiale après la phase de compression entre le sabot et le corps de pompe.
Malgré les nombreuses évolutions qui ont permis à la pompe péristaltique de progresser au fil des décennies, ses atouts sont restés les mêmes. « Pourvu qu’elle soit équipée du tube adéquat, la pompe péristaltique est capable de pomper une large gamme de produits, y compris dans les conditions les plus difficiles », souligne Christophe Jovani, directeur marketing et communication chez Mouvex. « Elle se différencie par une grande simplicité de fonctionnement associée à une maintenance très légère, renchérit Emmanuel Rolland, directeur des ventes chez Albin Pump, spécialiste français de la pompe péristaltique. Les coûts de maintenance, le temps passé sur la pompe, le nombre de pièces détachées à stocker, sont bien plus faibles que ceux qui sont associés à d’autres technologies ». Aux dires des professionnels, ces coûts d’exploitation avantageux compensent rapidement un léger surcoût à l’achat par rapport à d’autres technologies de pompage. « A débit équivalent, la pompe péristaltique est équipée d’une motorisation plus importante en puissance pour compenser le coefficient de frottement qui existe entre le tuyau et les patins ou la roue, explique Emmanuel Rolland chez Albin Pump. Cette puissance est nécessaire pour mettre la pompe et son contenu en mouvement. Mais une fois que la mise en rotation est réalisée, elle consomme entre deux et trois fois moins de puissance que la puissance qui figure sur la plaque du moteur ». Outre son encombrement relativement important, le couple et l’intensité requise par une pompe péristaltique peuvent nécessiter le tirage de câbles plus conséquents que ceux qui alimentent une pompe centrifuge, une pompe à rotor excentré ou une pompe à lobes. Il en résulte un investissement parfois supérieur au départ mais qui s’amortit au bout de 2 à 3 ans du fait du bilan énergétique favorable de la pompe péristaltique en exploitation.
Dans le domaine de l’eau potable, des eaux usées et des eaux industrielles, de nombreux exploitants ont opté pour cette technologie même si elle reste encore parfois méconnue de certains donneurs d’ordres soucieux d’équiper un parc sans s’engager dans des investissements trop importants. « Elle est en revanche souvent plébiscitée par les exploitants dès lors qu’ils sont en charge de l’exploitation et de la maintenance d’un parc sur le long terme », comme le souligne Emmanuel Rolland.
Le principe de fonctionnement de la pompe péristaltique, basé sur la variation ou le déplacement d’une capacité, lui ouvre de nombreux champs d’applications dans le domaine de l’eau, en matière de transfert, de dosage ou d’échantillonnage.
Transfert : des applications très diverses
Dans de nombreux secteurs industriels, notamment l’agroalimentaire, la chimie, la pharmacie ou les bioprocédés, les pompes péristaltiques, dans leurs versions sanitaire ou aseptique, sont utilisées pour le pompage de liquides délicats, visqueux, corrosif, ou comportant de nombreuses particules solides. « Toutes les industries quelles qu’elles soient, doivent, un jour ou l’autre, faire face à un transfert de fluide un peu compliqué, qu’il soit chargé, visqueux, abrasif ou corrosif », confirme Emmanuel Rolland chez Albin Pump. Leur conception, qui permet d’éviter les procédures de nettoyage coûteuses, les rend bien adaptées aux applications à usage unique. Le fluide acheminé, confiné à l’intérieur du tube, n’entre en contact avec aucun autre élément de la pompe, éliminant tout risque de contamination croisée ou d’arrêt de production.
Autre avantage, l’absence de cisaillement du fluide pompé permet d’éviter les échauffements susceptibles d’abîmer certaines molécules en préservant la texture des liquides pompés et leurs propriétés rhéologiques. C’est par exemple le cas dans les industries agroalimentaire ou les émulsions sont fréquentes, ou dans le secteur des cosmétiques qui recourent beaucoup aux formulations sous forme d’émulsions, de crèmes ou de gels qui ne supportent pas le cisaillement.
Autre type d’applications fréquentes, le transfert de liquides sur une large plage de viscosité. « A 1000 cP, une pompe à membrane est en limite de fonctionnement alors qu’une pompe péristaltique permet de monter facilement jusqu’à 10.000 cP, souligne Frédéric Lemétayer, développeur marché eau chez ProMinent. En traitement des eaux, c’est important car cela permet, par exemple, de travailler avec des polymères plus concentrés ». Les pompes péristaltiques se jouent également du pompage de lait de chaux et de charbon actif, un matériau par nature très abrasif. « Le charbon actif ne sera pas écrasé contre les parois du tuyau lors du pressage mais simplement répulsé, minorant d’autant les phénomènes d’usure et d’abrasion », explique Frédéric Lemétayer.
La pompe péristaltique est également capable de déplacer sur de longues distances des eaux usées et des boues déshydratées jusqu’à 80 % de matières sèches, selon la densité. Leur capacité à bien supporter une marche à sec explique aussi leur présence au sein de procédés sujets à variation ou rupture d’alimentation. En stations d’épuration urbaines ou industrielles, le pompage d’écumes, de mousses ou de flottants est une application souvent citée.
Une limite toutefois, celle liée au débit (jusqu’à 150 m³/h pour l'ALX150 d’Albin Pump), qui conduit à des tailles de pompes parfois imposantes et à des surdimensionnements coûteux. « Ces limites concernent des montages standards, relativise toutefois Emmanuel Rolland chez Albin Pump. Toutes nos pompes peuvent être équipées d’une double tête ce qui permet de doubler le débit initial. Une partie commune composée du moteur et du réducteur associée à une transmission réalisée sur deux corps distincts permet de pouvoir bénéficier assez simplement de ce doublement ». Même chose chez PCM avec la série Delasco™ DX dont le débit de 55 m³/h peut être porté à 100 m³/h avec deux têtes de pompe mais un seul entraînement. Ce doublement présente un autre avantage : si l’un des deux tubes vient à se rompre, la production peut se poursuivre, avec un débit certes réduit, mais sans arrêt pénalisant, jusqu’à ce que l’exploitant dispose d’une fenêtre de tir pour effectuer la maintenance.
Une conception simple, une maintenance allégée
Mais c’est surtout leur capacité à répondre à toutes les exigences qui séduit. « Souvent considérées comme les pompes de l’extrême ou pompes du dernier recours, les pompes péristaltiques sont appréciées pour leur capacité à pomper tous types de produits avec un minimum de maintenance », souligne Sébastien Brosse, chef de marché Abaque chez Mouvex. Les fabricants comme Albin Pump, Axflow, Boyser distribué par Bécot, Mouvex, PCM, Pompes PCR, Verder ou Seko, se sont donc attachés à valoriser cet avantage. Mouvex a ainsi totalement remanié sa gamme de pompes péristaltiques Abaque en 2015 pour la rendre tout à la fois plus légère et plus résistante. « Nous avons revu le design de chaque modèle et de chaque pièce, de la fonderie jusqu’aux roues en passant par les patins, rotors et réducteurs pour obtenir une pompe encore plus fiable et encore moins chère », détaille Sébastien Brosse. La nouvelle gamme Abaque HD intègre ainsi plusieurs améliorations. Une fenêtre, placée sur le couvercle, permet de voir les patins dans leur intégralité, de les régler plus facilement, et de les retirer sans avoir à démonter la pompe. Elle permet également de mettre le corps sous vide plus facilement pour permettre au tube de reprendre sa forme initiale. Le système de fixation du tube a également été revu et simplifié pour être changé plus rapidement. « L’ancien système à trois colliers a laissé la place à un nouveau système breveté reposant sur une presse étoupe associée à un joint carré qui maintient fermement le tuyau et garantit un serrage efficace, explique Sébastien Brosse. Résultat : le temps nécessaire au changement du tuyau a été réduit d’au moins un tiers ». Le système d’étanchéité de l’arbre et du réducteur a également été remanié. La refonte de la gamme s’est accompagnée d’un élargissement. « Nous avons réintégré des tailles intermédiaires qui avaient été arrêtées par le passé pour pouvoir proposer aux clients des pompes ajustées à leur besoin, sans qu’il soit nécessaire de surdimensionner une pompe » explique Sébastien brosse. Une large gamme de tubes en caoutchouc naturel, NBR, EPDM ou Hypalon est désormais proposée pour couvrir tout l’éventail des applications possibles des pompes péristaltiques. De même, Mouvex a développé autour de sa gamme Abaque tout une gamme d’accessoires facilitant l’exploitation, notamment un détecteur de fuites et un amortisseur à membrane permettant d’atténuer les pulsations, un défaut parfois reproché à cette famille de pompes.
Albin Pump a également revu le design de ses pompes ALP45, 30, 25 et désormais 17N pour simplifier davantage encore la maintenance. Le corps a été modifié pour faciliter le démontage du couvercle et la pompe a été dotée d’un système reposant sur un insert/étrier en remplacement de la bague de maintien présente sur les anciennes versions. « Le tuyau étant moins sujet aux mouvements dus au pompage, le risque de fuite s’en trouve réduit et la fiabilité accrue » souligne Emmanuel Rolland.
Chez PCM, une nouvelle gamme, la série Delasco™ DX (DX65 - DX80 - DX100) s’attache à répondre aux attentes de différents marchés dont celui de l’environnement. Un palier intégré permet d’utiliser facilement les pompes avec tout type d’entrainement grâce à un système de connexion rapide. Par ailleurs, un système de calage sur mesure rend la pompe adaptable aux conditions de pompage dans tout type d’environnement. Une trappe d’inspection en acier inoxydable permet un accès rapide aux sabots pour le calage à de nouvelles conditions de pompage. Un système de retrait rapide de la connexion a également été développé pour faciliter le changement du tube.
Dosage : simplicité et précision
Leurs atouts sont sensiblement les mêmes que leurs homologues de taille supérieure : une conception simple, un prix modéré et une maintenance allégée. « Le principe péristaltique réduit les risques de contamination et diminue le nombre et la durée des interventions, le tuyau et, dans une moindre mesure, les galets, seules pièces d’usure à changer et à stocker » comme l’indique Joël Guilleray. Autres avantages, la réversibilité qui permet de vidanger le circuit avant un changement de production ou une intervention. De même, sur certains modèles, il est possible via plusieurs canaux, de réaliser simultanément plusieurs dosages au cours de la même rotation.
Avec une reproductibilité de ±0,5 % et un bon niveau de précision, les pompes péristaltiques ont beaucoup progressé. « Sur des applications de dosage, notre gamme de pompes péristaltiques basse pression ALP atteint entre 95 et 99 % de précision, ce qui suffit à une grande majorité des applications », estime Emmanuel Rolland, Albin Pump. « L’industrie a besoin de dosage précis avec une répétabilité parfaite pour une bonne qualité du produit fini. Les pompes péristaltiques sont de vrais pompes volumétriques entièrement étanches permettant ainsi d’obtenir des précisions allant jusqu’à ± 0.5 % sans variation dans le temps même en cas de variation de viscosité ».
« La précision des pompes doseuses péristaltiques n’a pas cessé de s’améliorer ces dernières années au travers de la façon dont on maitrise la rotation, notamment avec le moteur pas à pas, mais aussi grâce aux progrès réalisés en matière d’élastomères, confirme Frédéric Lemétayer chez ProMinent. Attention cependant, le problème des pompes doseuses péristaltiques n’est pas tant la précision que la dérive liée à l’usure du tube. Une solution consiste à surdimensionner la pompe pour qu’elle tourne plus lentement, minorant ainsi les phénomènes d’usure et donc de dérive ».
Chez Watson-Marlow, la famille Qdos ne comporte ni vannes, ni clapets pour optimiser la productivité tout en fournissant un dosage linéaire précis et reproductible permettant de minimiser le gaspillage des produits chimiques. Cette gamme a pour vocation de répondre aux attentes privilégiant des pompes offrant un faible coût total de possession sans compromettre les performances ou la qualité des process. Elle permet par ailleurs de résoudre certaines problématiques associées aux pompes à membranes, telles que la déperdition d’aspiration et les temps d’arrêts dus à un blocage des vannes et des soupapes de dégazage. Certains modèles permettent de réduire le niveau des pulsations. La Qdos20 est par exemple dotée d’une technologie qui contribue à réduire l’amplitude des pulsations, les compressions tubulaires alternées assurant un rééquilibrage. Il en résulte un déplacement presque continu du fluide et un dosage constant du produit chimique dans l'application. La tête de pompe ReNu™ PU, lancée en 2019, permet un démontage et un remplacement rapide et sécurisé. Pas besoin d’outils ni d’intervention de techniciens qualifiés. De plus, cette tête est dotée d’un système intégré de détection des fuites et de confinement des produits chimiques, ce qui protège l’opérateur de tout contact avec de produits chimiques dangereux. La pompe Qdos 20 dotée de cette tête de pompe assure un débit reproductible de 28 l/h à 4 bar pour les fluides à viscosités variées, ainsi qu’une précision de dosage de ±1 %.
ProMinent développe de son côté plusieurs gammes de pompes doseuses reposant sur des technologies différentes. « Cela nous permet d’exploiter les avantages de chaque technologie et de préconiser celle qui s’avère la plus adaptée à la problématique considérée », explique Frédéric Lemétayer. Bien connue pour ses pompes à membrane qui ont fait sa réputation, l’entreprise développe depuis quelques années plusieurs familles de pompes péristaltiques, à moteur asynchrone ou pas à pas, dans la plage de débit de 10 ml à 30 l/h.
La nouvelle Dulco®flex Control, commercialisée depuis quelques semaines, élargit un peu plus une gamme déjà très vaste en associant la précision d’une pompe doseuse à membrane avec la simplicité d’exploitation d’une pompe péristaltique. « Sa précision repose sur un moteur à courant continu sans balais et un système de commande qui permet un dosage exact et une réduction du débit de refoulement avec un dosage continu jusqu’à 10 ml/h » explique Frédéric Lemétayer. Parmi ses atouts, « une rangeabilité exceptionnelle puisqu’elle est capable de doser de 10 ml/h à 30 l/H. Avec un seul modèle, le client peut faire face à une très plage de besoins », comme le souligne Frédéric Lemétayer. Dotée d’un corps en plastique pour supporter les produits chimiques en cas de fuite, elle est proposée avec deux nuances de tuyau pour des pressions de 5 ou 7 bar. Compatible IoT, elle peut être connectée à la passerelle DULCOnneX qui permet de contrôler des pompes, des sondes, des régulateurs et des systèmes de désinfection depuis un smartphone, une tablette ou un ordinateur.
Echantillonnage : un prélèvement conforme à la norme
Sur les échantillonneurs portables comme sur certains échantillonneurs fixes, deux technologies de pompage sont souvent proposées : les pompes à vide et les pompes péristaltiques. « Toutes deux permettent d’atteindre un même objectif qui est de respecter la norme ISO5667-10, lequel implique d’être capable de prélever un échantillon représentatif avec une granulométrie inférieure ou égale à 9 mm, avec une vitesse d’aspiration de 0,5 m par seconde », explique Matthieu Bauer, responsable de marché Environnement et Energie chez Endress+Hauser France. Chaque type de pompe a cependant ses avantages et ses inconvénients. « Avec une pompe péristaltique, l’exploitant n’entre pas en contact avec les parties souillées du préleveur, contrairement à la pompe à vide qui est équipée d’un bocal doseur qui nécessitera d’être périodiquement démonté pour être nettoyé, souligne Matthieu Bauer. Cela peut être important lorsque le prélèvement concerne un produit dangereux ». Le mode de prélèvement peut également influer sur sa nature, notamment en cas de présence conséquente de matières en suspension dans le liquide à prélever. « Dans le cas d’une pompe à vide, le prélèvement va consister à remplir complètement le bocal doseur, puis à vider le surnageant par aspiration. Un phénomène de sédimentation au fond du bocal, inexistant si l’on utilise une pompe péristaltique, peut modifier la structure de l’échantillon prélevé pour les liquides très chargés », explique Matthieu Bauer.
C’est la raison pour laquelle plusieurs fabricants laissent le choix du mode de pompage à l’utilisateur, même si la pompe à vide domine largement sur le marché du traitement des eaux. Le préleveur fixe Aquinox d’Aqualabo est ainsi proposé en standard équipé d’une pompe à vide mais peut être livré avec une pompe péristaltique sur simple demande. C’est aussi le cas du préleveur fixe de dernière génération Liquistation CSF48 d’Endress+Hauser. Chez Isma, le préleveur type JZ peut effectuer ses prélèvements via une pompe à vide, une pompe péristaltique ou même directement sur conduite en charge.