Le relevage des eaux très chargées nécessite des pompes adaptées, qui soient capables de supporter le passage d’objets volumineux ou filandreux, sans bouchage, et tout en conservant un rendement satisfaisant. Les gammes de pompes susceptibles de relever des effluents très chargés sont nombreuses et reposent sur des techniques de pompage diversifiées : pompes centrifuges, pompes volumétriques, pompes spéciales, qu’il est parfois possible d’associer à des équipements de dilacération ou de broyage. Encore faut-il s’entendre sur le sens de l’expression “eaux très chargées”.
« Il est difficile de définir le concept d’eaux très chargées » explique Jean-François Gautreau, Chargé d’affaires chez Atlantique Industrie. « En ce qui nous concerne, nous travaillons préférentiellement avec des pompes centrifuges, qui ont des limites en termes de viscosité. Dans certains cas, on doit travailler avec des pompes volumétriques pour des produits plus visqueux, comme des boues épaissies en station d’épuration par exemple, qu’une pompe centrifuge n’aura pas la capacité d’aspirer ».
Le pourcentage de matières sèches tient souvent lieu de référence pour le dimensionnement des pompes. « Ensuite, ce qui compte, c’est l’expérience accumulée en termes de produits pompables, car une solide connaissance de terrain est nécessaire pour savoir comment bien adapter les pompes aux différentes situations » poursuit Jean-François Gautreau. Très présente dans le domaine du traitement des eaux en industrie, notamment agro-alimentaire, et en assainissement, Atlantique Industrie distribue notamment les pompes auto-amorçantes Gorman Rupp, et les pompes dilacératrices Landia.
Les pompes auto-amorçantes permettent de pomper des eaux brutes, avec un passage libre important, adapté à des particules allant jusqu’à 76 mm et à des produits visqueux. Les applications concernent d’abord les postes de relevage, ou le pompage en lagunes. Ces pompes garantissent la sécurité des opérateurs, qui n’ont plus besoin d’aller chercher la pompe dans le poste ou dans la lagune. Les pompes Gorman sont dotées d’un système appelé Eradicator, composé d’une plaque d’usure auto-nettoyante agressive incluant des rainures et des encoches en combinaison avec un doigt saillant nettoyant en permanence le centre de la roue de la pompe. La plaque d'usure pourra être changée facilement sur site grâce au couvercle d'accès à l'hydraulique qui permet également de faire quelques simples opérations de maintenance.
Adapter la technologie au liquide pompé
Les filasses et les lingettes sont problématiques pour les pompes. Une accumulation entraîne une obstruction des pompes, ce qui nécessite l’intervention d’un technicien, et représente des coûts parfois très importants pour les exploitants. « Les pompes que nous proposons limitent ce problème, voire l’éliminent complètement. Les clients sont ainsi largement gagnants sur leurs coûts d’exploitation » argumente Augustin Berge.
Deuxième problème en assainissement : le sable, qui peut provoquer une usure prématurée des pompes, lesquelles perdent progressivement leurs caractéristiques d’origine : elles fonctionnent moins bien et se bouchent plus facilement. « Les pompes que nous proposons ont une meilleure résistance à l’abrasion car la roue ne vient pas cisailler le liquide, donc les particules abiment beaucoup moins la structure qu’avec des roues traditionnelles » poursuit Augustin Berge.
En outre, Hidrostal travaille également sur le sujet des eaux pluviales et plus précisément sur les bassins d’orage. « Nous voyons se multiplier depuis quelques années le nombre de construction de bassins d’orage » précise Augustin Berge. Bien qu’un dégrillage soit souvent présent à l’entrée de ces ouvrages, les exploitants sont très souvent confrontés au pompage de liquides chargés, voire très chargés en fin de pompage. Sur ces postes, Hidrostal apporte une réelle solution pour la pérennisation de l’installation : « Grâce à la roue centrifuge à vis, nous éliminons les risques de colmatage et d’usure prématurée des pompes installées, qui sont souvent de puissance importante » explique Augustin Berge.
Assainissement : des hydrauliques toujours plus efficientes
L’augmentation de la concentration des fibres dans les réseaux séparatifs a nécessité de faire évoluer les hydrauliques monocanales et multicanaux de KSB. « La difficulté avec les corps mous, c’est qu’ils ont tendance à s’agripper aux aubes des roues et à boucher la pompe. On travaille donc sur les formes de la roue pour que les fibres puissent se dégager » précise Julien Gaonach. Le département hydraulique de KSB travaille continuellement à l’amélioration des hydrauliques afin de proposer aux utilisateurs la solution adaptée à leur fluide. KSB propose également des pompes pour le transport de fluides dans le domaine minier. La très forte concentration en solides impose des roues munies de revêtements en caoutchouc ou de matériaux très résistants à l’usure. Et pour les eaux industrielles, qui peuvent être corrosives et abrasives, les pompes sont rendues résistantes aux contraintes physiques et chimiques avec des aciers spéciaux ou des inox.
Wilo propose presque exclusivement des pompes centrifuges. « Nous travaillons sur le relevage, pour les logements collectifs et individuels, dans le domaine de l’industrie, ainsi que dans l’assainissement au niveau des postes de relevage » explique Daniel Colombat, Expert spécialisé. « Pour les particuliers, nous proposons des petites pompes, qui traitent environ 12 mètres cubes en débit. Ces pompes sont adaptées pour des logements individuels, ou pour des ensembles de logements. Nous utilisons ensuite différents types de roues en fonction de la charge des eaux à évacuer, mais aussi de la HMT. Outre les roues vortex, nous avons notamment des roues mono-canal, bi-, tri- ou quadri-canal ». Dans le domaine de l’assainissement, Wilo propose deux types de pompes en fonction des cas de figures. « Pour des puissances de pompes inférieures à 10 kW, nous privilégions des pompes à passage libre intégral avec des roues vortex » explique Matthieu Lebrun, Responsable de secteur. « Nous proposons également des roues dans la gamme Solid avec un meilleur rendement que la roue vortex, mais plus sensibles au bouchage que cette dernière. Dans ces situations, on ne misera pas sur le rendement. Au-delà de 10 kW, on arrive sur des stations de relevage plus importantes, on privilégiera le rendement énergétique, et on utilisera l’un ou l’autre type de roues ». La roue Solid revendique une sensibilité au colmatage proche de celles des roues Vortex tout en conservant des rendements comparables aux roues monocanal. Elle repose sur un profil optimisant le passage libre et le chemin parcouru par la veine liquide dans la roue. Wilo avance un niveau de rendement allant jusqu’à 81 % avec une consommation en énergie inférieure de 25 % à celle des roues Vortex.
Grundfos intervient dans les procédés industriels comme en assainissement. L’entreprise développe des pompes à hélices (appelées également “en tube”), où l’eau est mise en mouvement et élevée de quelques mètres pour être transportée. Ces dernières peuvent véhiculer des eaux chargées sur de très gros volumes, et peuvent laisser passer des objets de tailles importantes. Les eaux chargées en filasses ou en lingettes peuvent notamment être prises en charge. « Nous proposons également différents types de roues, comme la roue S-tube qui équipe nos gammes de pompes d’assainissement SE1 et SL1, combinant très haut rendement hydraulique (jusqu’à 84 %) et passage libre jusqu’à 160 mm, explique Spyridon Kranias, Water Utility Market Manager chez Grundfos. Ou encore les roues super-vortex avec les pompes SEV et SLV, dont le rendement hydraulique dégradé est compensé par l'avantage d'un passage intégral dans la volute, et qui sont aussi utilisées sur les eaux chargées en sable, car elles assurent une abrasion minimale ». Grundfos développe également des pompes dilacératrices SEG capables de déchiqueter les corps présents dans l’effluent avant de les évacuer. Cette gamme est plutôt conçue pour le pompage des effluents non traités dans les petits quartiers ou les zones faiblement peuplées sans systèmes d’assainissement ou pour lesquelles les systèmes par gravitation ne conviennent pas.
Xylem travaille également depuis longtemps les problèmes de colmatage, via, notamment ses célèbres roues “N” et “Adaptive N” conçues pour favoriser l’expulsion de solides en évitant l’accumulation de fibres sur les bords d’attaque de la roue. Parmi les derniers développements présentés par l’entreprise, la roue “Adaptive N”, capable de se déplacer axialement vers le haut en cas de besoin, permettant le passage des fibres ou des débris solides.
Cette hydraulique anti-colmatage peut être associée à la solution Flygt Experior™ qui embarque des fonctions préprogrammées de nettoyage préventif de la pompe. Car les hydrauliques ne sont plus les seules réponses apportées par les constructeurs en matière de relevage d’eaux très chargées.
Un principe constant : trouver le bon compromis
Depuis 2018, Sulzer ouvre la possibilité d’adapter des broyeurs en amont de ses pompes pour réduire la charge active, afin de traiter un liquide plus aisément pompable. « Quand on est en présence d’effluents très chargés, il faut parfois intervenir sur le liquide en amont de la pompe pour broyer la charge solide » poursuit Nicolas Smagghe.
Sulzer intervient également fréquemment en relevage des eaux de carrières, de sablières, ou de mines à ciel ouvert, où des pompes d’assèchement sont parfois nécessaires. Pour ce type d’applications, Sulzer propose les pompes submersibles XJ, et XJS, dotées du système intelligent Aquatronic, qui pilote la pompe pour optimiser sa consommation énergétique et en surveiller le fonctionnement. Cela permet notamment, en cas de blocage de l’hydraulique, d’inverser le sens de rotation pour libérer d’éventuelles fortes charges. De plus, les pompes de surface type EMW-R, munies de revêtements en caoutchouc, permettent de limiter l’usure par abrasion sur des eaux très chargées en sable par exemple. Des hydrauliques intégralement en métal, les EMW-M, sont proposées pour une protection encore plus solide contre les produits abrasifs.
Le pompage d’eaux chargées en sable ou en graviers, c’est aussi le domaine de Weir Minerals qui propose de nombreux modèles autour de la gamme Warman®. Cette gamme révolutionne toujours l’industrie minière et le pompage de liquides chargés en repoussant les limites de pompage et de durabilité. La pompe AHF permet par exemple de pomper des boues très visqueuses, très chargées (800 g/l de solides) et très aérées. La particularité de la pompe AHF réside dans le profil de sa roue Warman® brevetée qui permet, via un œil de roue muni d’inducers, de faciliter l’entrée des slurry dans la pompe et leur pompage dès leur arrivée au niveau de la bride d’aspiration de la pompe.
Tsurumi France développe de son côté des pompes adaptées aux eaux chargées en granulométrie et matières fibreuses. Les solutions développées reposent sur des pompes centrifuges à roue semi-ouverte associées à des matériaux adaptés à des applications sévères : fonte, inox ou titane, fonte au chrome et polyéthylène renforcé.
De même, les pompes Dragflow ayant la particularité d’être toutes équipées d’un agitateur sous la crépine fixé à l’axe la pompe qui agite en poussant vers le fond les sédiments ou les boues à pomper en les mettant en suspension, peuvent pomper jusqu’à 30 % en volume de sédiments et 60 % en poids dans la pulpe pompée. Avec en plus l’adjonction d’excavateurs latéraux fonctionnant électriquement ou hydrauliquement, on augmente encore ces capacités. Ces excavateurs permettent aussi de déliter des boues denses et visqueuses ou cohésives, les rendant ainsi plus fluides avant qu’elles ne soient aspirées et pompées par la pompe au centre (voir schéma ci-contre). Il est ainsi possible d’atteindre des densités de la pulpe pompée jusqu’à 1,25 à 1,30. Les pompes Dragflow sont utilisées dans de nombreux domaines : pompage de bentonite sur les chantiers, désenvasement de lacs de barrages hydroélectriques, carrière de granulats et/ou sable, en site chimiques, dans les bassins en aciéries, reconstruction de plages du littoral, dans les industries agro-alimentaires, bassins de nettoyage de légumes, au Canada dans les schistes bitumineux, dans les industries de la pâte à papier, dans les mines, etc….
Pompes volumétriques : des problématiques particulières mais sur des débits limités
Les pompes péristaltiques développées par Albin Pump, Axflow, Seko, PCM, Bécot, ou encore Watson-Marlow sont également capables de transférer indifféremment des eaux très chargées, des fluides visqueux, corrosifs, abrasifs, voire des boues chargées en solides. Leur fonctionnement est basé sur la compression et la décompression en alternance d’un tuyau ou d’un tube. Elles font quotidiennement leurs preuves dans de nombreuses applications en exploitations minières, carrières, industries du béton, industries chimiques ainsi que dans le domaine des boues, mais là encore, c’est le débit (jusqu’à 120 m³/h) qui limite leur champ d’application.
Les pompes à vis excentrée sont particulièrement adaptées aux reprises d’effluents chargés et difficiles comme les boues primaires, digérées, effluents d’élevage ou des lisiers. Le principe de fonctionnement repose sur la rotation d’un rotor un pas qui tourne dans un stator deux pas amenant lors de la rotation du rotor dans le stator un déplacement de cavités de l’aspiration vers le refoulement. Le produit pompé est véhiculé sans pulsation et sans risque de cisaillement. Par la multiplication du nombre d’étages de pression ou pas, les pompes à vis excentrée peuvent travailler en moyenne pression 48/96 bar sur une plage de débits variant de 0,1 l/h à 500 m³/h environ.
La « Smart Conveying Technology » (SCT), est déjà connue des clients de Seepex chez qui elle a fait ses preuves. Elle est particulièrement adaptée au transfert de boues chargées et abrasives. Elle permet un remplacement rapide du rotor et du stator sans démontage des canalisations. Grâce au système de resserrage intégré, permettant un rattrapage du jeu entre rotor et stator en cas d’usure, la durée de vie de la pompe est considérablement augmentée. La technologie « Smart Seal Housing » constitue un complément à la technologie SCT et simplifie la maintenance des pompes SCT côté entraînement. Cette technologie permet au client de retirer la garniture mécanique ainsi que l'ensemble de l'unité rotative sans démonter le carter d'aspiration et la canalisation. Cette nouvelle solution réduit le temps de maintenance à quelques minutes, et limite le temps d’immobilisation de la pompe.