Faire face à un choc extrême, à une crise majeure et assurer selon divers scénarios le maintien du service d’eau et d’assainissement aux usagers : les PCA des entreprises de l’eau l’ont prévu. Depuis 15 jours, aux plan local, national, global, les équipes des entreprises de l’eau sont à l’épreuve de la pandémie. Mobilisées pour la continuité de service, elles disposent d’organisations bien entrainées à réagir à cet événement d’ampleur inédite.
Jean-Marc
Boursier, Directeur Général Adjoint, en charge de la Région France et des
Opérations du Groupe SUEZ, livre un état des lieux de la continuité
du service et des mesures de protection des équipes chez SUEZ.
L’eau, l’industrie, les nuisances : S’agissant du Covid-19, comment gérez-vous cette pandémie qui a pour particularité de toucher toutes vos activités ?
Jean-Marc Boursier : SUEZ a mis en place un dispositif de mobilisation mondiale pour garantir la continuité des services : la production et distribution de l’eau potable, le traitement des eaux usées et la collecte et gestion des déchets. Nous assurons des services essentiels à la santé et à la qualité de vie des citoyens. Cette crise est inédite mais nous sommes mobilisés pour la continuité de service. Nous sommes également présents aux côtés de nos clients industriels dans certains secteurs, tels que la chimie ou le secteur pharmaceutique. Les plans de continuité d’activité (PCA) peuvent être déclenchés à tout moment dans chaque pays où le Groupe est présent. Ils capitalisent sur des événements précédents, à l’exemple de l’épidémie du virus H1N1.
Les
équipes Eau France de SUEZ sont organisées pour assurer l’alimentation en eau
potable ou le traitement des eaux usées en toute circonstance. Le plan de
continuité de service mis en place consiste à se recentrer sur les missions
clés du service tout en préservant les équipes. Les activités non critiques ont
été suspendues ou reportées à l’exemple de certaines opérations de maintenance.
Par exemple à Bordeaux, pour une usine d'eau qui fonctionne habituellement avec
22 collègues, nous parvenons à assurer la continuité de service avec 6
collaborateurs qui alternent. Dans le centre d'appels, on ne traite que les urgences
et on fonctionne avec 6 personnes au lieu de 30 à Biarritz et 4 personnes au
lieu de 25 personnes à Bordeaux.
A
ce stade, les opérations se déroulent bien. Nous nous adaptons en
permanence. En France, nous avons débuté notre cellule de crise très tôt, fort
de l’expérience vécue en Chine et en Italie.
EIN :
Quel dispositif de protection global s’applique aux exploitants et aux équipes
sur le terrain ?
JM.B : L’organisation des équipes dans le cadre du PCA vise à limiter la proximité entre les salariés avec stricte application des gestes barrières. Du point de vue opérationnel, le port du masque, la protection des voies respiratoires et des yeux, concerne exclusivement certaines activités de l’assainissement exposées aux aérosols d’eaux usées et boues d’aération. Nous faisons en sorte de les limiter au maximum.
Le Groupe dispose de masques dans le cadre de ses activités opérationnelles (FFP2 et même FFP3 de catégorie supérieure). Les masques ont été jusqu’à présent réservés aux soignants et professionnels de santé. La réquisition du gouvernement est désormais levée et nous allons en recevoir très prochainement sur nos sites opérationnels.
EIN :
Les usines de potabilisation, les stations d’épuration figurent-elles parmi les
infrastructures les plus exposées au risque de contamination du Covid-19 ?
JM.B : Dans l’eau potable, ce virus ne résiste pas plus que les autres virus face aux procédés de désinfection en place sur nos usines de potabilisation (chlore, UV, ozone). Les scientifiques le confirment. Aucune contamination de l’eau potable n’a été observée et aucun cas de transmission du virus par l’eau potable n’a été détecté.
Dans les eaux usées. La présence du virus a été détectée dans les excréments et, par conséquent, potentiellement, dans les eaux usées reçues et traitées sur nos installations. Une transmission possible du virus via les eaux usées ne peut donc pas être écartée. Le mode de contamination établi est par inhalation. Nous avons donc renforcé les mesures de protection du personnel concerné par ce risque sur nos exploitations (port de masque, de lunettes, de gants…) et reporté les opérations non indispensables à la continuité de service.
SUEZ rappelle au grand public de jeter
impérativement les lingettes nettoyantes ou désinfectantes dans la poubelle et
non dans les WC. Les lingettes, lorsqu’elles sont jetées dans les WC, peuvent
boucher les canalisations d’eaux usées en amont des stations d’épuration et
gêner le travail de nos équipes.
EIN :
Dans quelle mesure les outils de supervision vous permettent-ils de prioriser
les interventions de manière à minimiser les risques de déversements et
ainsi maîtriser la qualité des rejets ?
JM.B : Grâce à nos 16 centres VISIO de pilotage des services d’eau et d’assainissement et nos outils connectés, la majorité des infrastructures est surveillée en continu 24h/24 et à distance. En s’appuyant sur l’ensemble des données collectées et exploitées par ces différents outils (centres de pilotage VISIO, systèmes experts, compteurs communicants, etc.) nos équipes surveillent l’exploitation minute par minute, et anticipent l’impact des évènements externes (orages, pollutions…), afin de traiter les alarmes techniques mais aussi de coordonner les opérations terrain. Certaines d’entre elles peuvent être pilotées à distance, telles que la relève des compteurs d’eau, permettant ainsi de limiter les déplacements et interventions de nos collaborateurs.
Pascale
Meeschaert
A
propos du maintien des activités de la filière, signalons l’initiative des
sites FranceEnvironnement et du Guide de l'Eau qui répertorient déjà plus de
420 PCA accessibles à l’adresse : https://www.franceenvironnement.com/plan-continuite-activite et sur toutes les fiches
concernées du Guide de l'Eau.