Your browser does not support JavaScript!

Version de travail : Dossier en cours de rédaction

Gestion patrimoniale des réseaux : le temps presse…

La gestion patrimoniale des réseaux est une entreprise de longue haleine, qui nécessite des services structurés… et des moyens financiers. Si les grands acteurs (métropoles, syndicats, délégataires) sont déjà en ordre de marche, les plus petites collectivités doivent aujourd’hui se lancer.

Il aura sans doute fallu la sécheresse de 2022, et la «révélation» de l’étendue des fuites d’eau potable, pour que la gestion patrimoniale des réseaux devienne vraiment un sujet de préoccupation. «La gestion patrimoniale n’apparaît importante qu’en situation de crise, lorsque l’eau devient rare. En effet elle coûte cher, n’est pas politiquement porteuse puisqu’il faut envisager d’augmenter le prix de l’eau, implique parfois des travaux sur des voiries neuves… C’est une nouvelle culture à faire accepter aux consommateurs et aux décideurs» analyse Pierre Rampa, Président de l’organisation professionnelle Les Canalisateurs, et de la société Pierre Rampa TP. Même constatation chez Geomod et HydrauSoft, entreprises qui commercialisent depuis plusieurs années en Europe un outil numérique de gestion patrimoniale, InfoAsset Manager, également disponible en France mais pas utilisé actuellement. «Cela évolue : depuis quelques mois, nous sommes beaucoup sollicités en France sur cet outil. Le sujet, qui n’était pas une priorité jusqu’à présent, le devient avec le stress hydrique» indique Nathalie Lopez, en charge de la Communication et du Développement commercial chez Geomod.

Cette évolution est également constatée chez HydrauSoft qui accompagne les bureaux d'études et collectivités autour des logiciels de la gestion de l’eau. Mais de quoi parle-t-on? L’Astee a édité avec l’Onema une série de guides sur le sujet, tant pour l’eau potable que pour l’assainissement . On y trouve cette définition: «La gestion patrimoniale d’une infrastructure consiste à la maintenir en état, tout au long de son cycle de vie, pour optimiser le coût des opérations d’acquisition, d’exploitation ou de réhabilitation afin de fournir un niveau de service performant répondant à la fois aux besoins et aux attentes et ce, en cohérence avec l’évolution des attentes des usagers, des technologies disponibles et du cadre règlementaire.» 

Cette définition vaut pour tous les secteurs, mais le monde de l’eau présente plusieurs particularités qui ne lui facilitent pas la tâche. D’une part le patrimoine est souterrain, parfois ancien, et donc pas toujours très bien connu. D’autre part sa valeur (et son coût de remplacement) est considérable par rapport au chiffre d’affaires des services d’eau potable ou d’assainissement. Concrètement, en eau potable, il s’agira de limiter les fuites, renouveler ou réhabiliter les canalisations défectueuses, entretenir les différents accessoires, prévoir les extensions et interconnexions, mais également assurer la continuité du service et la qualité de l’eau délivrée. En assainissement, l’accent sera plutôt mis sur la continuité de l’écoulement et la limitation des entrées d’eau claires parasites.

L’ÉTENDUE DU PROBLÈME

Dans son rapport national de 2023 (établi sur les données de 2021), l’Observatoire national des services d’eau et d’assainissement, ou Sispea, recensait 10745 services d’eau potable, 12392 services d’assainissement collectif (plus 2514 SPANC), portés par 13855 collectivités. La loi NOTRe7 de 2015 a entraîné  et continue de le faire une diminution du nombre de services puisque, d’ici le 1er janvier 2026, les communes assumant encore seules cette compétence devront l’avoir transférée à des EPCI, communautés de communes, communautés urbaines ou syndicats. «Il en restera tout de même plusieurs milliers» assure Patrick Alayrangues, Directeur associé du bureau d’études Altereo. Ensemble, selon une étude patrimoniale réalisée par l’économiste Maria Salvetti pour l’UIE9, ces services gèrent près d’un million de kilomètres de réseau d’eau potable et plus de 23 millions de branchements, sans compter les usines et les réservoirs. 

Les réseaux d’assainissement comptent environ 300000 kilomètres de canalisations et plus de 20 millions de branchements. Plus bien sûr les STEU, d’une durée de vie de 20 à 30 ans, inférieure à celle des réseaux. Or comme l’indique ce rapport «57% des réseaux de l’échantillon ne disposent pas d’un plan de renouvellement». L’«échantillon» pris en compte représentant la moitié du linéaire français, ce chiffre est certainement très proche de la réalité… Ces moyennes nationales donnent un ordre de grandeur du défi qui nous attend mais c’est localement, au niveau de chaque collectivité responsable, que se décide le plan de gestion. Beaucoup de services, surtout dans les petites collectivités, entament tout juste la démarche vers une vraie gestion de leur patrimoine. Dès lors, comment s’y prendre? Par où commencer ? Existet-il des outils ? Des aides ?

S’ORGANISER

«La gestion patrimoniale est un processus continu, au long cours, qui demande d’engranger en permanence des données pour définir et affiner une feuille de route. Cela demande que l’élu responsable porte la problématique dans la durée et que du personnel soit disponible» estime Patrick Alayrangues (Altereo). «Le problème principal est de recruter les personnels compétents et de mettre en place un service dédié» confirme Philippe Lagubeau, ex-PDG de Dpsm (filiale de Sade spécialisée dans l’intervention sur les réseaux et ouvrages de l’eau), aujourd’hui consultant chez Philippe Lagubeau Conseils. Inévitablement, des disparités apparaissent. «Les grosses agglomérations, les métropoles, les gros syndicats se structurent et montent en compétence. Les petits services disposent de peu de moyens et de ressources en personnel pouvant consacrer du temps et de la réflexion aux enjeux territoriaux, à la feuille de route, à la cadence des travaux. Rester petit va devenir très compliqué» estime ainsi Patrick Alayrangues (Altereo). 

Même constat chez Pierre Rampa (Les Canalisateurs) qui distingue «deux Frances». «Il y a d’une part des collectivités ou syndicats très structurés, avec un service dédié, de l’ingénierie, qui font éventuellement appel à des bureaux d’études. Ils ont réalisé (ou sont en train de le faire) un inventaire de leur patrimoine, connaissent bien leur réseau, disposent d’un SIG. Et puis il y a l’«autre France»: des petites communes avec un service d’eau réduit au minimum, qui devront intégrer des intercommunalités car elles ne pourront pas continuer comme cela» estime-t-il. Aspect essentiel de la gestion patrimoniale, le diagnostic permanent permet d’établir un programme de travaux, d’analyser l’efficacité de ces derniers afin d’effectuer leur validation, d’amender ou de modifier la planification des travaux de renouvellement restant à réaliser. 

L’objectif pour la collectivité est multiple: optimisation du programme de travaux de renouvellement des canalisations d’assainissement, réduction de la fréquence et des volumes déversés vers le milieu naturel, orientation du programme d’investissement pour assurer le meilleur service public possible à l’usager en vue d’une maîtrise des coûts. Afin d’accompagner les communes dans la gestion patrimoniale de leurs réseaux, Cereg a développé Diagram, le Diagnostic des Réseaux d’Assainissement Maîtrisé, une offre de service pour le suivi en continu des systèmes d’assainissement. Elle permet ainsi aux municipalités de disposer d’une vision rétrospective et prospective de la performance de leurs réseaux et de leur impact sur le milieu naturel, à partir d'un panel d’outils spécifiques développés par le bureau d’études Cereg pour chaque phase du diagnostic permanent.

CONNAÎTRE SON RÉSEAU : ENCORE DU CHEMIN À FAIRE

À l’évidence, la gestion patrimoniale s’appuie sur un prérequis indispensable: bien connaître son réseau et avoir intégré ces données dans un système d’information géographique (SIG) vivant. «La majorité des services font encore face à cette problématique. Le linéaire, le matériau, le diamètre des canalisations sont en général connus mais ce n’est pas le cas de l’année de pose, encore moins de l’historique des incidents ou casses. Or il existe des manières de réaliser un bilan complet, des bureaux d’études proposent cette prestation» affirme Patrick Alayrangues (Altereo). On peut par exemple citer Ingerop. Jeremy Rayez, Directeur de la division Solutions & services chez Setha (filiale de Sade), note là-encore une disparité de moyens. «Les gros donneurs d’ordre, délégataires ou régies, disposent de SIG «vivants». Les petites et moyennes collectivités ont encore des plans papier ou une cartographie informatique figée, qui ne prend pas automatiquement en compte les nouvelles données. Globalement, on a quand même en France une assez bonne idée de la localisation et du fonctionnement hydraulique des réseaux, mais on est en retard sur l’informatisation de ces données» estime-t-il. 

Une situation contrastée, donc, que confirme par exemple Gaël Fraboulet, ingénieur technico-commercial en charge du diagnostic et de l’analyse structurelle des réseaux chez Xylem. «Les collectivités ayant des réseaux historiques très anciens ont parfois récupéré les plans papier, les ont compilés dans leur SIG mais nous avons régulièrement des découvertes lors des inspections comme l’identification d'accessoires non référencés…» révèle-t-il. «Le bilan du Sispea montre que le patrimoine est mal connu dans beaucoup d’endroits» souligne Pierre Rampa, plus pessimiste. Il reste donc encore du travail à faire. Les outils ne manquent pas, puisque des sociétés comme Esri France (ArcGIS), Somei (Wat.gis), Geotech (filiale du groupe Parera, avec ViSit Anywhere), Ciril Groupe (Netgeo et Smartgeo), Geomod, HydrauSoft (InfoAsset Manager et NRWCockpit) ou 1Spatial (1Water), entre autres, fournissent des SIG, sous forme de logiciels ou de services Web. Encore faut-il les alimenter…

LE DIAGNOSTIC PHYSIQUE : COMPLÉTER LA CONNAISSANCE

Savoir où sont les canalisations et quelle est leur nature (matériau, diamètre) est une chose. Connaître leur état est tout aussi important pour, éventuellement, programmer leur renouvellement. Pour cela, rien ne vaut un diagnostic de terrain. Des sociétés comme Setha, Xylem, Axeo, Dron’Eau, Bathy Drone Solutions, CT2MC, Acwa Robotics, Itron ou Hydrovideo proposent pour cela leurs prestations, à base de robots, drones et caméras. Un tel diagnostic peut se réaliser en curatif, à l’occasion d’un incident, ou, mieux, faire partie d’une campagne systématique d’inspection du réseau à visée préventive. Xylem, par exemple, met en œuvre toute une gamme de robots, soit pour rechercher des anomalies (fuite, poches d’air) et les géolocaliser précisément, soit pour l’analyse structurelle des canalisations (corrosion, usure du matériau, perte d’épaisseur, ovalisation). Dans le premier cas, ce sera par exemple la SmartBall, entraînée par le flux du réseau en charge, ou le robot Sahara, muni d’une caméra, qui se déplace de manière filaire et est suivi par un opérateur en surface, ce qui permet de repositionner la conduite grâce à des points GPS. Dans le deuxième cas, Xylem lancera plutôt le robot Pipediver. A travers son activité robotique, la société CT2MC, avec sa gamme CAN’EAU, propose des solutions d’inspection autonome pour les réseaux d’assainissement, les galeries d’eau libre ainsi que tous les ouvrages confinés. Le Sonar Rotatif de CT2MC a ainsi été utilisé récemment pour réaliser l’inspection des réseaux d’eaux usées sous la plage de la promenade des Anglais à Nice, sur près de 6 kilomètres de long. Une opération commanditée par la société AXEO TP, menée en trois jours par CT2MC afin de réaliser le diagnostic du collecteur principal du réseau, identifier des défauts sur la structure génie civil du collecteur, ainsi que pour évaluer le niveau sédimentaire dans la canalisation, mais aussi la qualité des effluents pour détecter, localiser et quantifier des rejets anormaux. «De plus en plus, les collectivités suivent des programmes de diagnostic, voulant inspecter la totalité de leur linéaire avant d’investir dans le renouvellement des canalisations. Nous remarquons alors souvent que le niveau d’usure n’est pas homogène sur la totalité du linéaire inspecté et que seulement quelques pourcentages du réseau justifient un remplacement ou une réhabilitation. Cela permet aux collectivités d’intervenir plus précisément, et de limiter les coûts des travaux» affirme Gaël Fraboulet. Xylem est par exemple intervenu à Rennes pour le compte des Eaux du Bassin Rennais. «En une seule journée, nous avons inspecté 18 kilomètres de canalisation structurante datant des années 1960, en eau potable et sous pression» se souvient Gaël Fraboulet. La métropole de Nancy a également fait appel à Xylem pour faire un état des lieux de son réseau. Dans les deux cas, la SmartBall envoyée dans le réseau a été récupérée par un drone aquatique dans un réservoir, sans intrusion humaine et sans nécessiter de vidange. «Il y a peu de budget pour les inspections préventives. Dans 80% des cas, nous intervenons en curatif, en général à la suite de plaintes de consommateurs. Si cela se produit souvent dans le même secteur, nous proposons toutefois d’analyser une zone plus large à titre préventif» précise Jeremy Rayez (Setha). La Setha intervient aussi bien pour des problèmes de qualité de l’eau que pour des désordres hydraulique (débit, coupures, casses, fuites…). Dans un premier temps, SETHA déploie sa solution d’analyse globale Aquadiag®, il s’agit de caractériser les dépôts qui se sont formés dans les canalisations et altèrent la qualité de l’eau. Setha, qui dispose de camions laboratoires, prélève et analyse des échantillons d’eau à différents points du réseau afin d’établir une cartographie de sa qualité. «Cela nous donne le degré d’encrassement des conduites. Ensuite nous proposons un plan d’action hiérarchisé pour le nettoyage des conduites. Nous disposons de différents moyens selon la nature du dépôt» précise Jeremy Rayez. La société vient ainsi de cartographier puis nettoyer les réseaux d’une communauté de quatre communes dans le Nord de la France. «Cela nous pris un an, mais les usagers nous remercient: ils ont enfin de l’eau claire au robinet». Pour les problèmes hydrauliques, Setha favorise l’analyse d’échantillons de canalisations dans son laboratoire CanaScan. «A l’occasion d’une casse, nous récupérons un bout de canalisation pour analyser la cause du problème et définir la durée de vie résiduelle du réseau. L’idéal est de multiplier les analyses à l’occasion d’interventions sur le réseau (réparations, travaux, branchements…), voire de mener une campagne de prélèvements volontaires. Cela permet ensuite à la collectivité de dresser un plan de renouvellement pertinent» explique Jérémy Rayez. Reste que globalement, selon Philippe Lagubeau, «par rapport aux besoins, on n’inspecte pas assez de linéaire».

FAIRE VIVRE CETTE CONNAISSANCE

C’est sans doute là que se fait la différence. Une véritable gestion patrimoniale s’applique non pas à un réseau figé à un moment de son histoire, même récente, mais au système réel, en perpétuelle évolution. Historique des casses, compte rendu de toutes les interventions, même de «simple» maintenance, des modifications (branchements par exemple), des éventuels diagnostics et inspections, tout doit être «remonté» et intégré au fur et à mesure dans la base de données du SIG. La plupart des solutions SIG présentes sur le marché acceptent cette mise à jour permanente. Encore faut-il que le personnel de terrain soit formé et dispose d’outils pour transmettre les données sous un format acceptable par le GIS (sinon il revient à un opérateur de le faire à partir des comptes rendus de terrain). «L’idéal est un SIG qui intègre le vécu du réseau pour compléter la connaissance au fil de l’eau. Les inspections caméra, par exemple, sont normées Afnor en France: il en résulte un fichier structuré pouvant alimenter un SIG. Mais il ne suffit pas d’acheter l’outil, il faut des opérateurs pour mettre à jour la base de données. Cela se rapproche de la maintenance opérationnelle. Les gros services disposent de logiciels de GMAO mais ils ne sont pas forcément connectés au SIG: les informations de maintenance ne sont pas géolocalisées. Quant aux petits, ils n’ont pas les moyens d’acquérir un outil de GMAO qui serait d’ailleurs surdimensionné» estime Patrick Alayrangues (Altereo). Esri France propose toujours son logiciel ArcGIS. «Ce SIG s’intègre dans le système informatique des clients. Les gros services qui utilisent ArcGIS ont aussi des outils de GMAO, de CRM (gestion de la clientèle): ArcGIS permet de cartographier ces données. Il peut également être connecté à des BIM ou des outils de modélisation comme Epanet ou InfoWorks WS Pro» détaille Régis Becquet, ingénieur commercial pour le Marché Eau/ Environnement chez Esri France. Les grands délégataires (Suez, Saur, Veolia, Sogedo) utilisent ArcGIS, de même que des syndicats comme le SIAAP, le Sedif, Réseau 31 ou des collectivités comme la Métropole européenne de Lille ou Agglopolys (la communauté d’agglomérations de Blois). Des collectivités plus modestes peuvent faire un premier pas en adhérant au programme gratuit arcOpole que propose Esri France. Il s’agit d’une plateforme d’échanges pour les utilisateurs d’arcGIS, qui apporte aussi des ressources gratuites comme un portail cartographique ou un MCD (modèle conceptuel de données). «Ces collectivités peuvent ainsi commencer à organiser leurs données métier sur un plan géographique. C’est une porte d’entrée vers ArcGIS» explique Régis Becquet. Ali Katraoui chez Ovarro, ajoute : «Il est crucial de mettre à jour son SIG après chaque opération de réhabilitation ou de réparation du réseau. Par exemple, un manchon PVC sur une canalisation en fonte modifie la vitesse de propagation du son et ainsi décale la position de la fuite. Notre plateforme Atrium et son application web LeakVision intègrent un SIG permettant de suivre les réparations. Ainsi, les techniciens ont accès à l’ensemble de l’historique des travaux ce qui les aiguille dans leurs opérations de recherche de fuites».

ETABLIR UNE STRATÉGIE

C’est l’heure des choix. A partir de cette connaissance vivante de son réseau, le MOA va réfléchir à une stratégie patrimoniale à moyen-long terme et établir, par exemple, un programme de renouvellement. Entrent alors en jeu des données internes (âge ou état des canalisations, historique des casses) mais aussi des considérations sur l’impact d’éventuelles casses (notion de criticité), ou des paramètres indépendants comme les travaux de voirie prévus. Le tout dans un budget contraint. Autre aspect à prendre en compte: lors de la rénovation d'un réseau, l’accent est généralement mis sur le réseau principal. Les regards, en tant qu’accès à la canalisation principale, ne sont généralement pas mis en avant. Pourtant, tout comme les canalisations principales, ces derniers sont soumis à un cycle de réhabilitation fondamental. En Allemagne, la société Brandenburger, spécialisée dans la rénovation des regards d’égouts, utilise sa gaine BB2.5 VERTICAL pour la réhabilitation de regards ne nécessitant pas de confection préalable spécifique, permettant ainsi d’éviter des travaux préparatoires coûteux et fastidieux. «Cette flexibilité permet d’économiser du temps, de l’argent et des ressources lors de la rénovation, grâce à une dilatation contrôlée de l’ensemble de la gaine et à une répartition largement uniforme de l’épaisseur de paroi, même après un processus de dilatation important avec un allongement de plus de 60 % par rapport au diamètre initial. Dans sa version standard, le BB2.5 VERTICAL revêt cette géométrie standard d’une épaisseur de paroi moyenne de 7,0 mm. L’épaisseur de paroi minimale requise de 4,2 mm pour une résistance à une colonne d’eau de 1,5 m est atteinte de manière fiable sur toute la surface du regard. Ces valeurs ont été obtenues dans le cadre d’une série d’essais avec près d’une centaine de gaines de regards BB2.5 VERTICAL installées sur notre propre site d'essai», explique Brandenburger. Des bureaux d’études peuvent accompagner le gestionnaire dans cette démarche. «Nous proposons du conseil, accompagnons la collectivité dans l’établissement de son schéma directeur, sa feuille de route, en fonction de ses enjeux, de son territoire, de ses moyens et des aléas» explique par exemple Patrick Alayrangues, d’Altereo. Il existe également des outils numériques d’aide à la décision, à base d’intelligence artificielle ou autres méthodes algorithmiques. «Ces nouvelles technologies sont en train de révolutionner la manière d’appréhender la gestion patrimoniale. Initialement réservées aux «gros» clients, elles se sont démocratisées vers les moyennes collectivités. Les petites restent pour l’instant exclues car personne n’a encore résolu l’équation économique» affirme Patrick Alayrangues. Pour l’assainissement, Altereo propose ainsi sa solution Indigau. «Les grosses agglomérations inspectent par vidéo (ITV) plusieurs dizaines de kilomètres de collecteurs par an: il faut valoriser ces résultats. Indigau peut établir l’état de santé des canalisations à partir des ITV et calculer une probabilité de casse. Il peut également croiser cela avec des critères comme les travaux de voirie» détaille Patrick Alayrangues. La métropole de Grenoble, par exemple, a acquis un logiciel Indigau pour aider son service de gestion patrimoniale à élaborer le programme de travaux sur le réseau d’assainissement. Béziers est également utilisateur. Altereo dispose d’un logiciel similaire, HpO, destiné aux réseaux d’eau potable. Celui-ci est notamment utilisé par le SEDIF et la ville de Limoges, ainsi que sous forme d’étude à Tours, Orléans, Annecy, La Havre, ou encore Brive. «A partir des données du réseau et de l’historique des casses, il utilise l’intelligence artificielle pour prédire les futures casses. Il peut croiser ces probabilités avec d’autres critères pour prioriser et aboutir à un programme de travaux» expose Patrick Alayrangues. Limoges, par exemple, utilise un logiciel HpO. «Nous avons construit avec eux les critères de priorisation des travaux pour définir le programme. C’est la bonne démarche: le MOA doit prendre son rôle, la décision ne se délègue pas à un bureau d’études» souligne-t-il encore. Valence, Pontoise, Béziers et Montpellier utilisent également Indigau. Connu pour ses logiciels de modélisation hydraulique comme InfoWorks WS Pro, Geomod propose une solution de gestion patrimoniale. «InfoAsset Manager intègre toutes les caractéristiques du réseau (âge, matériau), l’historique des incidents, des interventions, les mesures, les inspections, les analyses, etc. C’est donc d’abord une base de données qui rassemble tous les éléments de gestion patrimoniale, émanant de sources diverses et variées, et les date. Ensuite, l’outil peut faire des modélisations, simuler les casses ou les fuites potentielles, hiérarchiser les risques. Enfin, lorsque le gestionnaire a défini ses priorités et décidé d’un plan de maintenance et d’investissement, il faut le décliner de manière opérationnelle auprès des exploitants et des intervenants, que ce soit travaux ou maintenance. InfoAsset Manager comprend des modules dédiés, pour traduire le plan en éléments de tâche et en planification opérationnelle. Enfin, le plan d’action va vivre et, au fur et à mesure de l’exécution des travaux, on peut intégrer les temps passés, les dépenses, les matériels utilisés, pour alimenter la base de données en continu» explique Nathalie Lopez (Geomod). «Bien qu’il possède son propre fond de plan, InfoAsset Manager peut se connecter au SIG de la collectivité, s’il existe. On peut aussi le relier à un logiciel de facturation, ce qui permet de tracer les dépenses annuelles» ajoute Souhila Amrioune, ingénieure d’études chez Geomod. Pour la gestion patrimoniale des réseaux d’eau potable, la société Neroxis utilise quant à elle la sonde KAPTATM 3000 PTC, accompagnée de tableaux de bord. Autonome en énergie et communicante (2G, 3G, HR net, LoRa) cette sonde qui s’installe directement dans les canalisations permet de détecter des zones à risques sur le réseau, notamment des transitoires de pression qui peuvent affecter la durée de vie des canalisations. «On remarque souvent que les collectivités ont du mal à exploiter réellement leurs ITV. InfoAsset Manager est un outil de gestion et de valorisation de toutes les données patrimoniales des réseaux d’eaux, donc cela comprend aussi les ITV. Ce logiciel permet de les intégrer et de les exploiter au mieux notamment dans le cadre de la création de plan de réhabilitation», souligne Armonie Cossalter, PDG d’HydrauSoft, qui distribue en France la solution InfoAsset Manager. Enfin, la société Ax’eau, spécialisée dans la détection des fuites, met à la disposition de ses clients un outil digital de gestion baptisé Ax’eau Connect : «Cette plateforme accessible en ligne permet à minima à nos clients de suivre en direct l’avancée des investigations et de recevoir au fil de l’eau les rapports des fuites localisées sous forme de PDF, cartes, tableurs, etc. Généralement ces rapports sont ensuite intégrés par le client à son outil d’ordonnancement pour organiser les travaux de réparations», précise Ax’eau.

COMMENT FINANCER ? 

«Pour construire une politique patrimoniale, il faut y mettre les moyens» affirme d’emblée Pierre Rampa. Or, dans son étude pour l’UIE, l’économiste Maria Salvetti estime que le déficit français d’investissement de renouvellement, pour les seuls réseaux d’eau potable, se situe entre 776 millions et 3,1 milliards d’euros (en 2015). Et de fait, le Sispea indique un taux de renouvellement annuel de 0,65% pour les réseaux d’eau potable et 0,48% pour l’assainissement collectif. «Il faudrait passer au double pour simplement maintenir le réseau, et cela ne suffira pas dans certains syndicats où il arrive en fin de vie. Nous allons être confrontés à un mur d’investissement. Pour y faire face, il faudra augmenter le prix de l’eau. Les communes isolées pourront en plus bénéficier de subventions des agences de l’eau, éventuellement des départements. La banque des Territoires propose également des Aquaprêts10 » énumère Pierre Rampa. «Nous espérons aussi qu’Europe va s’emparer du sujet de l’eau et créer un financement spécial, un «fonds bleu», car c’est un problème pour tous les pays du sud» ajoute-t-il. Philippe Lagubeau ne dit pas autre chose: «il faut comprendre qu’il va falloir donner à l’eau son véritable prix pour pouvoir réaliser les travaux indispensables».